La manifestation du FDNC, le 16 février, a été émaillée de violences dans le Grand-Cona-crime. Deux jeunes, de 18, de 16 ans, ont été tués par balles à Hamdallaye et à Sonfonia-Gare, dans la commune de Ratoma. Les familles accusent l’armée.

Le sang a encore coulé à Cona-crime. La manifestation à laquelle le Front national pour la défense de la Constitution a appelé le populo pour réclamer un dialogue franc et sincère et la libération des détenus politiques, a tourné à une guérilla urbaine entre jeunes manifestants et farces de défense et de sécurité. Les quartiers de l’Axe Hamdallaye-Kagbélen étaient en ébullition pendant pratiquement toute la journée. Les accrochages ont entrainé morts, blessés et dégâts matériels. Les organisateurs dénombrent deux décès, 58 blessés et 47 interpellations. Le goubernement déplore une trentaine de blessés civils et militaires, des interpellations, des teuf-teuf de la flicaille endommagés. Il n’a pipé mot sur les cas de décès.

Pourtant des familles sont endeuillées, Ibrahima Diallo, jeune mécanicien de 16 ans, a été tué à Sonfonia-Gare, Abdoul Karim Bah, 18 ans, taximotard, abattu à Hamdallye-pharmacie. Dans la famille de ce dernier, c’est l’émoi. Son ami d’enfance accusent un agent des forces de défense : « J’étais avec lui devant la cour de nos voisins, des bérets rouges ont surgi, nous avons tenté de fuir, un d’entre eux est descendu, Karim s’est retourné pour voir s’ils nous pourchassaient toujours, il a tiré sur lui au niveau de la bouche». Abdoul Karim Bah serait tombé dans un caniveau, des flics et des pandores auraient empêché le voisinage de lui porter secours : « Ils jetaient du gaz lacrymogène pour nous empêcher de le sortir du caniveau. C’est là qu’il a perdu beaucoup de sang », explique Mamadou Maladho Diallo. Karim Bah va succomber de ses blessures sur la route de l’hôpital Jean Paul II.

Selon sa grand-mère, Fatoumata Binta Kéïta, Karim pratique la route Leprince. Mais le 16 février, il aurait décidé d’aller travailler sur la Corniche-nord pour éviter les violences sur l’Axe. Dans l’après-midi, il décide de rentrer se reposer. Et il est fauché par une balle : « Il était couché, un jeune est venu lui demander de l’accompagner à Taouyah. Quand ils sont revenus, moi j’étais couchée, mais nos voisins les ont vus remonter vers la grande route. Ils l’ont interpellé, mais il leur a dit qu’il reviendrait vite. Un peu plus tard, il y a eu du bruit, je pensais que c’est les forces de l’ordre, mais j’ai entendu quelqu’un dire qu’ils ont tiré sur Karim Bah».

Le corps d’Abdoul Karim a été transporté à la morgue du CHU Ignace Deen, certainement pour des fins d’autopsie. La famille dénonce une confusion, réclame le corps pour l’enterrer rapidement : « A Jean Paul II, les médecins nous fait croire qu’il n’est pas mort. Ils l’ont caché pour l’envoyer à la morgue d’Ignace Deen. Ils nous ont rendu ses habits, nous ont dit d’aller aux urgences de ce CHU, alors que mon petit-fils était déjà mort. Ceux qui l’ont tué ont été envoyés par le pouvoir. Ils savent qu’ils ont assassiné un innocent. Qu’ils nous rendent le corps, on va l’enterrer dignement». La grand-mère d’Abdoul Karim en veut à l’assassin de son petit-fils : « Il a tiré sur lui pour le tuer, je ne le pardonnerai jamais. L’âme d’Abdoul Karim restera dans ses mains, on se retrouvera devant Dieu».

Abdoul Karim Bah, orphelin de père, est originaire de la préfecture de Pita.

Yacine Diallo