Trois dates baptismales inscrivent 1958, dans le marbre, en chiffres d’or, les moments forts de la naissance de la République de Guinée.

Il y a d’abord le 25 août 1958. Ce jour, le Général Charles de Gaulle, en campagne référendaire en faveur de la Constitution de la 5è République et Sékou Touré, président du Conseil du Gouvernement de la colonie de la Guinée, échangent deux diatribes, mémorables à l’Assemblée territoriale. « Nous préférons la liberté dans la pauvreté à la richesse dans l’esclavage », lance Sékou Touré à la face de de Gaulle qui, à son tour, lui assène : « On a parlé d’indépendance. Je dis ici, plus haut encore qu’ailleurs que l’indépendance est à la disposition de la Guinée. Elle peut la prendre, elle peut la prendre le 28 septembre en disant non à la proposition qui lui est faite. Et dans ce cas, je garantis que la métropole n’y fera pas d’obstacle. Des conséquences, elle en tirera, mais d’obstacle, elle n’en fera pas. Et votre territoire pourra comme il voudra et dans les conditions qu’il voudra, suivre la route qu’il voudra. » Et voilà l’indépendance adjugée !

Ensuite, il y a le 28 septembre. Ce jour, si les métropolitaines étaient convoqués aux urnes pour approuver ou rejeter la Constitution de la 5è République, les ressortissants des colonies étaient invités à adhérer à la Communauté franco-africaine qui leur était proposé ou à la rejeter. Depuis le 25 août, de Gaulle et la France savaient que les carottes étaient cuites, en Guinée. C’est massivement que les Guinéens avaient rejeté le projet de Communauté franco-africaine, alors que les onze autres colonies françaises d’Afrique de l’Ouest et du Centre y adhéraient. Il y a un point sur lequel, on n’insiste pas assez. Ce succès était celui de tous les Guinéens, car du mois de juillet au vote, tous les partis (PDG, PRA, BAG) avaient choisi l’option de l’indépendance. La Guinée échappa à la mésaventure du Niger où le parti Sawaba de Djibo Bakary avait échoué face à la section territoriale du RDA d’Amani Diori, soutenu par la France.

Enfin, le 2 octobre, proclamation de l’indépendance de la Guinée. Il n’est pas superflu de noter qu’à l’époque, les facteurs qui retardent aujourd’hui les résultats de l’opération électorale, n’avaient pas encore cours. Les résultats du scrutin du 28 septembre étaient disponibles 3 jours plus tard. Ce qui permet à Sékou Touré, en sa qualité de Président du Conseil de Gouvernement issu de la Loi Cadre (ou Loi Gaston Deffere) de proclamer, dans la matinée du jeudi 2 octobre, l’indépendance de la Guinée, devant l’Assemblée territoriale, qui sera érigée en Assemblée nationale constituante, dont les membres deviennent automatiquement des députés. Et naquit la République de Guinée dont Sékou Touré en devint le premier président.

Le 25 août, le 28 septembre, le 2 octobre ont ainsi clos le processus de décolonisation de la Guinée et ouvert une ère d’incertitude.

Abraham Kayoko Doré