Depuis un mois, les occupants d’une partie du marché Cosa, situé au quartier Bantounka 1, dans la commune de Lambanyi, sont sommés de libérer les lieux. Un préavis de 72 heures leur avait été donné. Mais des négociations ont permis d’obtenir un moratoire jusqu’après le mois de Ramadan.

Selon l’administratrice du marché de Bantounka 1, les responsables de la délégation spéciale de Lambanyi ont pris cette décision pour parer à toute catastrophe : « Il y a un mois, nous avons vu les autorités locales sillonner le marché. Elles ont marqué toutes les boutiques jouxtant les rails, demandant aux vendeuses de quitter les lieux dans 72 heures. Nous savons tous que c’est pour notre bien, vendre près des rails est un danger. Ils demandent de laisser 20 mètres entre les rails et le marché. Mais gérer le Guinéen est difficile. Il y a des tables vides à l’intérieur du marché, les vendeuses préfèrent s’installer près des rails. Pourtant, elles sont plus en sécurité à l’intérieur. »

Hadja Nantènin Doumbouya d’ajouter que ce n’est la première fois qu’une autorité tente de faire déguerpir ces occupants. « On avait déjà tenté de les faire installer à l’intérieur du marché, mais peu de temps après, ils reviennent. Les propriétaires de boutiques passent toujours un arrangement avec les agents pour étouffer l’affaire. Ils oublient que c’est leur vie qui est en danger. » Elle accuse aussi la mairie de Lambanyi de manquer du sérieux dans cette affaire de déguerpissement : « Si on demande à un occupant de quitter un lieu, et qu’on ne poursuive pas l’affaire, peu de temps après, ces mêmes lieux seront de nouveau occupés. Il faut un bon suivi pour que cela aboutisse. La population est difficile à gérer, mais c’est la responsabilité de l’Etat. »

Souleymane Diallo, tailleur, est concerné par l’opération. Lui ne voit aucun mal à cohabiter avec les rails : « A chaque fois, on menace de nous déguerpir. Ils viennent marquer nos magasins, mais ils ne reviennent plus. L’administratrice du marché nous a dit de décoiffer nos kiosques, de libérer les lieux. On l’a fait, mais on ne sait pas ce qu’ils veulent en faire. On ne peut rien contre l’Etat. En attendant, nous travaillons sous le soleil. Au début, ils nous ont dit de laisser une marge de 12 mètres entre les rails et nos places, nous nous interrogeons sur les motifs du déguerpissement. Les rails sont en pleine ville, forcément on va habiter près des rails ».

Mme Aïssatou Diallo

Aissatou Diallo, vendeuse de colas, partage les préoccupations de la mairie, mais elle fustige la démarche : « Je crois que l’Etat le fait pour notre bien. Si on élargit le marché, nous aurons toutes de la place à l’intérieur. Mais vouloir nous déguerpir sans nous réinstaller n’est pas une bonne idée. C’est ici que nous gagnons notre vie. »

Hadja Gnalen Traoré, vendeuse de produits cosmétiques, déplore cette situation. « Cela ne nous enchante pas. Nos maris ne travaillent pas, nous sommes à la charge de nos familles. Si on confisque nos places, comment allons-nous faire avec les enfants à l’école, la nourriture, le loyer ? Mamadi Doumbouya doit revoir cette situation, nous, femmes, sommes le pilier de nos familles. Certaines sont veuves avec des enfants, d’autres sont malades. Comment allons-nous faire si nos places sont fermées ? »

Aux dernières nouvelles, après des jours de négociations entre les autorités municipales et les occupants, un terrain d’entente a été trouvé. En lieu et place d’un délai de 72 heures, les occupants du marché peuvent rester jusqu’au 15 avril prochain. Le temps pour eux de passer le ramadan dans la tranquillité.

Kadiatou Diallo