Ibrahima Cas-Sorry Fofana, ancien Premier ministre, Mohamed Diané, ancien ministre de la Défense nationale et Oyé-Oyé Guilavogui, ancien ministre de l’Environnement sont en taule depuis avril 2022. Ils sont poursuivis pour détournement de deniers publics, enrichissement illicite, blanchiment de capitaux. Excusez du peu ! A cause «d’inconstitutionnalité» et de mauvaises interprétations d’arrêts, leurs dossiers balancent entre la Cour de répression des infractions économiques et financières (Crief) et la Basse-cour suprême.
«La Crief ne détient pas systématiquement les accusés. Nous avons près de 240 prévenus, dont moins de 15 d’entre eux en prison. Les magistrats ne reçoivent aucune instruction ou pression hiérarchique. Le ministre de la Justice est très réticent à nous rendre visite à la Crief », jure, la main sur le palpitant, Aly Touré, le pro-crieur spécial de la Crief, ce 16 août sur Fim Fm. Il explique que la lenteur procédurale liée aux enquêtes financières est normale. «Même le législateur est conscient de cela. En termes de détournement de deniers publics, le Code pénal indique que la détention provisoire peut aller au-delà de douze mois, eu égard à la complicité des enquêtes financières.»
Dans les procédures impliquant Cas-Sorry et Cie, Aly Touré a interjeté maintes fois des appels, introduit des pourvois en cassation contre nombreuses mises en liberté arrachées en faveur des anciens dignitaires. Pour lui, les comptables de la lenteur procédurale restent les avocats (sans vinaigrette) des accusés qui «soulèvent à tout bout de champ des exceptions qui ne font que retarder la procédure. Lorsque vous êtes devant une juridiction de jugement et que vous soulevez la question d’inconstitutionnalité, le juge transfère le dossier à la Cour suprême pour statuer. Voilà des motifs du retard de la procédure.»
Ibrahima Cas-Sorry Fofana ne s’est jamais présenté devant la Chambre des jugements de la Crief. Si ses conseils invoquent des raisons de santé, le parquet spécial et la partie civile (Agent judiciaire de l’État) dénoncent «un refus catégorique» à comparaître. A l’audience du 20 juillet dernier étaient prévues réquisitions et plaidoiries. La défense a soulevé des questions d’inconstitutionnalité. Du coup, le dossier a été filé à la Cour suprême afin de statuer sur la compétence de la Crief à juger ou non l’ancien Premier ministre.
Le cas Mohamed Diané, confus
En juillet dernier, la Cour suprême a jugé «sans objet» le pourvoi en cassation du parquet spécial de la Crief au sujet de l’ordonnance de mise en liberté de Mohamed Diané. L’arrêt prête à confusion. Aly Touré a réécrit à la Cour suprême, le 15 août, en vue d’une clarification dudit arrêt. «Je ne sais pas si c’est de mauvaise foi qu’ils (avocats de la défense, Ndlr) sont en train d’empoisonner, d’intoxiquer la population par rapport à la portée de l’arrêt. Ils sont en train de manipuler l’opinion. Je voudrais que la Cour suprême soit plus explicite, afin qu’ils arrêtent d’intoxiquer la population », clame Aly Touré.
Almamy Samory Traoré, avocat (sans vinaigrette) de Mohamed Diané déclare être déçu de la Cour suprême, que son client est en détention arbitraire. «Après avoir déclaré le recours sans objet, le terme ‘’rejet’’ est apparu dans les expressions du juge. Mais en tout état de cause, quel est le sort réservé au pourvoi du parquet ? Est-ce que le juge de cassation a considéré que le pourvoi est fondé, auquel cas, on serait plié ? On considère que c’est politique. Nous sommes convaincus qu’ils ne vont jamais les libérer. C’est dommage pour la justice.»
En instance de jugement, Oyé-Oyé Guilavogui, ancien ministre de l’Environnement, est pour l’heure sans avocat. Le tribunal attend du Bâtonnat un avocat commis d’office, pour assister l’ancien ministre. Ça va barder !
Yaya Doumbouya