Après trois jours de débats houleux entre les avocats et le procureur sur la question de la requalification du massacre du 28 septembre 2009 en crimes contre l’humanité, le juge Ibrahima Sory 2 Tounkara a décidé de réserver sa réponse pour les débats de fond.
« Le tribunal après avoir écouté toutes les parties sur la requalification des faits requise par le ministère public décide que la question sera tranchée dans la décision sur le fond et en conséquence ordonne la continuation des débats », a indiqué le juge.
La décision a mis colère les avocats de la défense qui affirment que c’est une journée triste pour la justice guinéenne, notamment de ce procès. « Nous ne sommes pas étonnés. La journée d’aujourd’hui a clairement indiqué le parti-pris du tribunal depuis le début. Alors, je peux vous assurer, l’article 407 du Code de procédure pénale est très clair. Lorsque, pour une demande, les avocats ou des accusés ont déposé des conclusions écrites, le tribunal est tenu de statuer. Et le droit pénal est d’interprétation stricte. Le juge est soumis à l’autorité de la loi, il ne peut pas en décider autrement. Sa mission aujourd’hui, était de tout simplement mettre cette affaire en délibéré et décider d’un jour, pour statuer. Et, il doit statuer par écrit en motivant, point par point, tenant compte des conclusions qui lui ont été présentées, des réquisitions qui lui ont été faites également par le parquet, avant de lire ses décisions », a expliqué Maître Jocamey Haba avocat du capitaine Moussa Dadis Camara, ancien président du CNDD.
Pour l’avocat, si le juge ne vise pas les dispositions de la loi, il aurait voulu faire allusion à l’article 429 du Code de procédure pénale. Ces dispositions s’appliquent en matière correctionnelle, pas en matière criminelle. C’est pourquoi, les avocats de la défense décident de boycotter l’audience du 25 mars prochain et envisagent de saisir le Conseil supérieur de la magistrature, pour insuffisance professionnelle. Parce que selon Maître Jocamey Haba, ce qui s’est passé n’est pas bien pour l’image du pays. « Nous pensons que la décision est déjà connue avant même que nous ne venions. On ne peut pas nous tendre un piège pour des professionnels que nous sommes, pour que nous attendions, le jour du délibéré, le tribunal vient dire « Nous requalifions les faits, et en ce moment-là, on ne pourra plus rien ».
Même si le juge n’a pas tranché, la partie civile jubile. « Pour nous, c’est un grand pas », a affirmé Maître Hamidou Barry, avocat de la partie civile. Selon lui, c’est une grande satisfaction pour le collectif des avocats de la partie civile, parce que la question n’a pas été « rejetée. C’est une bonne décision en disant qu’il va se prononcer sur la requalification, lorsqu’il va rendre une décision au fond. Je saisi encore cette occasion, pour dire que la Guinée est en train de jouer une grande partition dans la justice concernant les crimes internationaux », a soutenu l’avocat de la partie civile.
Le lundi 25 mars, c’est une nouvelle phase qui devra s’ouvrir dans le procès du massacre du 28 septembre 2009 : la confrontation.
Ibn Adama