A Kaloum, après l’arrestation d’un enseignant du Lycée 28 Septembre, des élèves et des jeunes en colère sont descendus dans la rue pour montrer leur désapprobation.
Le bras de fer entre les autorités de la transition et les sinistrés de l’incendie du dépôt pétrolier de Kaloum est loin de connaître son épilogue. Alors que le gouvernement dit avoir pris toutes les conditions pour reloger les victimes, ces derniers rejettent l’offre, refusent catégoriquement de quitter Kaloum. Les autorités décident donc de passer à la vitesse supérieure, en mettant aux arrêts le porte-parole de ces sinistrés, Mamoudou Sifo Ké Touré. Il a été interpellé dans l’enceinte de l’école primaire Tombo, où des élèves du Lycée 28 Septembre font cours depuis décembre 2023, alors qu’il était en situation de classe. La justice l’accuserait de ‘’manœuvrer’’ pour empêcher les sinistrés d’approuver les plans des autorités. Ké Touré est aussi vu comme un des instigateurs des manifestations à répétition dans la commune de Kaloum depuis l’incendie : « On a vu trois agents rôder autour de l’école, nous n’y avons pas prêté attention. Mais ils sont entrés avec un civil pour interpeller notre ami. J’ai protesté contre cette manière de faire. Je leur ai dit de ne pas mettre de l’huile sur le feu. Mais ils l’ont embarqué », explique Ibrahima Sory Camara, collègue de Ké Touré.
Elèves et jeunes du quartier, estimant que l’enseignant est victime d’un abus d’autorité bloquent la circulation, affrontent les forces de l’ordre à coups de pierres. Celles-ci ont pulvérisé la cour de l’école de gaz lacrymogène. Une dizaine d’élèves se sont évanouies : « Sept sont hospitalisés au CHU Ignace Deen », précise Ibrahima Sory.
Cet enseignant dit avoir tout fait pour baisser la tension : approcher les hommes en tenue pour les convaincre de libérer son ami, sensibiliser les jeunes en colère à éviter toute confrontation. En vain. Les gendarmes ne voulaient pas entendre parler d’une libération : « Je suis allé demander la libération de notre collègue. Je leur ai dit qu’il a été arrêté devant les élèves, qu’on a dû fermer la cour pour éviter que les élèves ne sortent. Ils ont refusé. Ils m’ont plutôt demandé de sensibiliser les enfants, je l’ai fait. A ma grande surprise à mon retour, ils se sont mis à larguer du gaz lacrymogène dans la cour de l’école. »
Une semaine auparavant, au gouvernorat de la ville de Conakry, des responsables du gouvernement et les sinistrés de Kaloum n’avaient pas réussi à accorder leurs violons sur les modalités de prise en charge de leurs frais de déménagement et de logement. Depuis, une menace de manifestation plane au-dessus de Kaloum.
Yacine Diallo