Chaque jour arrive désormais avec son lot de malheurs en Guinée. En premier lieu, l’évasion spectaculaire le 4 novembre dernier à la maison centrale de Conakry. Cet événement, dont les conséquences se font encore sentir, sera suivi par la privation des citoyens de leurs stations de radios et de chaînes de télévision privées et prisées depuis le 24 novembre pour certaines. Puis, la coupure d’internet.
A tous ces problèmes, dont certains sont volontairement entretenus, s’ajoutent d’autres comme l’explosion du dépôt de carburants le 18 décembre dernier. Ce n’est malheureusement pas tout. C’est dans ce contexte d’incertitude qu’Orange Money, devenue la banque populaire mobile, prive les citoyens de leur petite épargne. Plongeant les usagers dans le doute et l’angoisse.
Voilà pour le décor. Confronté à l’épreuve de la gestion du pouvoir, le nouveau maître de Conakry ne sait visiblement plus où donner la tête. Les faits parlent eux-mêmes. Alors que tous ceux qui « bénéficient d’un décret présidentiel » doivent désormais prêter serment sur le livre saint de leur croyance, alors que l’un des imams de la sainte mosquée de la Kaaba vient de diriger la prière à la grande mosquée de Conakry, voilà que les Guinéens renouent avec un passé à la fois récent et lointain.
Dans la nuit du 21 au 22 décembre, il y a eu des sacrifices fétichistes dans la capitale. Des bœufs auraient été immolés dans certains carrefours et ronds-points de Conakry. Ce qui n’est pas une nouveauté. Cette pratique a été utilisée durant même le règne du cartésien pro-fossoyeur Alpha Condé. A plus forte raison sous le magistère de son prédécesseur. Les Guinéens étaient habitués à ce genre de sacrifices ou encore à la lecture du saint coran pour « l’unité nationale, la paix et la santé du chef de l’Etat ».
Avec l’alternance de prestation de serment sur les livres saints et les sacrifices rituels, on se demande si nous sommes dans une république islamique ou fétichiste. C’est l’un ou l’autre voire les deux. Tous ces faits et méfaits en disent long sur la situation qui prévaut actuellement au Palais. Pour Mamadi Doumbouya, le pouvoir semble être devenu une patate très chaude entre les mains.
Sans doute que son prédécesseur observe la situation avec la plus grande attention. Voire avec dérision. D’autant plus que ses partisans, nombreux sur le terrain, lui révèlent que des « Guinéens commencent déjà à le regretter ». Le pro-fossoyeur ne serait pas content à cause des malheurs qui se succèdent dans son pays. Mais il serait aux anges de savoir que celui qui l’a accusé de tous les péchés d’Israël a toutes les peines du monde à mener le navire à bon port.
Le bourbier dans lequel son tombeur se trouve en cette fin d’année est la preuve, s’il en était besoin, que prendre le pouvoir est une chose, sa gestion en est une autre. Qu’il le reconnaisse ou non, qu’il respecte le chronogramme de la transition ou qu’il s’engage dans un forcing incertain et périlleux, Mamadi Doumbouya doit avoir de l’empathie pour ses prédécesseurs. Particulièrement Moussa Dadis Camara et Alpha Grimpeur. Le premier confessait publiquement qu’il était soumis à des pressions pour s’accrocher au pouvoir. Le second ne le disait pas, mais c’était un secret de polichinelle que pour son entourage c’était lui ou le chaos. D’où sa déclaration selon laquelle « il ne devait pas abandonner le pays entre les mains des bandits ». C’est là qu’il faut trouver l’origine du projet mort-né du troisième mandat. Sékouba Konaté fut l’exception qui confirme la règle. Parce que, contrairement aux deux autres, l’homme, que la communauté internationale a roulé dans la farine avec le mirage d’une force africaine en attente, avait vite compris que la présidence de la République était tout sauf un long fleuve tranquille.
Habib Yembering Diallo