Après le témoignage glaçant de Mamoudou  Conté,  militant de l’UFR, c’était au tour de Thierno Mamadou Diallo, commerçant domicilié à Hamdallaye de revenir sur les tristes événements du 28 septembre 2009. Le témoin, devenu célèbre après les atrocités, est celui-là même qu’on voit sur une photo molesté par deux gendarmes des Services spéciaux de l’anti-drogue et du grand banditisme sur l’esplanade du Stade du 28 septembre.  Thierno Mamadou affirme qu’il n’était pas parmi les manifestants. Il quittait  son lieu de travail à Concasseur pour rentrer à la maison lorsque des civils armés de couteaux l’ont arrêté.

Il aurait été transporté, avec deux autres personnes, devant le Stade. « Devant le portail, nous avons vu les gens sortir en criant. Certains avec qui j’étais dans un pick-up  ont commencé à s’échapper. Je suis descendu à mon tour. En essayant d’aller vers le véhicule de la Croix Rouge, on m’a arrêté de nouveau  pour remettre dans le pick-up. Je pense que c’est là que  j’ai été photographié. Ils ont arrêté de nombreuses personnes, nous ont frappé, avant de nous envoyer à l’Escadron mobile de Hamdallaye. Là-bas, nous avons subi des tortures indescriptibles. Ils avaient pris tout ce que j’avais comme biens. Dieu aidant, mon téléphone était resté avec moi. J’ai appelé mon petit frère, mes parents sont venus le lendemain payer de l’argent pour me sortir de là ».

Thierno Mamadou précise que comme sa photo est devenue virale sur internet,  on l’a conseillé de quitter le pays. C’est ainsi qu’il est allé à Dakar.

Un garde de l’UFDG à la barre

Tallatou Garanké Diallo, né en 1962 à Labé, a également témoigné ce mercredi. Il était garde du corps du parti l’UFDG au moment des faits. Au Stade, il dit avoir vu le colonel Tiégboro Camara  avec trois pick-up, ses gardes du corps (un béret vert et  un béret rouge).  « Il nous a dit : quittez ici,  sinon on va vous massacrer, arrêter vos leaders. Les gens ont répondu : Tiégboro, zéro !  Dadis, zéro ! Il y a eu des échauffourées, des jets de pierre contre gaz lacrymogènes et des tirs à balles réelles. Quelques minutes après, il y a eu deux corps sur l’esplanade du Stade. Après la foule s’est dirigée à l’intérieur du Stade. Il y avait de l’ambiance à l’intérieur. Tout d’un coup, les forces de l’ordre ont lancé du gaz lacrymogène. Après, nous avons entendu des tirs nourris ».

Le témoin de poursuivre : « Directement,  nous qui assumions la sécurité des leaders avons accouru pour former une ceinture de sécurité. En ce moment, les bérets rouges sont arrivés au niveau de la tribune. J’ai reconnu Toumba Diakité qui a demandé où sont les leaders. Puis, il leur a demandé de le suivre. Pendant ce temps, d’autres bérets rouges étaient en train de bastonner les leaders notamment Bah Oury,  François Fall et Sidya Touré. Comme ils étaient nombreux, chacun de nous a commencé à se chercher. C’était la débandade. Des civils qui étaient habillés en maillot de Chelsea m’ont frappé. Un d’entre eux m’a arraché une somme de 700 000 FG. J’ai réussi à sortir du stade avec des blessures. Je suis allé au domicile du président Cellou Dalein Diallo. A ma sortie, j’ai trouvé une colonne de bérets rouges dans la cour. Ils m’ont tellement bastonné que j’ai fait le mort.  Pendant qu’ils transportaient les motos, une  est tombée sur moi, ma jambe s’est cassée et a été brûlée par l’échappement.  Ils nous ont dit que si on partait à l’hôpital, ils allaient nous tuer. Je suis resté à la maison pendant deux mois, sans soutien ni soin. J’ai vendu ma machine à coudre pour me soigner ». Fin de l’audition de Tallatou Garanké Diallo. L’audience a été renvoyée au 8 mai.

Ibn Adama