En Guinée, le juge ayant autorisé l’évacuation sanitaire de Kassory Fofana, poursuivi pour détournement de deniers publics, enrichissement illicite et corruption, a été récusé, s’est insurgé l’avocat de l’ancien Premier ministre (2018-2021). « On a, à notre tour, formulé une récusation contre » le « juge qui est venu en remplacement », a indiqué Maître Dinah Sampil. L’ex-chef du gouvernement avait été hospitalisé peu après son arrestation, en avril 2022.

En Guinée, l’ancien Premier ministre Ibrahima Kassory Fofana ne sera finalement pas évacué à Paris. Poursuivi pour détournement de deniers publics, enrichissement illicite et corruption, l’ex-chef du gouvernement a été hospitalisé peu après son arrestation, en avril 2022. Depuis, ses avocats affirment que son état de santé l’empêche de comparaître devant la Cour de répression des infractions économiques et financières (Crief) et nécessite une évacuation à l’étranger.

Le mois dernier, la Crief a finalement ordonné cette évacuation sanitaire à l’Hôpital Américain de Paris. Mais, quelques jours plus tard, cette décision a été annulée à la suite de la récusation du juge.

Maître Dinah Sampil, avocat de Kassory Fofana, affirme : « Le juge, parce qu’il a simplement eu le courage d’ordonner l’évacuation de Monsieur Fofana, a été récusé. Parce qu’il n’a pas suivi les recommandations du procureur spécial, qui est toujours opposé à cette évacuation. Le juge, qui est venu en remplacement, s’est laissé entraîner par le procureur spécial pour prendre une audience le 31 alors que le renvoi avait été fait pour le 6 janvier. Il prend cette audience pour décider de la comparution personnelle de Kassory. Il est conscient de la maladie de Kassory et de l’impossibilité pour lui de s’asseoir et, à plus forte raison, de se tenir debout. »

Il poursuit : « Donc, lorsqu’on a compris que lui est à la disposition du procureur pour entériner sa volonté, et ce au détriment des lois de la République, on a, à notre tour, formulé une récusation contre lui qui est un examen : est-ce que le président de la juridiction fera comme il l’a fait lors de la requête du procureur, à savoir accepter la récusation du juge qui est venu en remplacement du premier ? Nous en sommes à ce niveau. »

Pour rappel, l’ancien Premier ministre et deux autres anciens ministres du régime d’Alpha Condé, sont poursuivis pour détournements présumés de fonds publics, enrichissement illicite, blanchissement de capitaux et complicité devant la Cour de répression des infractions économiques et financières (Crief), mise en place par la junte au pouvoir à Conakry depuis septembre 2021.

Après l’avoir entendu sur son lit d’hôpital il y a un mois, la chambre de jugement de la Crief avait ordonné le transfert d’Ibrahima Kassory Fofana « dans un centre hospitalier spécialisé », donc mieux équipé pour prodiguer les soins appropriés à l’ancien Premier ministre, qui n’a jamais répondu aux convocations de la Cour du fait de son mauvais état de santé, expliquent ses avocats. Kassory Fofana avait opté pour l’Hôpital américain de Paris, où sa maladie avait été initialement diagnostiquée.

Mais, juste avant le Nouvel An, le juge Yacouba Conté, qui présidait la chambre de jugement, a été récusé, puis remplacé par Lansana Soumah. Ce dernier s’est empressé d’ordonner à nouveau la comparution en personne de l’ex-chef de gouvernement. Le procureur spécial de la Crief, Aly Touré, assume ce remplacement : « Sa manière de conduire les débats ne me rassure pas », explique-t-il à RFI, le procureur estimant que le premier juge faisait preuve d’une trop grande indulgence envers le prévenu, qui n’a jamais voulu comparaitre devant la Cour comme l’indique le droit guinéen.

Pour la défense de Kassory, qui assure que son client n’est pas en état de se déplacer, la décision du procureur va à l’encontre de la loi. Elle espère donc obtenir la récusation du nouveau juge, avant la reprise du procès prévue le 15 janvier.

Par RFI