C’est une semaine de fête qui débute dans les pays musulmans, avec l’Aïd-el-Kébir. En Afrique de l’Ouest, la fête est plus connue sous le nom de « tabaski ». Suivant les pays, elle sera célébrée à différents jours de la semaine… La « tabaski » c’est un moment de piété, mais aussi un moment de retrouvailles, autour d’un plat de mouton. Et, comme chaque année, l’achat de l’animal fétiche est un casse-tête pour de nombreuses familles.

En ce jour pluvieux, les clients sont peu nombreux au marché d’Adjamé, l’un des points de vente de moutons installés dans la capitale économique ivoirienne, Abidjan. Voici tout de même un acheteur soulagé d’avoir trouvé sa bête et heureux des perspectives de retrouvailles avec ses proches : « Je suis venu acheter le mouton de la tabaski, explique Sanga Coulibaly à la correspondante de RFI, Bineta Diagne, parce qu’il y a la famille qui vient à la maison, des voisins, des gens d’un peu partout qui seront là pour célébrer la fête à la maison. » Combien seront-ils autour de la table ? Difficile à dire à l’avance. Chez les Coulibaly, on se prépare à accueillir du monde.

Le mouton, personnage central de la « tabaski »

Roukiatou Keïta en parle avec gourmandise. Cette mère de famille de 49 ans habite Conakry. Si elle se réjouit de la fête à venir pour ses moments de prière, ses grandes retrouvailles, elle se régale aussi à l’avance de pouvoir changer l’ordinaire de son assiette. En Guinée, La viande qui est prisée, c’est le bœuf et la tabaski est l’occasion de se réveiller les papilles. « J’aime bien la viande de mouton, je la préfère même à la viande de bœuf, a-t-elle confié à Matthias Raynal, correspondant de RFI à Conakry. Mais, malheureusement ici, c’est la viande de bœuf qu’on consomme beaucoup. Je vais donc pouvoir me faire plaisir, Yesss ! »

La préparation de ces réjouissances familiales n’éclipse pourtant pas les causes de préoccupation. L’une d’elle revient avec insistance, chaque année : où trouver l’argent qui permettra justement de préparer la fête. Les fonctionnaires par exemple attendent impatiemment leurs salaires pour pouvoir acheter le mouton. Au Niger, l’un d’eux, Sani Mamane, a confié son impatience à Moussa Kaka, correspondant de RFI à Niamey : « Les prix des moutons ont augmenté et l’État n’a pas encore versé les salaires. Vraiment, ça ne va pas du tout ! Parce que la fête tombe avec la fin du mois et donc si les salaires tardent, tout le monde n’aura pas les moyens de bien fêter. »

Au Sénégal, vendeurs et clients frileux

Au Sénégal, la « tabaski » est un peu particulière cette année en raison du contexte politique. Les autorités rassurent sur un bon approvisionnement du marché en moutons, mais les points de vente sont moins nombreux que d’habitude dans la capitale, Dakar. À cause des manifestations violentes du début du mois, certains éleveurs et vendeurs n’ont pas fait le déplacement

Ceux qui sont là ont constaté ces derniers jours une certaine timidité des clients. Au bord de la route, sur la grande avenue Cheikh-Anta-Diop de Dakar, la correspondante de RFI, Charlotte Idrac a rencontré Abdoul Aziz Sy, qui proposait à la vente une quinzaine de moutons. Les clients, lui a-t-il confié, sont encore rares. « On a sorti les moutons, mais on ne réussit pas encore à les vendre. C’est vrai que les moutons sont un peu chers. Et, peut-être que les clients ont peur, parce qu’on ne sait pas ce qui va se passer. Pour le moment même, il n’y a pas de vente, franchement. Les clients, là, ce n’est pas bon… »

Au-delà du contexte sénégalais, l’approche de la fête voit dans de nombreux pays, comme à l’habitude, les prix grimper dans les pays de la région. En Mauritanie, un membre du forum scientifique des consommateurs a salué auprès de la correspondante de RFI, Léa Breuil, une hausse des prix moins importante que d’habitude. Il estime cependant que, cette année encore, de nombreuses familles risquent de s’endetter pour supporter le coût de la fête.

RFI