L’Assemblée générale hebdomadaire du Mouvement démocratique libéral (MoDeL) s’est tenue samedi 14 décembre à Nongo, dans la commune de Ratoma. Présidée par son leader Aliou Bah, de retour au pays après un séjour à l’étranger, elle a été axée sur ses propos controversés concernant les médias et par une discussion sur les menaces pesant sur sa personne.

Lors d’une récente interview sur TV5 Monde, Aliou Bah avait déclaré : « Les médias qui exercent actuellement en Guinée ne sont pas écoutés. » Une affirmation qui a provoqué un tollé dans la presse guinéenne. À l’Assemblée générale, il a tenu à s’expliquer devant ses militants et des journalistes. « Je veux que les gens comprennent clairement que l’objectif est de dénoncer les conditions difficiles dans lesquelles les médias travaillent, même ceux qui sont actifs. Vous prenez beaucoup de risques pour exercer votre métier, et cela ne vous met pas à l’abri », a-t-il expliqué. Pour appuyer ses propos, il évoque la disparition récente du journaliste Habib Marouane Camara, dans des conditions troubles. « Il y a quelques jours, l’un de vos collègues journalistes a été kidnappé. Il n’est pas activiste de la société civile. Alors, il ne s’agit pas de sortir une phrase de son contexte. Mon constat est qu’il existe un problème global avec le respect de la liberté d’expression, comme il en existe au niveau politique », a-t-il ajouté. Aliou Bah a réaffirmé l’importance des médias dans la société : « Les médias sont l’interface entre les autorités publiques, les hommes politiques, les activistes de la société civile et la population. Sans vous, il n’y a pas de pays. »

Menaces et défi de rester en Guinée

Depuis plusieurs jours, le MoDeL communique sur des menaces d’enlèvement visant son président, le MoDeL a porté plainte contre X le 9 décembre, alors qu’Aliou Bah regagnait Conakry le jour même. Samedi 14 décembre, des militants lui ont exprimé leur inquiétude et ont suggéré de quitter la Guinée, pour éviter d’être enlevé. Aliou Bah a fermement rejeté la proposition. « L’exil n’est pas une option envisageable. Le changement en Guinée ne peut s’opérer qu’en étant sur place, et non depuis l’étranger. Chaque fois que la situation devient difficile, certains choisissent de partir ou de se taire. Mais est-ce que ces deux options ont fait avancer la Guinée ? On ne peut pas emprunter le même chemin et espérer une destination différente. Partir n’est pas la solution, l’exil n’est pas la solution. Il faut affronter les problèmes et parfois les contourner, pour adopter une meilleure stratégie. C’est cela, la responsabilité. »

Il décoche des flèches

Le président du MoDeL a profité de la réunion pour dénoncer ce qu’il appelle la perpétuation d’un système dictatorial en Guinée. « Depuis plus de 60 ans, le système de gestion de la chose publique en Guinée a été marqué par la dictature. Comment peut-on espérer que cela change comme par magie alors que les racines de ce mal sont profondément ancrées dans notre pays ? » Il a accusé les autorités de la transition de vouloir reproduire ce modèle de gestion. « Aujourd’hui, nous avons des dirigeants qui revendiquent cet héritage, qui veulent reproduire la dictature et s’y maintenir. Allons-nous accepter cela ? »

Un engagement réaffirmé

Aliou Bah a appelé la jeunesse guinéenne à se mobiliser et à rejeter la confiscation du pouvoir : « La dictature, la confiscation du pouvoir peuvent-elles encore assurer la prospérité des Guinéens ? Comment la jeunesse peut-elle s’en sortir avec des dirigeants non élus, sans notion de gouvernance publique, qui ne misent que sur la force pour s’imposer ? Il faut faire un choix : soit nous avançons, soit nous restons prisonniers des mêmes conditions que nos parents et grands-parents ont connues. »

Malgré les menaces et les controverses, Aliou Bah réaffirme sa détermination à poursuivre le combat politique sur le terrain. Son discours a été accueilli par des applaudissements nourris. Incarne-t-il l’espoir d’un changement en Guinée ? L’avenir le dira.

Abdoulaye Bah