Le procès de l’imam, El Hadj Amadou Barry s’est poursuivi le 14 mars, devant la Cour d’appel de Cona-cris. L’audience a été consacrée aux plaidoiries et aux réquisitions.
Après avoir nié en bloc les accusations de viol sur mineure en première instance contre l’adolescente Djénè Kaba, El Hadj Amadou Barry a décidé de passer aux aveux pendant son procès en appel. L’imam reconnaît avoir entretenu « des relations sexuelles consenties avec mon amante » qui ont engendré une grossesse. Ce changement de version ne convainc pas la partie civile. Me Lazare Gbillimou pense que l’accusé cherche simplement à se sortir des griffes de la justice : « C’est un habitué des faits, il l’a fait avec tant de filles avant de tomber sur Djénè Kaba. Il se confond en excuses, pour obtenir la clémence de la Cour. »
L’avocat demande à la Cour de confirmer la peine infligée à l’accusé en première instance : « La victime, Djénè Kaba, voit aujourd’hui sa vie basculer. Elle est renvoyée de la famille, elle est à Kankan parce que son père ne veut rien savoir d’elle. Confirmez la décision prise en première instance. » Pour les intérêts civils de la plaignante, Me Gbillimou demande à la Cour de les revoir à la hausse : « Il a fait un appel abusif, fantaisiste juste pour amuser la galerie, condamnez-le au paiement de 300 millions de francs guinéens ».
Le ministère public requiert également la confirmation de la peine prononcée par le TPI de Mafanco contre El Hadj Amadou Barry : « L’accusé, en tant qu’imam, devait servir d’exemple, inculquer des valeurs à la société. Mais il a profité de sa position pour braver les interdits, transgresser la loi. Aujourd’hui, il est très difficile pour la victime de se reconstruire. Il aurait pu prendre une peine plus lourde à cause des circonstances aggravantes », explique la substitute générale, Joséphine Loly Tinquiano.
Pour Me Victorien Théa, son client ne s’est en aucun cas rendu coupable de viol. Il soutient que Djénè Kaba a accepté d’être en concubinage avec El Hadj Amadou Barry : « La fille n’était pas aussi mineure qu’on veut le faire croire. Au moment des faits, elle avait 15 ans et 6 mois, elle s’est battue pour être la concubine de mon client. Cela n’a jamais été un viol, il n’y a jamais eu de violence ou de contrainte. La fille n’a jamais dénoncé l’acte, au contraire, elle est revenue passer à l’acte avec lui plusieurs autres fois. » Il demande à la Cour de condamner son client sur la base du Code de l’Enfant : « En première instance, les faits n’ont pas été jugés conformément à la loi. C’est pourquoi nous sommes là. Il a entretenu une relation sexuelle consentie avec une mineure de plus de 15 ans non émancipée par le mariage. Dans ce cas, le Code de l’Enfant prévoit une peine maximale de 2 ans. Condamnez-le au temps mis en prison, parce que c’est un délinquant primaire. »
L’accusé, lui, demande à la Cour de lui permettre de recouvrer sa liberté pour qu’il puisse s’occuper « de l’enfant issu de cette grossesse et des autres membres de ma famille. Je ne referai plus jamais une telle erreur. »
En 2021, alors que la bataille pour le contrôle de la grande mosquée de Yimbaya fait rage, El Hadj Amadou, imam, est accusé de viol sur mineure. Il accuse ses concurrents d’avoir ourdi « ce complot » pour l’écarter de l’imamat. Mais il va finir par être interpellé, écroué. Il est jugé et condamné en première instance à 15 ans d’emprisonnement et au paiement de 100 millions de francs guinéens.
Le 28 mars, la Cour d’Appel rendra sa décision dans l’affaire qui a retenu l’attention de bien des Guinéens.
Yacine Diallo