Le 24 août, le Barreau de Guinée a vu rouge. Il s’inscrit en faux contre les cas de corruption et favoritisme dans les concours d’aptitude à la profession d’avocat (CAPA).

Le Conseil de l’ordre des avocats de Guinée est sur la sellette depuis quelques semaines. Un scandale né du concours d’aptitude à la profession d’avocat refait surface. Tout est parti de la publication d’une série d’articles de presse dans un site d’informations accusant le Barreau de s’être rendu coupable de corruption et de favoritisme notamment pendant le CAPA 2021. Des candidats ayant échoué à franchir ce cap, gardent toujours cette pilule en travers de la gorge.

Ils accusent les membres actuels du Barreau et leurs prédécesseurs d’avoir utilisé des subterfuges pour les éliminer au profit des leurs. Depuis, ils tapent à toutes portes pour tenter de prêter serment sans passer à nouveau par la case concours. C’est dans ce cadre, pour y voir clair et déterminer le degré d’implication des anciens bâtonniers  que la Primature a enjoint au mystère de la Fustige de prendre les dispositions pour régler définitivement la situation.

Le Barreau a alors cru bon de remettre les points sur les ‘’i’’. Selon les informations, à ce CAPA 2021, 296 candidats étaient en compétition, seulement 8 ont été déclarés admis. Cela n’a pas été du goût des autres. 70 de ceux qui ont échoué ont contesté publiquement les résul-tares, formulé plusieurs plaintes contre le bâtonnier,  d’alors, Djibril Kouyaté et bureau. Les principaux griefs : avoir fait payer les candidats, ‘’substitution’’ de membres du jury.

Des allégations mensongères, selon Maitre Mamadou Souaré Diop : « Face à l’intoxication, il est impérieux pour le Barreau de restaurer la vérité sur l’organisation du CAPA en Guinée…Le Barreau organise certes ce concours, mais l’examen proprement dit est géré par un jury indépendant, légalement constitué. Il y a une différence entre l’organisation matérielle du CAPA et les compétences du jury. La correction et la publication des résultats relèvent exclusivement du jury. L’ordre des avocats n’est responsable d’une quelconque revendication contre les résultats, il y a un jury légalement constitué. Mais les gens se mettent à raconter des histoires sans fondement pour masquer leur échec ».

Pour l’organisation d’un CAPA, les membres du jury doivent provenir de l’Ordre des avocats, des magistrats et de la Faculté des Sciences juridiques. Pour celui de 2021, toutes ces entités ont désigné leurs représentants. Sauf que l’université de Sonfonia aurait désigné deux fois ses représentants : Michel Tolno et Alsény Camara. Ce dernier avait d’ailleurs l’habitude de faire partir du jury. Le Barreau ne voyait pas d’un mauvais œil qu’on le change. Les contestataires perçoivent cela comme une substitution : « Nous avons estimé qu’il (Alsény Camara, ndlr), pouvait subir des pressions et qu’il fallait laisser l’autre siéger. Mais le recteur en personne m’a appelé pour me dire de laisser Alsény Camara siéger pour éviter des tensions à la faculté», explique Me Djibril Kouyaté, ancien bâtonnier.

Selon la loi 014 portant réorganisation de la profession d’avocat, l’organisation de ce concours revient à l’Etat. Mais en 2008, l’Etat n’a jamais sorti un centime à la faveur de ce concours. Le Barreau, pour l’organiser, a institué ce qu’il appelle le droit d’inscription. Chaque candidat devait donc payer 500 000 francs glissants pour participer : « C’était pour nous permettre de faire aux nombreuses dépenses. La même chose se fait en Côte-d’Ivoire…Mais comme les gens sont de mauvaise foi, ils laissent toutes les autres conditions de participation au concours pour ne parler que l’argent, alors qu’il y en d’autres. L’argent est versé dans le compte du Barreau, mais ils parlent d’escroquerie», se défend Me Mohamed Traoré, ancien bâtonnier.

L’autre argument des contestataires, c’est le fait que le secrétariat du Barreau ait omis le nom de l’un des membres du jury sur la décision portant composition des membres du jury, l’erreur a été rectifiée, il a finalement siégé : « Les candidats ont vu cette irrégularité, mais ils ont passé l’examen. Mais ils n’ont dénoncé que quand ils ont échoué. Quel paradoxe ! », ajoute-t-il. Me Faya Gabriel Kamano a démonté la rumeur selon quoi il n y a que les proches des membres du Conseil de l’ordre qui sont déclarés admis : « Pendant le CAPA 2021, aucun cabinet d’un membre du bureau n’a eu d’admis. Moi qui parle, mes deux jeunes frères ont échoué».

Les contestataires ne comptent pas lâcher prise. Ils ont écrit au mystère de la Fustige et à la Primature. L’inspection générale des services judiciaires aurait demandé au Barreau de les faire prêter serment sans aucun autre concours. Une utopie, selon Maître Mohamed Traoré : « Au lieu de demander l’annulation du concours, on demande simplement de les intégrer sans écouter le son de cloche du Barreau. Ce n’est pas le travail de l’Inspection ça». L’actuel Bâtonnier de rappeler que les avocats (sans vinaigrette) ne relèvent pas du mystère de la Fustige et qu’ils exercent une profession libérale.

Yacine Diallo