Après avoir terrassé Hillary Clinton en 2016 et, quatre ans plus tard, s’être incliné devant Joe Biden, Donald Trump s’est de nouveau imposé contre Kamala Harris. Avec une condamnation, plusieurs inculpations et deux tentatives d’assassinat, le 47e président des Etats-Inouïs revient d’entre les morts.

Le pays de tous les possibles nous surprendra toujours, nous autres en démocrature. En 2008, il a démontré au monde qu’il pouvait élire, puis réélire un Noir comme 44e président. Au terme des deux mandats d’Obama, on a cru qu’il allait enfin s’offrir sa première présidente de son histoire. Nombre d’oracles avaient vite fait le parallèle entre la célèbre série américaine 24h Chrono et la vie politique de la première puissance mondiale. Ils apprendront à leurs dépens que la présidente Allison Taylor, personnage de fiction, n’est pas Hillary Clinton.

Sorti de nulle part, sans passé politique d’envergure, Donald Trump a été préféré à celle qui fut first lady (première dame) des États-Inouïs de 1993 à 2000, sénatrice pour l’État de New York au Congrès (2001-2009), secrétaire d’État (2009-2013), deux fois candidate aux primaires démocrates, avant d’en devenir le porte étendard en 2016.

Ce riche parcours, partout ailleurs sur Terre, l’aurait hissée à la tête du pays. Sans anicroche. Favorite des sondages, majoritaire en nombre de voix, elle totalise finalement 227 grands électeurs contre 304 pour le candidat du Parti républicain. Hillary Clinton s’incline donc devant Donald Trump. A la surprise générale, du moins des néophytes du système électoral ricain. L’homme d’affaires milliardaire, animateur, producteur de télé devient le 45e président des États-Inouïs.

Démêlés judiciaires

Il règne du 20 janvier 2017 au 20 janvier 2021, avec un style aux antipodes du politiquement correct, ponctué de déclarations et de décisions controversées. Populiste, nationaliste, climatosceptique, l’intraitable et l’incrédule Trump retire son pays de l’OMS en plein Covid, restreint l’immigration, reconnaît Jérusalem comme capitale d’Israël, noue des relations avec Pyongyang (Corée du Nord) et le Kremlin de Vladimir Poutine…

Cerise sur le gâteau, il conteste sa défaite face à Joe Biden, arguant de cas de fraudes ! Ses partisans, courroucés et radicaux, s’attaquent au Capitole le 6 janvier 2021. Bilan, cinq morts dont un policier ! Le Pays de l’Oncle Sam surprend de nouveau le monde. Décevante surprise, cette fois-ci ! On se croirait au Gondwana, pour parler comme l’humoriste nigérien Mamane.

Durant les quatre ans de Joe Biden à la Maison Blanche, Donald Trump se débat dans d’interminables procédures judiciaires : reconnu coupable de galipettes avec une actrice de porno, Stormy Daniels (payée à 130 000 dollars pour tenir sa langue) ; poursuivi pour « falsification comptable aggravée pour dissimuler un complot visant à pervertir l’élection de 2016 » ; tentative d’inversion des résultats de l’élection de 2020…

Mais parallèlement, l’homme d’affaires ourdit sa revanche. Il infligera la première défaite au camp adverse le 27 juin dernier, lors du désastreux face-à-face télé-vicié avec le président sortant de 82 ans. Ce dernier en sort ridiculisé, ayant eu du mal à articuler ses mots, à rester cohérent durant le débat.

Lourd héritage

Sous la pression, Joe Biden finit par renoncer à un second mandat. Sa vice-présidente, Kamala Harris, est investie au pied levé candidate du Parti démocrate lors de la convention du 19 au 22 août à Chicago, dans l’Illinois. Barack et Michelle Obama bénissent la nouvelle colistière, la disent prête et capable de conduire les destinées de l’Amérique.

Sauf qu’au soir du 5 novembre, après une campagne mouvementée pendant laquelle le candidat républicain s’est fait tirer dessus, les électeurs américains choisissent à nouveau l’inculpé à l’ancienne procureure ! On aurait dit que ces Yankees ont mauvais goût, si on se bornait à suivre nos émotions. Mais ils ont beau passer pour le gendarme du monde, les Etats-Inouïs se choisissent leur président à eux.

En se désistant au profit de Kamala, Joe n’a pas renoncé qu’à son droit d’être encore candidat. Biden a légué également à Harris, un bilan économique peu élogieux et des milliers de migrants sur les bras à justifier et défendre. Outre la question de l’avortement, l’économie et la migration, entre autres, semblent en effet avoir pesé sur la balance électorale des Américains. Trump, la bête noire des candidates, déserte les tribunaux pour le Bureau Ovale. Ce qui lui garantit quatre ans d’immunité…d’impunité, diraient certains. A la fin de son mandat, il aura 82 ans – soit l’âge actuel de Joe Biden, et peut-être ne sera plus suffisamment lucide pour répondre de ses actes. Qui a dit que le temps est le meilleur juge ?

Diawo Labboyah