Jamais un putsch militaire aura refreiné autant d’ardeurs, provoqué autant de remous, enseigné autant de leçons que celui du Niger, perpétré le 26 juillet dernier. Il a carrément semé panique et désarroi dans les palais présidentiels des néo¬-colonies africaines. Armée de l’UMOA, de l’UA et des tous les moyens d’étouffement économique, la CEDEAO s’est réunie de toute urgence pour réduire de 50%, le délai hâtivement accordé à Niamey pour s’agenouiller devant Bazoum et lui rendre le pouvoir. Avec force excuses.
Apparemment, aucun membre de l’institution ouest-africaine n’a eu le temps, encore moins la sagesse de penser avant de parler. Après le renversement des régimes, si viles, d’IBK, d’Alpha Grimpeur et de Christian Kaboré, qui sévissaient respectivement à Bamako, à Conakry et à Ouagadougou, la CEDEAO aurait dû marquer un temps d’arrêt avant de menacer le Niger. Que nenni ! «La folie, disait Einstein Albert, c’est de toujours faire la même chose et de s’attendre à des résultats différents.»
Avant de menacer le géant aux pieds d’argile de Niamey, la CEDEAO devrait ranger ses canons et user de ses neurones, faire le point, réaliser que si deux ou trois coups d’État successifs dans une même entité géopolitique peuvent relever d’une coincidence, le quatrième relève forcément de la loi de la nature. Ou de la jungle. Mais d’une une loi quand même. Pourquoi perdre le sang-froid au poing d’agiter le spectre d’une invasion aux conséquences illimitées ? Pourquoi ne pas procéder à une introspection des pseudo-républiques qui agonisent sur le continent pour essayer d’établir un diagnostic correct des maux qui conduisent aux coups d’État au lieu de chercher à tomber à bras raccourcis sur le nouveau malade de Niamey? Avec les moyens du bord, en plus.
L’Union africaine aurait compris que la Tunisie ne se porte pas mieux que le Niger, même si le coup de force au sommet de l’État s’exprime en espèces sonnantes et trébuchantes. Vous savez que l’Union européenne vient de signer avec la Tunisie, «le Partenariat stratégique global pour l’inciter à accueillir les réfugiés renvoyés par l’Europe en échange de la somme de 250 millions d’euros et d’un soutien financier de 900 millions d’euros, conditionné à la conclusion d’un accord de prêt avec le FMI.» Désormais, tout Nègre qui s’y aventure est un cadavre potentiel.
Des missions similaires d’observation dans les capitales ouest- africaines les plus bruyantes auraient étalé au grand jour les vraies raisons de la panique semée par le coup de force de Niamey. A Abidjan et à Dakar notamment, «l’effet domino» n’est plus une vue de l’esprit, mais un danger réel, résultant «du choix absolument démocratique du président entrant par le président sortant.» Les règles d’alternance de la démocratie africaine et la Cour Constitutionnelle de nos États en assureront l’harmonie. ADO a déjà accompli la moitié du travail à travers son coup d’État civil; Maquis est encore dans sa Sall besogne de domestication de son opposition. L’issue du putsch au Niger, elle, relève des grandes puissances. L’Afrique n’y est pas encore. C’est certain.
Par Diallo Souleymane