Le jeudi 30 novembre, un conflit domanial a éclaté entre familles à Démoudoula, faisant un mort et un blessé par balle. Une vieille histoire qui se nourrit de déni de justice, de l’absence de l’État et de la complicité d’agents de sécu à la solde du plus offrant.  

Accompagnée d’agents de l’Escadron mobile n°18 de Cosa, l’une des familles a débarqué dans le quartier. Alpha Oumar Diallo, ingénieur géomètre à la retraite et sa famille ont été expulsés de leur concession, pour la énième fois. Les affrontements ont occasionné la mort d’un jeune élève de 18 ans et un blessé par balle. Des contestataires jurent que la parcelle querellée appartenait à leurs grands-parents avant le lotissement de la zone dans les années 1990. 

Pour la première fois, ils avaient complètement rasé la maison d’Alpha Oumar Diallo. C’était en avril 2022. Or, ce dernier se dit nanti de tous les actes de propriété, dont titre foncier et plan de masse. L’affaire, portée devant le Tribunal de première instance de Dixinn, a été tranchée en sa faveur. Insatisfaits de la décision judiciaire, ses adversaires sont revenus à la charge. Le 30 novembre, ils ont tenté de se faire justice.

Alors en fonction à l’habitat de Dubréka, c’est Alpha Oumar Diallo qui a loti la zone en 1991, pour un total de 2800 parcelles. Le ministre de l’Habitat de l’époque, Bana Sidibé, l’a rétribué par la parcelle 24 du lot 33 dans les parts qui devaient revenir à l’État. « Après le lotissement, sur chaque dix parcelles, l’État garde quatre et restitue six aux coutumiers. Je vis ici depuis 1991. Je détiens l’arrêté ministériel et le plan de masse depuis 32 ans. Les coutumiers avec lesquels on a fait le lotissement ne se sont jamais opposés à ce que j’hérite de ce domaine. C’est plus de 30 ans après, que des soi-disant leurs petits-enfants s’opposent ».

Récidive

L’année dernière, les contestataires ont porté plainte contre Alpha Oumar au Tribunal de première instance de Dixinn. Sans attendre, ils démolissent sa maison. « Au TPI, j’ai présenté mes documents. Après authentification, j’ai gagné le procès, reconstruit la maison. Quelques mois après, ils se sont débrouillés pour obtenir une ordonnance de casse auprès de la Cour d’appel de Conakry ».

Le jeudi 30 novembre, poursuit-il, « ils sont venus avec huit pickups de l’Escadron mobile n°18 et deux minibus remplis de loubards. Ils ont arraché les tôles, pillé tous nos biens à l’exception des murs. Tout ce qu’on avait de précieux (argent, objets, bijoux), tout a été emporté. Ils ont arraché les portes et cassé toutes les vitres qui m’ont coûté au moins 17 millions de francs guinéens ». La victime a saisi la justice une nouvelle fois. « Le juge Mamoudou Kaba du TPI de Dixinn a rendu son verdict ce vendredi 8 décembre. Et nous avons encore gagné », s’est-il réjoui.

Lors de la dernière casse, la victime dit avoir perdu au moins 70 millions de francs glissants, 300 000 francs CFA et 700 dollars ricains. Un constat d’huissier de justice en ferait foi. Une plainte est déposée en justice contre les pillards. Alpha Oumar regrette qu’il y ait perte en vie humaine et se dit reconnaissant envers les jeunes de Démoudoula qui l’ont secouru. Marié et père de dix gosses, il est contraint de retaper encore sa bicoque pour abriter sa famille. En attendant d’obtenir enfin réparation.

Abdoulaye Pellel Bah