Les plaidoiries des avocats des parties civiles dans le procès du massacre du 28 septembre 2009 se poursuivent. Lundi 20 mai, 5 avocats se sont succédé à la barre pour tenter de démontrer la culpabilité des accusés. Ils sont d’accord que les crimes commis au stade constituent des crimes contre l’humanité. En raison donc de la gravité des faits, ils plaident de retenir tous les accusés dans les liens de la culpabilité. Ce qui fâche le capitaine Moussa Dadis Camara, ancien président de la transition.
« Pour empêcher les populations de sortir du stade, les miliciens, les militaires ont bouclé toutes les issues. Ils sont allés jusqu’à tirer sur les fils électriques, pour électrocuter les citoyens », a expliqué Maître Kabinet Kourala Keita. Selon lui, Paul Mansa Guilavogui a posé des actes de cruauté sur les ordres de son chef hiérarchique de l’époque. « Ces actes se passaient dans les camps que commandait le capitaine Dadis Camara qui était le coordinateur. Ces faits quoi qu’ils soient atroces, sont imputables aux accusés ». Pour Me Kourala Keita, le massacre du 28 septembre découle d’une conception préalable, d’une planification, d’un financement. « Il faut relever l’esprit de cruauté, de violence qui ont animé les militaires et les miliciens de Kaléya ce jour ». L’avocat affirme que ce n’est pas en niant les faits que les accusés peuvent se dédouaner.
Dadis proteste
Dans sa plaidoirie, Maître Keita a abordé la question qui fâche : celle de la tentative d’évasion du 4 novembre dernier. Sachant bien que Moussa Dadis Camara a horreur que ce pan de l’histoire ne soit abordé. Alors l’avocat assène : « Au lieu d’assumer, le président Dadis a tenté de s’évader, de se soustraire de la justice de son pays ». Il n’en fallait pas pour que le capitaine Dadis lève la main, mais il n’est pas écouté, le président du tribunal ne réagit pas. L’avocat continue de s’exprimer : « Comment quelqu’un qui a été Président peut tenter de sortir de prison, pour se soustraire de la justice de son pays ? » Et Dadis pète les plombs, il se lève et crie sa désapprobation. Un acte digne du Dadis-show. Du brouhaha dans la salle. Les yeux braqués sur lui. Rien n’arrête le capitaine Dadis d’exprimer sa colère. « C’est la haine qui vous anime. Tu sais ce qui se passait et tu te permets de dire des choses insensées, c’est insensé ce que vous dites. Même si on a la sagesse, il y a des comportements qu’on ne peut pas accepter. On ne vit qu’une seule fois, la dignité d’un homme est très chère. Vous ne pouvez pas vous arrêter, pour dire des choses insensées. Vous étiez là-bas ? » s’écriait Dadis Camara, très en colère. Le président du tribunal tape du doigt sur la table, pour que le capitaine Moussa Dadis se calme, rejoigne sa place, malgré lui. « Vous êtes là, on va parler de vous, vous ne pouvez rien. Je vous ai dit dès qu’on va vous adresser un terme blessant, un terme qui n’est pas cohérent, le tribunal interviendra pour demander à l’intéressé de retirer. Pour le moment, ce n’est pas le cas. Il dit des choses, est-ce qu’il y a une décision dans ce sens ? Il est libre de parler. Et vous êtes obligés d’écouter, de suivre. Quand le moment viendra, vous aurez le temps de réagir. Mais on ne va plus tolérer un tel comportement, s’il vous plaît ! On ne parle pas que de vous, on cite les noms de tout un chacun, de tous les accusés. Pourquoi cela vous irrite ? Donc, soyez serein ! »
Après donc cet incident, Dadis Camara est rentré dans sa coquille. L’avocat Kourala Keita profite pour déverser sa colère sur l’ancien Président de la transition de 2009 qui, pour lui, est responsable à part entière du massacre du 28 septembre. « Quelles sont les mesures que le Président Dadis Camara a prises ? Il savait que ces hommes étaient indisciplinés, qu’ils pouvaient se permettre de faire tout, de commettre des crimes. Lui-même a dit que l’armée était indisciplinée, que c’était lui seul qui pouvait régler cela. Qu’est-ce qu’il a fait pour arrêter le massacre ? Au contraire, Il a dit à France24 que les faux leaders ont conduit les enfants des gens à l’abattoir. Tout le monde sait qu’à l’abattoir, ce sont des bouchers qui s’y trouvent. Qui sont ces bouchers ? Des bouchers qu’il a préparés ? Il ne peut pas s’en sortir comme ça. J’ai un frère qui a une balle dans son dos. Cela a été possible par le désordre perpétré par Dadis ».
Pour Maître Sory Bailo Barry, Aboubacar Sidiki Diakité alias Toumba est aussi responsable du massacre. Puisqu’il était le conseiller spirituel de Dadis. « Il s’est vanté que c’est lui qui a donné le pouvoir à Moussa Dadis Camara. Il a fait taire des Généraux. Imaginez-vous que des civils se réunissent contre ce pouvoir. Les conséquences, c’est le massacre du 28 septembre 2009. Toumba était au cœur du massacre », soutient Me Barry.
Maître Tafsir Barry d’indiquer que des militaires habillés, payés par le contribuable guinéen se sont livrés à des pratiques qui n’honoraient pas l’armée guinéenne (…)
Mamadou Adama Diallo