Le procès de Mamadou Baïllo Diallo alias Guidho Fulbhè et Cie a repris le 5 avril au TPI de Kaloum. L’influenceur et ses coaccusés, Alpha Abdoulaye Diallo et Mohamed Sow rejettent catégoriquement les accusations articulées contre eux.
Au plus fort de la lutte contre le tripatouillage constitutionnel et le 3e mandat d’Alpha Condé, une répression sans merci s’abat sur les habitants de l’Axe Hamdallaye-Kagbélen. Des dizaines de jeunes sont tués par balles. Excédés par ces meurtres, des Guinéens d’ici et de la diaspora s’unissent autour d’un mouvement appelé CIFD (Coordination internationale du Fouta-Djalon pour le respect des droits humains et le développement durable). La structure se voit comme un rempart contre ces bavures. Les autorités voient en l’organisation un mouvement « violent » qui ne vise qu’à s’en prendre aux institutions de la République. Mamadou Baïllo Diallo alias Guidho Fulbhè, Alpha Abdoulaye Diallo et Mohamed Sow, Mamadou Lamarana Guessè Diallo, Mamadou Baïlo Baldé, membres de la CIFD sont interpellés en 2022, inculpés avec Mody Sory et Alpha Barry, en fuite, pour tentative d’attentat, de complot contre la République et complicité.
Comme Mamadou Lamarana Guessè Diallo à la première audience du 23 février dernier, trois autres accusés nient les faits. Alpha Abdoulaye Diallo reconnaît être le président de l’antenne CIFD-Guinée, dit qu’à aucun moment il n’a été question de s’en prendre à la Guinée : « Nous n’avons jamais décidé de commettre des attentats en Guinée. Nous n’avons jamais appelé les citoyens à s’armer contre l’Etat. La CIFD est une association comme toutes les autres. Elle a un agrément en Belgique et un Règlement intérieur. »
Sauf que le parquet de Kaloum considère que les accusés agissaient clandestinement en Guinée. Faux, rétorque l’accusé : « Nous n’avions pas entamé les démarches administratives, parce que nous n’avions mené aucune action sur le terrain. Nous étions juste dans la sensibilisation. »
Selon l’accusation, Alpha Abdoulaye Diallo et compagnie auraient reçu mandat de leurs supérieurs de recruter des militaires radiés des effectifs de l’armée, pour mener des actions violentes en Guinée : « Moi, je suis sûrement là parce que j’ai remis des motos à des membres. Mon éducation et ma formation ne me permettent pas de m’engager dans la violence ».
Mohamed Sow vit entre Mamou et Coyah. Lui aussi a été arrêté alors qu’il s’apprêtait à se lancer dans la sensibilisation au compte de la CIFD. Il déclare avoir été torturé par des agents de la Direction générale des renseignements intérieurs, DGRI : « Tout ce que je sais, c’est que la CIFD, c’était pour parler agriculture et élevage. C’est à la DGRI que j’ai entendu ces histoires de complots. Je ne connais rien de tout cela ».
Mamadou Baïllo Diallo alias Guidho Fulbhè était tranquillement assis dans son champ de riz à Koundara lors qu’il a été arrêté par des agents des forces de défense et de sécurité, avant d’être transféré à Conakry, au Camp Samory le 19 novembre 2023. Il est par la suite mis à la disposition de la DGRI qui lui a opposé ses vidéos acerbes sur les réseaux sociaux contre le régime d’Alpha Grimpeur : « On m’a attaché de Sarèbhoydho à Koundara centre, le préfet et le commandant du camp sont témoins. On a quitté Koundara à 22h, pour arriver à Conakry à 13h le lendemain. Durant le trajet, je n’ai eu ni eau ni nourriture. J’ai fait 24 jours à la CMIS n°7 de Kaloum, je mangeais à peine. » Selon lui, ses sorties ne visaient en aucun cas l’actuel pouvoir : « A l’arrivée du CNRD, j’ai décidé de rentrer définitivement en Guinée, sur la terre de mes ancêtres. Sinon, je savais qu’on me cherchait. Ceux-qui étaient à mes trousses même m’ont dit de fuir. J’ai refusé, parce que je ne craignais rien, mais c’est le CNRD même qui m’emprisonne. »
Pour Guidho Fulbhè, lui et ses coaccusés ont été arrêtés par les agents des renseignements pour des questions purement ethniques : « Ils m’ont jeté à la figure toutes sortes d’injures ethniques ». Une photo de lui avec un PMAK est versée au dossier, on l’accuse de s’être rendu en Casamance (Sénégal), pour apprendre le maniement d’armes. L’accusé dit l’avoir fait, sous le poids de l’exil : « Je l’ai fait juste pour la propagande, parce que j’étais en exil. L’arme appartient à un militaire sénégalais. Mais si la photo cause problème, je demande pardon. » L’accusé demande au tribunal de le sortir de prison : « A la Maison centrale, je dors sur une chaise, nous y souffrons énormément. Je demande au tribunal de me mettre à la disposition de mon avocat. Je me présenterai à chaque audience. »
Le juge a rejeté sa demande de mise en liberté, avant de renvoyer l’affaire au 19 avril prochain pour la suite des débats.
Yacine Diallo