Nous voici de nouveau retrouvé dans une opportunité gâchée, une transition qui portait la promesse de libérer notre nation des chaînes de mensonges qui nous ont enchaînés à la liste ignominieuse des pays les plus appauvris du monde depuis des décennies. C’est tout simplement attristant de réaliser à quel point nous sommes faciles à tromper et à gouverner. Ne devrions-nous pas interroger jusqu’à quand tolérerons-nous que le destin de nos enfants soit minimisé et abandonné aux désirs d’un leadership, en déroute, en perte de repères ? Si c’est ainsi que nous exprimons notre attachement envers la Guinée (faire l’amour à la Guinée), prions pour ne jamais être témoins de la brutalité qui pourrait en découler (la faire violence).

L’état actuel de notre pays met en lumière plusieurs facteurs explicites qui soulignent la tromperie envahissante à laquelle nous avons été témoins. Bien qu’une transition trouve souvent sa genèse dans les actions de quelques-uns, mais une métamorphose véritablement sincère et authentique est dirigée par les forces vives d’une nation, englobant la diversité des opinions qui façonnent son identité. Dans notre cas, on nous avait promis la lune et ses étoiles, mais il est ironique de constater comment cet espoir autrefois immense s’est révélé être un cauchemar déchirant.

Le faux pas initial réside dans la prétendue « consultation nationale », une façade organisée ici et là, dont les conclusions étaient censées aider à élaborer la Charte de la Transition. Mais l’intention était d’entretenir subtilement les masses dans ce genre d’activité pendant au moins quelques semaines. La charte a été officiellement concoctée et publiée la nuit de la conclusion de la consultation nationale, et le lendemain, l’accession au trône du chef de l’État a suivi. Cela signifie qu’un groupe de peut-être cinquante individus a copié-collé les règles du jeu et les a imposé à une population forte de quatorze millions de personnes pour qu’elle les accepte et s’y conforme, car ils savaient que la population guinéenne est la plus docile au monde, capable d’accepter l’inimaginable et confiant son destin à la providence divine.

Un deuxième impair émerge dans la composition du Conseil National de la Transition (CNT). La véritable trajectoire d’une transition réussie repose sur des principes démocratiques, garantissant que les dirigeants sont élevés par la volonté collective. Pourtant, le régime naissant a contourné ces préceptes avec désinvolture, imposant leur propre choix pour diriger le CNT. Nous conduisant ainsi en la transformation de notre Etat en un parfait royaume. Cela équivaut à une symphonie dirigée par un maestro inexpérimenté, ignorant la résonance harmonieuse qui devrait définir ses accords.

Cependant, la symphonie des faux pas persiste. Entrez dans l’appareil gouvernemental étendu, un ensemble de vingt-sept ministres. Alors qu’une transition profonde –celle qui vise à remodeler les normes sociales et les fondements moraux –devrait réduire ce monstre administratif à une modeste douzaine. Cette réduction stratégique permettrait aux exécutifs dynamiques de se concentrer sur des agendas variés et spécialisés, renforçant la puissance de la transition. De plus, cette prudence financière allégerait le fardeau financier de notre nation, redirigeant les ressources vers la consolidation de nos aspirations fondamentales.

Au milieu de cette mosaïque complexe de faux pas, deux figures inquiétantes émergent – gardiens de la trahison. Le ministre de l’Administration du Territoire et de la Décentralisation et le chef du CNT, portent en eux les cicatrices d’une histoire imprégnée de duplicité, forgée sous le patronage de l’ancien régime. Leur maîtrise des manœuvres clandestines est redoutable, et si elle n’est pas contenue, ils ont le potentiel d’entrelacer l’avenir de la nation dans les ténèbres pendant des décennies. Ces architectes de la subversion, formés à l’art de saper le progrès, détiennent le pouvoir d’entraver le potentiel de notre nation pour les années à venir.

Dans ce récit, un autre fil se déroule-le refus du CNRD et de son gouvernement de nous étayer de sa composition et surtout, dévoiler leurs avoirs financiers, jetant des ombres sur leurs intentions. La création de la CRIEF, associée à l’idée de reconstruire la nation sur le socle de la justice, ou bien, que la justice est la boussole du pays, ajoute une autre couche d’opacité à ce récit en évolution.

Puis, les échos de l’histoire résonnent – la fragmentation de notre classe politique, une division qui ne sert qu’à renforcer la prise du CNRD sur le pouvoir. Nous voilà au terme des deux ans sous ce régime énigmatique, les détails de son ascension, qu’ils soient nés de manœuvres calculées ou de négociations stratégiques, s’estompent en importance. C’est un fait indéniable que le CRND a pris les rênes du pouvoir, peu importe si cela a été accompli par bravade audacieuse ou par une entente entre eux et l’ancien président. Sinon, comment un acteur politique qui, jadis, a orchestré une rébellion contre un régime militaire et a manœuvré avec brio dans le jeu d’échecs politique de 2010 pourrait-il soudain perdre le pouvoir qu’il tenait si précieusement, en l’espace de quelques heures, et se retirer paisiblement dans le pays de son choix, sans qu’aucun soupçon ne se lève ?

Cependant, c’est à regret que nous devons admettre que l’essentiel à présent réside dans la réussite de la transition et la préservation de notre nation. Notre concentration immédiate doit être dirigée vers la réussite de cette transition, pour raviver l’âme de notre pays.

L’espoir, bien qu’ébranlé, demeure notre lumière directrice. Amplifions nos voix, forgeons un appel clair et collectif au changement. Avec l’unité comme boussole, préférable ainsi qu’à la « justice », naviguons ensemble dans cette mer agitée, main dans la main, esquissant une feuille de route insensible aux raccourcis ou aux manœuvres trompeuses. Ce n’est qu’à travers une réelle recalibration de notre boussole sociétale que nous pourrons enflammer une nouvelle ère – une aube où la tromperie est vaincue et notre volonté collective nous propulse vers un avenir plus lumineux et plus équitable.

Mamadou Bobo Diallo