Lors du sommet coorganisé par l’UNESCO et l’Union africaine (UA) à Addis-Abeba les 6 et 7 novembre à l’occasion de la Journée internationale de la fin de l’impunité pour les crimes commis contre les journalistes, Reporters sans frontières (RSF) appelle les autorités du Sahel à signer la Déclaration sur le droit à l’information dans la zone. 

Des journalistes sont enrôlés de force dans l’armée au Burkina Faso, enlevés par des groupes armés au Mali, tués au Tchad, ou arbitrairement arrêtés au Niger. Des rédactions sont saccagées, leur matériel est pillé, quand d’autres médias, notamment internationaux, sont désormais interdits. 

Face aux défis sécuritaires au Sahel, les journalistes paient un lourd tribut et le droit à l’information des populations est bafoué. Dans la continuité de l’appel lancé par RSF avec plus de 500 radios communautaires de la région, l’organisation, présente à Addis-Abeba ces 6 et 7 novembre, invite les États et autorités de la région à s’engager pour la protection du droit à l’information et la sécurité des journalistes au Sahel en signant une déclaration en dix engagements.

“Les enrôlements forcés dans l’armée, les enlèvements et les actes de violence et d’intimidation envers les journalistes, l’affaiblissement du modèle économique des médias, les mesures liberticides prises au nom de la sécurité nationale, l’absence de politique de lutte contre la désinformation, les suspensions abusives de médias constituent autant de menaces à l’exercice du droit à l’information au Sahel. Que ce soit par la force, la technologie ou le droit, les moyens employés pour affaiblir le journalisme indépendant au Sahel ont conduit à ce que la région devienne progressivement une ‘zone de non-information’. À Addis Abeba, où RSF est présente pour marquer la journée internationale de la fin de l’impunité pour les crimes commis contre les journalistes, l’organisation demande aux États de la région du Sahel de signer la Déclaration sur le droit à l’information », explique Sadibou Marong, Directeur du bureau Afrique subsaharienne de RSF.

RSF a présenté et lancé sa déclaration sur le Sahel le 7 novembre dans le cadre d’un panel, au cours d’un événement organisé par l’UNESCO et l’Union africaine (UA) au siège de cette dernière. Le panel était composé du directeur du bureau Afrique subsaharienne de RSF, Sadibou Marong, de la responsable régionale de plaidoyer de RSF Jeanne Lagarde, et du journaliste d’investigation malien David Dembélé, désormais exilé, qui a témoigné des conditions d’exercice du journalisme dans ce pays du Sahel. 

Au cours de cet événement, RSF a pour objectif de rencontrer les délégations de plusieurs États du Sahel et alentours, afin de leur présenter la Déclaration et d’obtenir, à terme, leurs signatures. 



Les dix engagements de la Déclaration sont basés sur des principes de protection pour permettre aux journalistes de remplir leur fonction sociale en travaillant librement. Les pays signataires consentent à mettre tout en œuvre pour :

1. Reconnaître et garantir le droit à l’information défini par la Déclaration internationale sur l’information et la démocratie comme “la liberté de rechercher et de recevoir des informations fiables et d’y accéder” ;

2. Autoriser l’accès des journalistes aux zones à risque, telles que les zones de conflit, tout en assurant leur sécurité ;

3. Garantir que la diffusion d’informations d’intérêt public, en particulier s’agissant d’opérations militaires ou sécuritaires, ne soit pas interrompue ;

4. Mettre fin à l’impunité des attaques verbales et agressions physiques dont font l’objet les journalistes et s’assurer que leurs auteurs sont poursuivis pénalement ;

5. Garantir un accès continu à Internet, en particulier durant les périodes d’intense mobilisation sociale comme les élections ou les manifestations publiques ;

6. Aligner les lois qui encadrent les communications électroniques sur les normes internationales les plus protectrices pour la liberté d’informer des journalistes et le droit à l’information ;

7. Adopter des lois sur l’accès à l’information publique, en conformité avec les normes internationales en vigueur ;

8. Promouvoir la qualité de l’information et les sources fiables à travers la reconnaissance de la Journalism Trust Initiative (JTI) comme norme de référence; 

9. Soutenir le développement d’une agence régionale de soutien aux médias dont le mandat contribue à protéger la liberté de la presse et le droit à l’information au Sahel, ainsi que l’indépendance et la soutenabilité des médias locaux ;

10. Collaborer de bonne foi avec les organes internationaux et régionaux indépendants compétents, en particulier le rapporteur spécial pour la liberté d’expression et l’accès à l’information en Afrique aux fins de la mise en œuvre de ses recommandations.

REPORTERS SANS FRONTIÈRES