Le porte-parole du gouvernement était vendredi 5 juillet devant les médias, pour réagir à l’actualité sociopolitique : mort de Sadiba Koulibaly, droits humains et liberté d’expression, électricité, évaluation des partis politiques, prochain congrès de l’UFDG…Un menu fretin varié.

Devenu aphone depuis l’arrivée de Bah Oury à la Primature, le porte-parole du gouvernement a fini par briser le silence ce 5 juillet. Alors que les vacances s’annoncent et que lui-même s’envolera pour « applaudir » le Syli national aux Jeux Olympiques de Paris, Ousmane Gaoual Diallo a tenu à organiser une conférence de presse avant. Occasion pour lui de réagir à l’actualité sociopolitique, mouvementée ces derniers temps, et répondre aux interrogations des journalistes. Dans une intro de neuf minutes, il s’est indigné contre ceux qui peignent la Guinée en noir, avant de se prêter aux questions des journalistes. « Certaines ONG développent un narratif qui tend à faire croire que la Guinée serait le pire pays de la planète, en termes de violation des droits humains. C’est une lecture qui touche chaque Guinéen. Vous êtes en Guinée, y vivez. Cela doit interpeller tout le monde, y compris les journalistes que vous êtes. On croit que c’est un jeu entre les organismes de droits humains et nous autorités. Vous avez la latitude, soit d’infirmer ou de confirmer », assène-t-il.

Conformité avec les textes

Il y a des acteurs politiques en prison, mais cela ne fait pas d’eux des prisonniers politiques, car poursuivis pour des infractions de droit commun, argumente Ousmane Gaoual. De même, ceux comme Cellou Dalein Diallo ou Sidya Touré qui prolongent leur séjour hors des frontières nationales ne sont pas, à ses yeux, des exilés politiques. L’un est en mission de son parti, l’Union des forces démocratiques de Guinée, a-t-il rappelé, en prenant aux mots les déclarations de départ du président de l’UFDG. Tandis que le président de l’Union des forces républicaines se trouve dans ce qui apparaît comme étant son deuxième pays (Côte d’Ivoire). Une façon pour Ousmane Gaoual Diallo de déconseiller à la presse de passer pour plus royaliste que le roi.

« Le ministère de l’Administration du territoire est la tutelle des partis politiques, renchérit le conférencier. Notre pays connaît une prolifération de formations politiques qui sont au nombre de 184. Il est important que l’Etat essaye de comprendre comment ces structures évoluent, leurs difficultés et d’être un vecteur de renforcement de notre démocratie naissante. C’est dans ce cadre que l’évaluation a été lancée. Il s’agit de voir la cohérence entre les actes qu’ils posent sur le terrain, les textes et les engagements pris vis-à-vis de l’État et de leurs militants. »  

Electricité, l’horizon toujours obscur

La capitale guinéenne broie du noir depuis le début de l’année, alors que les délestages d’électricité tendaient à devenir un vieux souvenir. Mais pour Ousmane Gaoual Diallo, c’est plutôt un serpent de mer qui hante les Guinéens depuis toujours. « C’est injuste de réclamer en deux ou trois ans ce qu’on n’a pas fait en 63 ans d’indépendance », s’est-il offusqué.

Jugé couteux pour le trésor public, le contrat de production d’énergie signé entre l’ancien régime Condé et la centrale thermique flottante du turc Karpowership a été résilié. Les actuelles autorités avaient annoncé une interconnexion énergétique avec le Sénégal pour 100 mégawatts, à un coût plus abordable mais innommable. Sauf que les ménages guinéens n’ont constaté aucune amélioration dans la desserte, au contraire, la crise a empiré. Le conférencier admet que le Sénégal lui-même n’a pas résolu complètement son déficit énergétique. Et que la collaboration porte sur une fourniture d’électricité de 4h par jour et seulement pendant une certaine période de l’année durant laquelle le voisin a un surplus engrangé par la faiblesse de la demande (consommation). Une fourniture donc par défaut qui ne doit pas empêcher la Guinée d’explorer d’autres pistes de solution. Les moyens financiers limités, les autorités misent sur les revenus miniers, précisément l’entrée en production de Simandou. Comme pour dire que ce n’est pas demain la veille.

Mort de Sadiba

La mort de l’ex-chef d’état-major général des armées, Sadiba Koulibaly, s’est également invitée dans les débats. Un confrère a questionné le ministre des Transports et porte-parole du gouvernement sur l’absence de réaction des autorités sur cette intrigante disparition d’un poids lourd du CNRD. « Il n’y a pas eu une déclaration officielle du gouvernement, mais dire qu’aucun ne l’a fait, c’est pas du tout la réalité. La responsabilité des médias, c’est aussi d’éviter la surenchère. D’une manière générale, quand un militaire meurt, c’est l’armée qui s’occupe de tout jusqu’à l’enterrement. Mais il était déjà radié de l’armée. S’il y a des doutes, la famille a toute la légitimité de saisir la justice, pour les lever. Jusqu’à preuve du contraire, elle ne l’a pas fait. »

Quant au chronogramme de la transition et du retour à l’ordre constitutionnel, le conférencier estime que la tenue des élections « n’est pas une fin en soi » et que la Guinée ne doit pas se laisser dicter la conduite à suivre. L’échéance convenue avec la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest s’étant révélée intenable, la transition a besoin du temps supplémentaire et Ousmane Gaoual Diallo trouve plus important son contenu que sa durée.

« Pas sans moi »

L’ancien coordinateur de la Cellule de communication de l’UFDG continue de contester son exclusion du parti dirigé par Cellou Dalein Diallo. Alors que ce dernier annonce son retour, sans en fixer de date, pour organiser un congrès auquel il dit être candidat, Ousmane Gaoual Diallo prévient qu’il ne se tiendra pas non plus à l’écart de la compétition. « Nous travaillons et sommes convaincus que le congrès va statuer en notre faveur. Et il n’y aura pas de congrès sans nous. S’ils organisent un congrès, on le fera aussi. De ce point de vue, nous n’avons aucun problème. Le CERAG (Cercle des Amis de Gaoual, ndlr) travaille sereinement. Ils ont leur club de campagne, nous avons le nôtre. On espère qu’il y aura un vote transparent. Il n’y a que 1000 électeurs, et on fera ça au Palais du peuple. »

Ousmane Gaoual Diallo estime que son rival n’est pas plus légitime que lui, en rappelant que le mandat du leader de l’Union des forces démocratiques de Guinée est échu depuis décembre 2020. Depuis cette date, « tous les actes posés par Cellou Dalein sont nuls et de nul effet. Aujourd’hui, on devrait être en transition à l’UFDG », remarque-t-il. Le principal parti politique guinéen va-t-il connaître aussi son putsch ?

Diawo Labboyah