L’ex-prési de l’Assemblée nationale, Amadou Damaron-ron Camara, malade, a essayé de justifier ses biens, via des titres de propriété. Il s’est livré à cet exercice le 9 octobre, à la Cour de répression des infractions économiques et financières, Crief. Mais, il lui faut un peu d’effort.
Amadou Damaron-ron Camara est jugé pour « corruption, détournement de deniers publics, enrichissement illicite, blanchiment des capitaux, prise illégale d’intérêt et complicité », portant sur une misère de 15 milliards de francs glissants. Le fric était alloué à la viabilisation du site du futur siège de l’Assemblée nationale, sur le plateau du Centre directionnel de Koloma. Ses coaccusés sont les anciens questeurs de l’institution : Michael Kamano et Zeinab Camara alias Zée Pharell. S’ajoute Jun Sun Cheng dit Kim, boss de la société CASTOR chargé des travaux de viabilisation sur le site.
À l’audience du 9 octobre, Damaron-ron a rappelé avoir obtenu une remise en liberté, mais bloquée par le parquet spécial. Et d’introduire une autre : « Amadou Damaro Camara est en détention préventive depuis le 27 avril 2022. Nous exigeons une fois de plus sa libération provisoire, il n’y a plus aucune raison de le maintenir en prison. Il ne constitue aucune menace pour la société », avance Me Santiba Kouyaté, son avocat. La demande a été rejetée illico par la partie civile, puis confirmée par le prési de la cour, Yacouba Conté. L’ancien prési de l’Assemblée nationale est le seul écroué dans cette affaire.
La cour a abordé, par ailleurs, la question liée aux biens immobiliers et aux comptes bancaires d’Amadou Damaron-ron Camara. L’accusé en a fourni à la cour plusieurs documents dont les titres de propriété de son duplex à Matoto, de ses maisons à Kérouané et à Sonfonia, de sa parcelle à N’Zérékoré, ainsi que de sa maison en chantier à Kankan. Toutefois, l’ex-dignitaire n’a pu apporter les titres de propriété de ses cinq hectares d’anacardiers et ceux de sa maison « familiale » de Damaro, chez lui.
Le 25 août 2021, l’un des comptes de l’ancien prési de l’Assemblée nationale a été crédité d’1 milliard 500 millions de francs glissants, à titre de fonds de souveraineté. «À l’Assemblée nationale, la gestion se faisait à travers un plan de trésorerie. On identifie tous les besoins, toutes les dépenses, toutes les dettes de l’institution. Le reste de l’argent est réservé aux fonds de souveraineté. Il me revient de l’utiliser pour ma souveraineté. Ainsi fonctionnaient toutes les précédentes législatures du pays. Le budget de l’Assemblée nationale ne se discute et ne se justifie pas, selon la loi organique », balance Damaron-ron Camara.
Où sont les 15 milliards ?
Au sujet de la gestion des 15 milliards de francs glissants, Damaron-ron soutient que c’étaient des fonds spéciaux destinés aux travaux préliminaires du futur siège de l’Assemblée nationale. Il précise que les fonds étaient les premiers alloués à l’institution depuis 60 ans en termes d’investissement. «Nous avions des entreprises pour construire le nouveau siège de l’Assemblée nationale à Koloma. Mais, elles n’étaient pas en mesure de préfinancer la réalisation. Seule CASTOR a répondu aux exigences dans un court délai. Et le partenaire chinois, à l’époque, nous avait accordé 60 jours, au risque de perdre 40 millions de dollars pour la construction du siège. Donc, il fallait prendre une décision à la fois sage et intelligente », se justifie-t-il.
Au finish, le prési de la cour, Yacouba Conté, a clos les débats et a renvoyé l’affaire au 16 octobre, pour plaidoiries et réquisitions. D’ici-là, Damaron-ron retourne au gnouf à…l’hosto de l’Amitié Sino-guinéenne.
Yaya Doumbouya