La Cour de répression des infractions économiques et financières, Crief, a rendu sa décision dans le procès opposant Mohamed Diané à l’État guinéen, mercredi 18 décembre. L’ex-ministre de la Défense nationale et des Affaires présidentielles est condamné à 5 ans de gnouf.
Personne ne se faisait des illusions sur la condamnation de Mohamed Diané. Même pas son avocat, maître Sidiki Bérété qui déclarait, avant même la décision, s’être rendu à la Crief pour écouter «une décision de condamnation politique». La Chambre de jugement de la juridiction n’est finalement pas allée de main morte. Le juge, Yacouba Conté, a collé à l’ex-lieutenant d’Alpha Grimpeur 5 ans d’emprisonnement et une amende de 5 milliards de francs glissants. Il ordonne aussi la confiscation des biens du prévenu se trouvant à Kankan et à Cona-cris, faisant objet de saisie depuis son arrestation en 2022.
Mohamed Diané est condamné pour «détournement de deniers publics, enrichissement illicite et blanchiment de capitaux.» Les parcelles appartenant à sa douce moitié et à ses enfants sont, quant à elles, exemptées. Yacouba Conté ordonne aussi le gel au profit de l’État de 5 comptes bancaires ouverts dans les livres de différentes banques de la place par le prévenu et contenant respectivement 1 milliard de francs glissants, un peu plus de 300 millions de francs glissants, 70 000 et 60 000 dollars ricains.
Sur l’action civile, le parquet spécial et la partie civile sont reçus dans leurs prétentions. Par conséquent, Mohamed Diané est condamné au paiement de 500 milliards de francs glissants comme dommages et intérêts. Le juge ordonne, en outre, le versement du 1/4 de ces dommages en dépit de tout recours.
La Chambre de jugement estime, pour ce qui est du détournement de deniers publics, que le prévenu n’a pu justifier le gap de 500 milliards de francs glissants constatés entre les fonds qu’ils a gérés pendant les 11 ans de règne d’Alpha Grimpeur et les dépenses effectuées.
S’agissant du chef d’inculpation d’enrichissement illicite, Mohamed Diané n’aurait pas convaincu les robins sur l’origine licite de ses biens. Les juges sont aussi convaincus qu’une partie de sa fortune proviendrait d’activités illicites. Ils ont donc suivi presqu’à la lettre les réquisitions du mystère public, pour n’accorder aucune circonstance atténuante au prévenu.
La décision de la Crief ulcère l’avocat de la défense. Me Sidiki Bérété promet d’interjeter appel : «C’est une honte, un jour sombre pour la justice guinéenne. Nous allons relever appel, tôt ou tard, le droit va triompher.» Chez la partie civile, c’est la joie, du moins, en partie : «La Crief vient de sonner le glas de l’impunité. Comment un enseignant qui n’avait même pas une case en 2010 peut avoir des biens immobiliers dans tout Conakry, acheter la moitié de la ville de Kankan ? », s’exclame Me Pépé Antoine Lama. L’avocat conteste cependant le fait que la Chambre ait décidé d’exclure la confiscation des biens de l’épouse et des enfants du prévenu : «Nous considérons que tout cela appartient à Mohamed Diané. L’épouse et les enfants n’ont pas le moyen financier de s’offrir tous ces biens», a-t-il indiqué.
En détention depuis mai 2022, Mohamed Diané a refusé de se prêter aux questions de la Cour. Il dit ne pas faire confiance à la justice. Il a exigé l’application de l’ordonnance de mise en liberté rendue en sa faveur par la Chambre de contrôle de l’instruction, mais aussi de l’arrêt de la Cour de justice de la CEDEAO intimant les autorités guinée-haines à le libérer, lui et d’autres dignitaires de l’ancien parti au pouvoir, le RPG arc-en-ciel.
Yacine Diallo