La réhabilitation de la route nationale N°3 reliant Kagbélen à  Tanènè via Dubréka a été officiellement lancée le 23 septembre dernier. Deux mois après, la réalité déçoit les riverains et usagers, à cause du calvaire auquel ils font face. Une situation identique à celle de la saison des pluies.

C’est terminé la saison des fortes pluies. Place à la saison sèche en Guinée. Mais rouler sur la RN N°3, relève d’un véritable parcours du combattant. Embouteillages monstres, nuages de poussière, pannes régulières et parfois accidents sont le quotidien de ceux qui empruntent cette voie. Les motards passent près d’une heure pour faire les 13 Km reliant Dubréka-centre à Kagbélen. En voiture, la durée du trajet est de 2 heures. Si l’on note la fermeture de quelques trous, la dégradation du tronçon reste quasiment inchangée. Les nids-de-poule, nombreux et de plus en plus dangereux, entravent la circulation et multiplient les risques d’accidents, tandis que les nuages de poussière rendent l’air irrespirable et envahissent les habitations.

Lenteur des travaux ?

Les travaux de reconstruction de la route sont confiés à la société chinoise CBITEC (China Bengbu International Technology and Economic Cooperation) depuis juillet dernier. Sur le terrain, les ouvriers sont bien visibles et les machines tournent, mais les progrès sont lents et loin de répondre aux attentes des usagers et riverains. Ceux-ci se demandent si le chantier n’est pas simplement une promesse électorale, un projet de campagne dont l’exécution avance à pas de caméléon. Le rythme des travaux est critiqué par certains habitants, qui y voient une mauvaise gestion. En certains endroits, ce sont les riverains eux-mêmes qui ont pris l’initiative, pour faire face à la poussière.

Mamadou Mouctar Diallo, chauffeur de taxi, déplore les conditions de vie des usagers de la route. « La poussière nous tue », dit-il. Il accuse le maître d’œuvre  de n’arroser que les sections où il intervient. « Les trous ont été fermés, mais la poussière et le risque d’accidents demeurent ». Le chauffeur accuse l’absence de déviations qui complique davantage la circulation et augmente les dangers. « Ils ont commencé les travaux sans mettre en place de déviations, du coup, les agents chargés de réguler le trafic extorquent de l’argent aux chauffeurs, s’ils demandent à passer sur les parties bouchées ». Mouctar Diallo insiste sur le fait que l’absence de déviations aggrave la situation.

Mamy Joseph Yoko, conducteur de moto-taxi, habitant à Dubréka, se dit très préoccupé. L’état de la route représente un danger pour sa sécurité et nuit à son activité professionnelle. « Je ne peux pas faire payer 20 à 30 000 GNF à mes clients, pour les emmener à Dubréka-centre, à cause de l’état de la route. Pourtant, c’est ici que je gagne ma vie. Je me demande que faire…» Mamy Joseph se réjouit de voir les travaux démarrer, mais insiste sur le fait que l’État doit veiller à ce qu’ils se poursuivent dans de bonnes conditions et qu’elle soit de qualité, pour éviter que les usagers ne se retrouvent dans la même situation dans quelques mois.

Ageroute et Acgp se murent dans le silence

Malgré les préoccupations des usagers et des riverains, les responsables de l’Agence de gestion des routes (Ageroute) et de l’Administration et du contrôle des grands projets (ACGP), rencontrés sur le chantier, préfèrent garder le silence. « Nous ne parlons pas à la presse sans l’autorisation préalable du ministère des Travaux publics. Allez chercher un ordre de mission et revenez nous voir ! À défaut, nous ne pouvons rien vous dire », nous a lancé l’un d’eux.

La réhabilitation de la route N°3 est un vaste chantier qui conduit au « poumon économique » du pays, Boké, ville minière. Les riverains et usagers pris au piège par la poussière et les embouteillages gardent l’espoir d’une amélioration significative des conditions de circulation sur cet axe. Avant la fin du chantier, les habitants de Kagbélen, Dubréka, Tanènè, la liste n’est pas exhaustive, souffrent le martyr.

Abdoulaye Pellel Bah