A quelques heures de la célébration du deuxième anniversaire de l’avènement au pouvoir du CN Air-dé-brouille, il serait utile de revoir la copie du laïus du Colonel Mamadi Girafe que les Guinéens, dos au mur, ont applaudi, le 5 septembre 2021. Un laïus lu sur la lucarne de la télébidon nationale, pour convaincre les incrédules qui ne pouvaient même pas rêver de la chute d’un certain Alpha Grimpeur de son 3è mandat acquis au prix du sang des Guinéens. Morceau choisi : «L’instrumentalisation des institutions républicaines, de la justice, le piétinement des droits des citoyens, l’irrespect des principes démocratiques, la politisation à outrance de l’Administration publique, la gabegie financière, la pauvreté et la corruption endémique ont amené l’armée guinéenne, à travers le Comité national du rassemblement et du développement, à prendre ses responsabilités vis-à-vis du peuple souverain de Guinée, dans sa totalité. Nous avons décidé à partir de l’instant, de dissoudre la Constitution, car nous allons réécrire une Constitution ensemble cette fois ci. Nous allons nous rassembler : toute la Guinée, les quatre régions, la diaspora, tous ensemble, nous allons mener une consultation inclusive pour décider de l’avenir de ce pays. Nous n’allons plus confier la politique à un homme, nous allons la confier au peuple. Nous veillerons uniquement sur ça, ce qui est le devoir d’un soldat : sauver le pays. C’est la seule chose qui nous anime. Nous allons mettre en place un système qui n’existe pas. Ce système, il faut qu’on le fasse tous ensemble (…) Parce que si vous voyez l’état de nos routes, de nos hôpitaux, vous vous rendez compte qu’après soixante-deux ans d’indépendance, il est temps pour nous de nous réveiller. Il faut qu’on se réveille et qu’on se donne la main et qu’on apprenne à s’aimer comme on avait l’habitude (…) J’espère que cette fois-ci nous allons arrêter de nous battre pour rien, car la Guinée est belle : nous n’avons plus besoin de la violer, on a juste besoin de lui faire l’amour. Tout simplement.»
Deux ans après, les Guinéens ont déchanté. Pourtant, ils étaient heureux d’avoir été agréablement surpris du vent de liberté qui a soufflé sur leur bled au petit matin du 5 septembre 2021. Ils étaient rares, ceux qui n’ont pas joué à l’applaudimètre, ce que savent le mieux les Guinéens. Eh, Laye Mamadi qu’as-tu fait de ce laïus ? Les actes posés en si peu de temps sont aux antipodes de la déclaration du 5 septembre 2021.
Pour le renouveau de la Guinée martyrisée par le régime ethnocentré d’Alpha Grimpeur, Mamadi Girafe avait promis l’inclusivité. Aujourd’hui, on lapide à longueur d’ondes sa gestion solitaire de la Transition. Pire, beaucoup de ses compatriotes soutiennent mordicus que les objectifs de la Transition ont été trahis. Eh, kéla ! L’instrumentalisation des institutions républicaines, de la justice, le piétinement des droits des citoyens, l’irrespect des principes démocratiques, la politisation à outrance de l’Administration publique, la gabegie financière, la pauvreté et la corruption ont encore de beaux jours devant eux, disent ces aigris. Ce n’est pas le bras de fer entre magistrats et ministre de la Fustige qui dira le contraire.
