Une forte délégation des chefs religieux conduite par le secrétaire général aux Affaires religieuses s’est rendue ce lundi au siège de l’UFDG. Objectif : exhorter l’Alliance Nationale pour l’Alternance démocratique (ANAD) à annuler la marche prévue le 9 mars prochain. La délégation religieuse serait repartie bredouille. L’ANAD exigeant la satisfaction des préalables qu’elle posés.

Certains parleront d’affront fait aux chefs religieux. D’autres s’en iront dire que c’est un sacrilège que de renvoyer les imams et autres prélats comme des malpropres. Malheureusement pour ceux-ci, les précédents ne plaident pas en leur faveur.

En 2022 les mêmes chefs religieux avaient sollicité et obtenu des acteurs politiques et sociaux opposés à la junte le report puis l’annulation d’une manifestation. Malgré tout, l’aile dure du gouvernement avait trouvé que l’idée même d’envisager de manifester contre la junte était un crime de lèse-majesté. Les responsables de la société civile avaient été cueillis et conduits à la Maison centrale de Conakry. Preuve, s’il en était besoin, que le gouvernement n’a besoin de l’avis de personne pour calmer le jeu. Après ces arrestations, les chefs religieux sont restés bouche cousue.  

Or la moindre chose pour eux était de dire au gouvernement que comme les acteurs sociaux et politiques ont accepté de reporter la manifestation, le gouvernement doit montrer sa bonne volonté. Forts d’avoir pu faire reporter la manifestation, les chefs religieux devaient exiger du gouvernement l’arrêt des arrestations et la libération de tous les détenus politiques. Et d’accélérer la procédure pour ceux qui font l’objet de poursuites pour délits économiques.

En gardant un silence de cimetière après l’arrestation des activistes de la société civile, les chefs religieux se sont discrédités aux yeux de ceux qui avaient cédé au nom de leur sagesse et leur sainteté. Aujourd’hui il est évident que ceux qui envisagent battre le pavé exigent des actes dont la libération du trio de la société civile au moins. Ou encore l’engagement formel de dialoguer avec ceux-là qui sont en désaccord avec le gouvernement.

Pour le reste, ces acteurs savent que la libération pure et simple de ceux qui sont poursuivis pour délits économiques jetterait un discrédit sur la justice guinéenne. Cette justice a besoin de trouver la forme pour élargir des personnes comme Ibrahima Kassory Fofana et ses compagnons d’infortune. Ce qui n’est pas le cas d’Oumar Sylla alias Foniké Mengué, d’Ibrahima Diallo ou encore de Bella Bah et de tous les autres.

La délégation des chefs religieux, sa composition même pose problème. Le chef de la délégation est un membre du gouvernement, donc pas neutre. Au reste, il figure parmi les personnalités sanctionnées par la CEDEAO. Si c’est Mamadi Doumbouya qui lui a demandé d’entreprendre cette démarche, il devrait lui dire de choisir des personnalités neutres. Même si trouver de telles personnes ressemble à trouver le plus beau parmi les chimpanzés.

Si la démarche de Karamo Diawara est une initiative personnelle, ceux qui l’ont accompagné devaient lui dire de les laisser mener les négociations sans lui. On ne peut être à la fois juge et partie. Pour leur malheur, nos chefs religieux l’apprennent à leurs dépens.

Habib Yembering Diallo