Le procès de Laye Sékou Condé s’est ouvert le 13 février au tribunal de première instance de Dixinn. Il est accusé d’avoir abusé de sa fille adoptive de « 15 ans ». Il plaide non coupable.
L’affaire a fait grand bruit dans la cité en 2021. Laye Sékou Condé, chauffeur, demeurant au quartier Kakimbo, dans la commune de Ratoma, a été accusé par Fanta Condé, sa fille adoptive (sa cousine en réalité), de l’avoir violée à maintes reprises. Des viols qui se seraient produits dans la concession familiale, mais aussi dans une boutique. Son procès a démarré le 13 février devant le tribunal criminel de Dixinn. A la barre, Laye Sékou Condé a réfuté ces accusations de viol. Il accuse son employeur d’avoir manœuvré pour l’emprisonner : « C’est un simple montage de mon patron, El Hadj Hamidou Barry. Je n’ai jamais violé Fanta Condé, je ne peux même pas imaginer faire de telles choses. Elle a grandi avec moi ». Selon lui, sa mésaventure est partie d’une incompréhension avec son employeur, quand il a perdu sa femme : « J’ai ramené tous les enfants au village. Ma famille voulait que je revienne avec eux, je leur ai dit d’attendre que je me remarie. C’est ce qui fût fait. Mais avant mon retour, le patron avait déjà vendu le camion que je conduisais. Il m’a demandé de travailler dans sa boutique. Il me devait de l’argent, on s’est disputé ». Avant cette dispute, El Hamidou Barry aurait sollicité et obtenu que la nouvelle femme de l’accusé soit sa domestique : « C’est à partir de là que Fanta Condé s’est connue avec les enfants du patron. Elle était devenue amie à eux tous. Dès que j’ai parlé de mon argent, il a inventé cette affaire. C’est mon patron qui m’a emprisonné ». Pourtant, à l’enquête préliminaire et devant le juge d’instruction, Laye Sékou Condé a reconnu sans ambages les charges articulées contre lui. A la barre, il fait machine arrière : « Je n’ai jamais rien reconnu, je n’ai rien fait ».
« Elle avait un amant »
Quand l’affaire a éclaté, la victime a été conduite à la médecine légale pour des examens. Les résultats ont révélé « une défloraison ancienne et des infections liées aux relations sexuelles qu’elle aurait eues ». Laye Sékou Condé dit qu’il n’est pour rien. Il déclare avoir été informé que sa fille sortait avec un jeune du quartier : « Elle est tombée malade, elle saignait. Je l’ai amenée à l’hôpital, le médecin m’a informé qu’elle était enceinte, qu’elle avait subi un avortement, mais Fanta a nié. Le médecin et moi avons tout fait, elle n’a pas voulu en parler ».
Fanta Condé, vraiment mineure ?
Au cours de l’audience, les avocats de la défense ont présenté aux parties au procès un extrait de l’acte de naissance de la victime. Dans cet acte, il est mentionné qu’elle est née en 2002, donc loin des 15 ans qu’on avait déclaré. Le ministère public a d’ailleurs mis en doute la légalité de cet acte de naissance. Il a estimé que celui-ci, déclaré plusieurs années après la naissance de la fille, n’est pas un jugement supplétif transcrit par la mairie comme prévu par la loi, mais « un volet qui n’a aucune valeur juridique ». Et d’ajouter que le fait que la victime ne soit pas mineure ne sous-entend pas qu’elle a accepté de coucher avec l’accusé. Un argument balayé du revers de la main par la défense : « La naissance a bel et bien été déclarée en mars 2002, donc moins de six mois après. Que le ministère public veuille bien vérifier ».
La victime dédouane son « père »
Appelée à la barre, Fanta Condé fait un revirement spectaculaire. Elle nie avoir fait l’objet d’abus sexuels de la part de son tuteur. Elle aussi accuse El Hadj Hamidou Barry : « Laye Condé ne m’a jamais touché. C’est son patron qui m’a dit qu’il a entendu que mon père abusait de moi… Celui qui sait comment Laye s’est retrouvé en prison ». Elle attribue sa défloraison à un certain Abou Camara, son « petit-ami », avec qui elle aurait « couché trois fois à Nongo… Je demande au tribunal de libérer mon père ».
Le ministère public se dit certain que la victime subit des pressions familiales pour changer de versions. D’autant plus que c’est elle-même qui avait révélé les abus qu’elle subissait non pas « pour que mon père aille en prison, mais pour qu’il arrête de me violer ». Le frère de la victime, un certain Abdoulaye Condé, a déposé une lettre de désistement, mais il ne s’est pas présenté au procès. Pire, la dame qui s’est constituée partie civile, prend soin et veille bien sur le « bourreau ».
Ce procès n’a certainement pas fini de connaître des rebondissements.
Yacine Diallo