Le 24 décembre, le président de la Cour de répression des infractions économiques, Crief, a annoncé avoir dessaisi le juge Yagouba Conté du dossier Ibrahima Kassory Fofana. Francis Kova Zoumanigui motive sa décision par les suspicions du parquet spécial. Après la récusation du juge Yagouba Conté en charge du procès de l’ancien Premier ministre, Ibrahima Kassory Fofana, les avocats de la défense ont animé un point de presse mercredi 24 décembre, à la Crief à Kaloum. Ils dénoncent un procès politique, estiment que leur client est victime de chantage et d’harcèlement. 

Me Dinah Sampil reconnaît que le droit de récusation existe pour toutes les parties à un procès. Mais, estime-t-il, il faut l’exercer dans les règles prévues à cet effet. «Même quand c’est son droit, l’exercice peut faire que vous tombez dans les travers. Je précise que c’est sur le fond, un juge du fond peut être récusé. La forme ne préjudicie en rien au fond d’un dossier. Autoriser Kassory à se soigner ne change pas le contenu du dossier. Ça n’empêche pas, quand les preuves sont là, de le condamner. Comme cela ne peut pas empêcher aussi, quand les preuves ne sont pas là, de le relaxer. Mais en attendant qu’on examine le fond, il doit se soigner, parce qu’il est malade. Mais pourquoi lui refuserait-on cela? »

Dire que Kassory Fofana serait en affinité avec le juge n’est pas vrai, déclare l’avocat. Selon lui, Yagouba Conté a été récusé seulement pour ne pas qu’il aille, dans son arrêt, jusqu’au bout et indique un centre hospitalier où doit se soigner l’ancien PM. Me Sidiki Bérété s’en prend au procureur spécial : «Je crois que c’est trop spécifique. Il dit que s’il n’y a pas de centre indiqué, il n’exécute pas. C’est un jeu malsain et déloyal. C’est très petit de sa part parce qu’il s’agit d’une question de santé». Et d’enfoncer le clou : «Autant la partie défendresse est soucieuse que le dossier soit vite examiné, autant le poursuivant doit être soucieux de l’examen rapide du dossier pour qu’un innocent qui serait détenu ne dure pas en détention, ça m’a surpris. Et on ne peut pas vouloir d’une chose et de son contraire en même temps.»

Une justice sous ordre ?

Maître Dinah Sampil, excédé par la tournure des événements, se demande pourquoi Aly Touré se donne autant de mal pour maintenir Kassory Fofana en détention : «Pourquoi le procureur spécial est l’éternel capitaine de ce bateau ? Il y a les droits civils et les droits civiques. Les droits civiques sont suspendus lorsque leur auteur a écopé d’une certaine condamnation. C’est facile de se servir de la justice pour les nuire. Quand bien même les causes ne sont pas vérifiables, n’existent pas. Amener un juge inconscient à prononcer une condamnation pour que la victime soit éliminée est un jeu politique pour lequel on a recours à la magistrature. C’est pourquoi, lorsqu’une justice, au lieu d’être à l’ordre, est sous ordre, elle devient dangereuse.»

Mamadou Adama Diallo