Pour ces sabotaires de la Transition CN-Air-dé-brouille, Mamadi Girafe, le chef de l’Etat étroit de Guinée, commence à prendre goût du pourboire, euh…du pouvoir. Or, « Si haut qu’on monte, on finit toujours par des cendres », dit Henri Rochefort. La junte CN-Air-dé-brouille devrait donc rectifier le tir. Aussi long que sera son règne, la junte reste une junte, elle gère une transition qui finira par des sélections, eh pardon, par des élections. Mamadi Girafe qui « voudrait prolonger son bail à Sékhoutoureya», devrait se rappeler qu’il nous avait fait rêver. « Il y a eu beaucoup de morts pour rien. Beaucoup de blessés, beaucoup de larmes, alors qu’on aime tous la Guinée. Il est temps pour nous de se comprendre, de se donner la main, de s’asseoir, d’écrire une constitution adaptée à nos réalités, capable de régler nos problèmes ». Sauf que deux ans après, l’armée a confisqué toutes les « libertés». Combien de Guinéens sont-ils traqués pour leur combat pour un retour à l’ordre constitutionnel à l’issue d’élections ivres et transcarentes ? Combien sont-ils en exil ? Le FNDC qui n’a poing fait ami-ami avec Alpha Grimpeur à cause de son 3è mandat, controversé, contesté, a été « dissout » par le CN-Air-dé-brouille depuis le 28 juillet 2022. Ce qui met en péril la paix et le vivre-ensemble.
Comment comprendre que les opposants alliés du CNRD s’insurgent contre la gestion solitaire de la transition ? Le CN Air-dé-brouille a du talent, hein. Au nom de « la refondation de l’Etat », concept galvaudé, la Communauté internationale est bernée par des « ateliers de renforcement de capacités » des agents de l’Etat. D’aucuns s’en moquent. Pour eux, ces agents sont plutôt instrumentalisés, pour être à la solde de la soldatesque qui gouverne, qui tient au pourboire.
Pour que perdure la Transition, le PM, Nanard Goumou qui a succédé à Mohamed Béant il y a plus d’un an, n’est pas sur la même langueur d’ondes que son ministron de l’Administration du trottoir, Mory Con(.)dé au sujet du recouvrement du budget pour le retour à l’ordre constitutionnel. L’homme long du Palais Mohammed VI le voudrait-il ? On ne saurait le dire, mais il n’a pas mis le holà entre les deux manitous, du moins officiellement. Peut-être que Mamadi Girafe ne veut point démentir l’adage : « Qui ne dit mot consent. » Kaa ? Ou bien, il est en train de réfléchir à la proposition des rêveurs qui l’accusent de « vouloir céder, faim 2024, le pourboire à un septuagénaire (proche des 80 ans), pour un mandat, et qu’en fin 2029, celui-ci lui refile le fauteuil du Palais Sékhoutoureya, à l’issue d’élections magouillées ». Ah, ces rues-meurent de Cona-crimes ! N’en croyez pas un mot.
Ce que voient les Guinéens, c’est que Mamadi Girafe aime enfiler les grands boubous, les costumes. Va-t-il jouer le jeu de la démocratie, se défaire des démons qui veulent le dévoyer du 5 septembre 2021 ? Va-t-il, au prix du sang et des larmes, se cramponner au Palais Mohamed Chiche ? Qui vieillira saura.
En attendant, notre colonel, le Prési du CN-Air dé-brouille qui détient les rênes du bled contribue à semer le doute, à entretenir les supputations, sur sa sortie du Palais au délai convenu avec la Cédéao. Un récent exemple suffirait. Son décret du 9 août dernier, à travers lequel il a décidé que les chefs des exécutifs locaux (quartiers et districts) soient nommés au lieu d’être élus. Le décret est appuyé par un arrêté du ministre de l’Administration du trottoir qui dit que dorénavant les Gouv se chargeront de nommer les conseils de quartier et de district sur toute l’étendue du trottoir. Les farouches opposants à la junte n’y ont vu qu’une chose : « la volonté de caporalisation du pouvoir à la base » par le CNRD. Vif la refondation de l’Etat !
Mamadi Girafe, en deux ans de gestion du pouvoir, devrait savoir que des Guinéens ont bel et bien pigé son coup double. « Tuer le roi, pour sauver le royaume. » Dégager Alpha Grimpeur et ses sinistres promoteurs de 3è mandat, pour barrer la route à ses opposants si proches du fauteuil douillet de Sékhoutoureya.
En deux ans, les Guinéens ont perdu l’espoir d’un retour rapide à l’ordre constitutionnel. Pour beaucoup, il faut tout revoir, tout recommencer. Or, entre le pouvoir des armes et celui des urnes, il faut choisir. Net !
Mamadou Siré Diallo