Alors que le Syndicat libre des gens-saignants et chercheurs de Guinée, Slecg, menaçait de déclencher une crève générale et illimitée à l’ouverture des classes, Aboubacar Soumah le rebelle semble avoir mis de l’eau dans son bissap. Un rétropédalage qui interroge.

Le SLECG ne digère pas le sort réservé aux contractuels communaux qui ont échoué lors du récent concours d’accès à la Ponction publique. Ces bouffe-la-craie réclament, depuis la publication des résul-tares, leur intégration pure et simple à la Ponction publique. D’aucuns mettent en avant l’argument selon lequel leurs dossiers n’ont pas été pris en compte pendant le concours. C’est le cas des gens-saignants du buisson de Tougué. D’autres brandissent la dizaine d’années aux sévices de l’Education. Mais chez les autorités, c’est la sourde oreille. Après maintes manifs dans les buissons de l’arrière-bled, les protestataires rappliquent à Cona-cris pour mieux se faire entendre. Ils se réunissent au sein du Collectif des enseignants contractuels et communaux non retenus pour la Fonction publique et se confient au SLECG. A charge pour cette centrale syndicale de faire entendre leur cri de cœur auprès des autorités. Le boss du SLECG, Soumah le rebelle, concocte une plateforme revendicative bien garnie, qui tourne essentiellement autour de la situation des bouffe-la-craie contractuels non admis. Il la dépose au mystère de la Ponction publique. Le silence du pilote de ce département a mis le SLECG dans tous ses états, au point d’agiter la menace d’une crève générale et illimitée : «Les autorités refusent de nous écouter. Dans les prochains jours, nous allons nous retrouver et leur faire parvenir un préavis de grève. Il (le président du Conseil national du dialogue social Ndlr) nous a adressé un courrier pour nous inviter à une rencontre, mais depuis, nous n’arrivons plus à le joindre à plus raison le rencontrer. Il ignore toutes nos sollicitations. Nous allons patienter jusqu’à ce que le moratoire que nous leur avons accordé se termine. Nous leur adresserons par la suite un préavis de grève. Les autorités seront responsables de la paralysie des cours. »

La crève semble donc inéluctable vu que les autorités restaient sourdes à toutes les revendications.  Des dizaines de bouffe-la-craie en ont même profité pour manifester devant le Palais Mohammed V, siège de la Présidence, le 9 septembre. Histoire de montrer leur ire. Pancartes et banderoles en mains, ils ont crié leur ras l’obole durant l’après-midi. La manif a suscité un tollé dans la cité. Plusieurs autres syndicaleux ont accusé Aboubacar Soumah (qu’ils voient en perte de vitesse), de manipuler les gens-saignants contractuels pour se refaire une virginité dans le monde syndical. D’autres l’ont accusé de chercher à empêcher les contractuels admis d’intégrer la Ponction publique.

Soumah fait machine arrière

Face à la levée de bouclier, le rebelle a cru bon de rétropédaler. Une façon d’éviter une embrouille avec la junte ? Il s’éloigne en tout cas de ceux qui ont battu le pavé aux abords du Palais Mohammed 5 : « Je leur ai dit, si c’est dans le cadre syndical qu’ils m’adressent leur correspondance, moi, je dois engager les choses syndicalement. Je leur ai dit de s’abstenir de toute manifestation. C’est dans ce cadre-là que j’ai déposé une plate-forme revendicative dans laquelle je fais allusion à leur cas. En tant que syndicaliste, je ne peux pas mettre les enseignants dans la rue. Je leur ai dit de suivre la procédure légale, la procédure syndicale. C’est pour cela que les principes sont là, on ne les viole pas. Nous avons commencé le processus en déposant une plate-forme de revendications. » Un poing, c’est doux !

Soumah le rebelle faisait déjà face à d’autres fronts, notamment un au sein du Slecg. Un front mené par Kadiatou Bah, patronne de l’autre faction du SLECG. Il fait donc machine arrière et préfère se tourner vers le Conseil national du dialogue social (CNDS). Il a fini par obtenir un tête-à-tête avec le prési du CNDS le 12 septembre. Après une heure avec Alya Cas-marrant, Soumah temporise : «Toute la situation sera analysée, et la correspondance qui va être adressée aux autorités compétentes, sera prise en compte en ce qui concerne la situation des enseignants contractuels.» Alya Cas-marrant n’a seulement rien promis aux protestataires, mais il leur a dit de lui faire parvenir leurs propres propositions. Les syndicaleux se sont empressés d’accepter la proposition, alors que Soumah a déjà déposé une plateforme revendicative en borgne et dure forme. Toutefois, le boss du SLECG avertit tout de même : l’idée de la crève n’est pas totalement écartée : « Si à l’issue de ce dialogue-là, on ne parvient pas à trouver une solution, on continuera le processus jusqu’à ce que toutes les voies de recours soient terminées. C’est à ce moment-là que nous allons envisager une autre forme, en utilisant l’arme tranchante que le syndicat utilise…» L’affaire des gens-saignants recalés au récent concours d’accès la Fonction publique est loin de connaître son épilogue. 

Yacine Diallo