Certes la politique africaine de la France n’est pas exempte de tout reproche. Pour autant, la brève interpellation de Kémi Séba le 14 octobre dernier constitue l’illustration que la France, et de manière générale « le monde libre », en opposition au pacte de Varsovie – reste et demeure un modelé et une référence.

En conférence de presse, le 18 mars dernier, Kémi Séba a brûlé publiquement son passeport français, martelant : « Votre passeport, ce n’est pas un os que vous nous donnez comme si les Noirs étaient des chiens. Je suis un homme Noir libre. Je suis un Africain libre. Je suis un Béninois libre ». Cet acte symbolique s’adressait au gouvernement Macron.

Pour la France, qui fait des pieds et des mains pour intégrer les communautés noire et arabe, ce geste, véritable séisme, fera tache d’huile dans les banlieues incandescentes. Sous les tropiques, « la témérité » de l’ex Franco-Béninois, devenu Nigéro-Béninois, sera perçue comme la marque d’un Africain décomplexé. Paradoxalement, cette défiance rend service à la France. Sous d’autres cieux, l’auteur d’un tel acte, dans le meilleur des cas dans l’avion pour son pays d’origine, et au pire en prison. La France, quant à elle, met plusieurs mois pour retirer la nationalité française à celui qui crache sur.

Le néo citoyen nigérien, qui s’honore depuis août dernier d’un passeport diplomatique de ce pays, veut le beurre et l’argent du beurre. Cela, après l’incident du 14 octobre, les internautes africains n’ont pas manqué de le lui rappeler. Et tous de se demander ce que Kémi Séba était allé chercher dans un pays dont il est devenu le grand pourfendeur devant l’Eternel.

De la « rébellion » de l’AES et la défiance de citoyens français à son égard, la France paye sa politique africaine. Paris a soutenu ouvertement le Troisième mandat en Côte d’Ivoire. Une insulte peu déguisée aux Ivoiriens : son soutien s’impose à la suite de la mort de deux Premiers ministres de dauphins d’Alassane Ouattara. Comme su la Côte d’Ivoire n’y avait pas de gens pour diriger. Cette justification d’Emmanuel Macron fut totalement contreproductive pour la France.

Mais l’événement qui a le plus terni l’image de la France aura été l’implication de Paris dans la succession d’Idriss Déby Itno par l’orphelin. Au nom de la sécurité et de la lutte contre le terrorisme dont Déby était le chantre dans le Sahel, Emmanuel Macron a fragilisé la France. Cette succession a ouvert la voie aux coups d’Etat et, après l’élection de Déby fils, à la candidature de tous les putschistes à la présidentielle de leurs pays respectifs.

Le deux poids deux mesures entre le Tchad et les autres pays membres de l’AES a apporté de l’eau au moulin de ces derniers. Pourfendre la France est devenu leur projet de société. Les initiatives se succèdent afin de faire croire aux citoyens que le problème de ces pays était la France et ses valets qui sont les anciens chefs d’Etat renversés. Aidés en cela par des panafricanistes comme Kémi Séba, les régimes malien, burkinabé et nigérien ne manquent aucune occasion pour présenter la France comme la cause de leur malheur passé et présent.

Habib Yembering Diallo