A la disparition d’El Hadj Sékhouna Soumah le 30 octobre dernier, la Coordination de la Basse-Côte a annoncé la nomination d’El Hadj Mamoudou Camara au poste de Kountigui par intérim de leur entité. Le choix du grand imam de Kindia, loin de faire l’unanimité, suscite désormais le déchirement entre les préfectures de la région.
A peine choisi, à peine contesté. El Hadj Mamoudou Camara, influent imam de Kindia, pensait mener la succession du Kountigui, El Hadj Sékhouna Soumah avec tranquillité, du moins jusqu’à la fin de la période du deuil. Mais c’est une illusion. Il se heurte à la farouche opposition d’une partie non négligeable des Basse-côtiers. Ses adversaires ont décidé de miser sur El Hadj Nana Souna Yansané de Kaloum. Cela engendre une sorte de clanisme au sein de la Coordination. El Hadj Mamoudou est porté par partisans de feu El Hadj Sékhouna et des ‘’sages’’ de Kindia. Nana Souna Yansané bénéficie du soutien du mouvement Labé-Sangni et des ressortissants du Moryah (Forécariah). Un certain El Hadj Moustapha Kaba revendique, lui aussi, la chefferie au nom des préfectures de Boffa et Fria. Chaque camp estime qu’il lui revient de droit de désigner le successeur.
El Hadj Mamoudou est conscient de la division qui minerait la Basse-Côte, mais se voit comme le successeur naturel de son ami, pour régler les différends : « Ceux qui s’opposent au choix porté sur ma modeste personne, je les invite à venir pour qu’on travaille ensemble… La division ne nous mènera nulle part. Ceux qui parlent, savent mieux que moi, que l’union fait défaut en Basse-Guinée. On ne peut parer à cela si ce n’est dans l’union. »
Son appel tombe dans des oreilles de sourds. Le camp de Nana Souna Yansané l’accuse de mépriser le Moryah, de rouler pour un parti politique : « Soutenir El Hadj Mamoudou Camara, c’est soutenir l’UFR de Sidya Touré. Ils en veulent au Moryah, parce qu’ils estiment que des cadres originaires de Forécariah sont à l’origine de leurs échecs en politique et dans l’administration» ; lit-on dans un communiqué du Labé-Sanyi. Ce mouvement accuse aussi l’autre camp de vouloir engager la Basse-Côte dans un bras de fer avec les militaires au pouvoir : « Nous voulons un Kountigui rassembleur, pas clivant ou qui fait de la politique avec la bannière de la Coordination. »
Le Labé-Sanyi estime aussi que l’imam de Kindia ne répond pas aux critères pour être à la tête de la Basse-Côte. Selon lui, la charte, mise en place sous la présidence d’El Hadj Sékhouna, est formelle : « En cas de décès du Kountigui, c’est son adjoint qui assure l’intérim pour 40 jours, suivra ensuite l’intronisation officielle du nouveau Kountigui. » A ses yeux, le poste est sans conteste pour Nana Sounna Yansané. Ce que contestent vigoureusement les proches de l’imam El Hadj Mamoudou. Pour eux, le choix du Kountigui découle toujours d’un consensus entre les notables de la région.
A date, le Labé-Sanyi et El Hadj Nana Souna Yansané auraient déjà terminé une tournée dans les 8 préfectures de la Basse-Côte, pour convaincre que ce dernier est le mieux placé pour remplacer le défunt. Ils ont tenu une réunion le dimanche 17 novembre, chez l’ex député, Ibrahima Bangoura. Ils entendent prendre les devants dans les prochaines semaines. La guéguerre de succession à El Hadj Sékhouna Soumah est loin de finir.
Yacine Diallo