Dans le cadre de la protection des Droits des femmes et des enfants, l’Ambassade de la République Fédérale d’Allemagne en Guinée, a organisé jeudi 27 juillet à la Maison des jeunes de Coyah, une journée de sensibilisation communautaire. Objectif visé est l’abandon des Mutilations génitales féminines (MGF) en Guinée.
La rencontre s’est tenue en présence des autorités locales et a mobilisé l’ensemble des acteurs impliqués dans la lutte contre ce phénomène néfaste à la santé de la jeune fille.
Des agents des forces de défense et de sécurité (Gendarmerie et Police), la justice, le ministère de la promotion féminine et de l’enfance, le ministère de la Santé, le Club des jeunes filles leaders de Guinée, le tribunal pour Enfant, des matrones (ex-exciseuses), des associations de jeunes et de femmes, des anciennes ministres et des médias.
Les interventions étaient essentiellement en langue nationale soussou pour davantage toucher les communautés vivant dans la région de la Basse Guinée.
Un panel de haut niveau regroupant des représentants des structures citées ci-dessus a permis un échange autour des dangers que représente cette pratique mais aussi les dispositions juridiques et sécuritaires envisagées pour renforcer la lutte contre les MGF notamment pendant ces grandes vacances. Ce panel animé en langue soussou a été suivi de questions-réponses et d’interventions de personnes ressources dont quatre (4) anciennes ministres de la République.
Dans son intervention, le secrétaire général chargé des Affaires administratives de Coyah, représentant le préfet, a fait savoir que la République de Guinée adhère particulièrement à toutes les conventions, traités et ratifications allant dans le sens de la promotion des droits, de protection de la santé des enfants à travers la lutte contre ce fléau social mettant en cause l’avenir de cette nouvelle génération montante. «Pour lutter contre cette pratique néfaste dénommée mutilations génitales féminines, l’Administration Préfectorale, citoyennes et citoyens de Coyah ainsi que tous les acteurs concernés accompliront, avec véhémence, leur devoir sacré en ce qui concerne le respect de lois adoptées à cet effet. Au regard de tout ce qui précède, ce panel axé sur les activités permettant aux acteurs de partager leurs expériences en vue d’éradiquer cette pratique susceptible de porter atteinte au respect des droits réservés à nos enfants pendant ces vacances surtout », soutient-il.
Pour sa part, l’Ambassadeur de la République Fédérale d’Allemagne en Guinée, SEM Ulrich Meier Tesch, s’est adressé aux participants en ces termes : « C´est avec joie, que j´ai l´honneur de vous accueillir aujourd´hui pour participer à cette rencontre dont l´objectif est la sensibilisation des communautés afin de les encourager de réfléchir sur les pratiques liées aux Mutilations Génitales Féminines. Malheureusement en Guinée, les Mutilations Génitales Féminines sont encore aujourd’hui perçues comme un rite d’initiation et il est fréquent que des groupes de filles de plusieurs familles soient excisées ensemble.
Certes beaucoup d’efforts sont déjà fournis par le Gouvernement, les organisations internationales et la société civile quant à l’éradication de cette pratique néfaste pour les filles.
Depuis 40 ans, l’excision est interdite, même avec des sanctions pénales. Mais malgré tous ces efforts, encore cette année beaucoup de jeunes filles sont menacées de devenir victimes de cette violation de leur corps, de leur féminité.
Je me demande pourquoi ? Pourquoi tous ces efforts n’ont pas encore abouti, au contraire de beaucoup d’autres pays ? Pourquoi même les voix des plus grandes autorités religieuses sont ignorées ? Pourquoi les Guinéens qui sont quand-même un peuple qui respecte les lois ne respectent pas l’interdiction ? Comment faire afin que, dans 10 ans, la Guinée ne fera plus partie des derniers pays où cette pratique est répandue ?
L´Ambassade de la République Fédérale d’Allemagne en Guinée profitant de ces vacances scolaires a initié l’organisation de cette journée d’échanges et de sensibilisation en langue nationale Soussou dans la belle ville de Coyah. Pour cette occasion, nous avons spécialement voulu sortir de Conakry aussi virtuellement. »
Dans un récit émouvant, la présidente du Club des jeunes filles leaders (CJFL) de Coyah, Marie Jacques Touré, a rappelé : « A l’âge de six (6) ans, lorsque j’étais partie en vacances dans mon village, au retour, ils (mes grands-parents) m’ont excisée. Ce n’était pas dans mon programme, puisque j’avais en tête, pour moi, c’était juste pour les vacances, pas pour me faire exciser. Après cela, j’ai reçu beaucoup de complications, à savoir les infections sexuellement transmissibles, à part le VIH, mais les pertes blanches qui m’ont tellement fatiguée parce que, nous avons été une trentaine de filles excisées avec le même couteau. Ensuite, j’ai eu des problèmes de règles parce que, j’ai vu mes premières règles à l’âge de dix-huit (18) ans. Ça m’a tellement fatiguée et mes parents aussi étaient inquiets de ce qui s’est passé. Il a fallu l’intervention des médecins pour me sauver. Mais combien de filles victimes des MGF n’ont pas accès à des soins adéquats pour faire face à leur mal ?», s’interroge la jeune fille, tout en larmes.
Pour clore, mademoiselle Marie Jacques, a dit que pour lutter contre ce fléau, que ce soit au niveau des parents, des acteurs de la société civile et le Club des Jeunes Filles Leaders (CJFL), c’est de stopper l’excision, pas seulement de la limiter, mais de la stopper complètement : « Parce que quand on leur dit de limiter, ils ne vont pas le faire. Toutes les personnes qui font cette pratique, nous allons les sanctionner et les montrer la rigueur de la loi », avertit la présidente du CJF de Coyah.
La rencontre a pris fin sur une note d’espoir de voir dans un proche avenir, les communautés guinéennes complètement débarrassées de toutes les pratiques dangereuses à la santé des jeunes filles.