Le collectif d’avocats de l’ancien Premier ministre, Ibrahima Kassory Fofana, a tenu un point presse vendredi 7 mars à Conakry. Ils ont exprimé leurs observations sur le jugement rendu le 27 février par la Cour de répression des infractions économiques et financières (Crief) contre leur client. Les avocats qualifient l’arrêt de la Cour « d’injuste » et y voient un « acharnement » dans ce qu’ils considèrent comme « une procédure judiciaire biaisée ».
Le dernier Premier ministre d’Alpha Condé a été condamné à 5 ans de prison ferme, pour « enrichissement illicite, détournement de deniers publics et blanchiment de capitaux ». En plus de cette peine, Ibrahima Kassory Fofana devra s’acquitter d’une amende de 220 000 euros et risque de perdre une grande partie de son patrimoine.
Une semaine après l’annonce de l’arrêt, les avocats de l’ex PM ont réagi aux déclarations du procureur de la Crief, Aly Touré. Celui-ci avait estimé que la peine prononcée était insuffisante. «Aly Touré a regretté le fait que ce ne soit que 5 ans prononcés contre notre client. Ce qui me fait penser que si la Guinée disposait du dispositif de la guillotine, il n’aurait pas hésité un seul instant à envoyer M. Kassory Fofana à cette machine de destruction vitale. » Me Dinah Sampil, seul représentant du collectif présent au point de presse, a insisté sur l’innocence de son client. « Nous sommes venus pour porter à la connaissance de l’opinion nationale et internationale que la condamnation prononcée contre Kassory est fallacieuse. Elle est ridicule. Elle est erronée » a-t-il déclaré. Me Sampil a tenté de convaincre la presse qu’aucun franc de l’État n’avait été détourné par son client et a précisé que les fonds retrouvés sur les comptes bancaires de Kassory Fofana existaient bien avant son entrée au gouvernement, provenant de ses activités en tant qu’expert international.
Parlant de l’accusation de blanchiment d’argent, l’avocat nie toute implication de l’ancien Premier ministre avec les sociétés citées lors du procès.
Une procédure irrégulière ?
Le conférencier a pointé du doigt une violation des principes fondamentaux de la justice. Selon lui, le juge ayant prononcé la condamnation était déjà intervenu dans une audience précédente, en date du 13 décembre, au cours de laquelle il avait autorisé l’évacuation de Kassory Fofana vers un centre spécialisé. « Que le même juge revienne pour se dédire et prononcer une condamnation, il va sans dire qu’il viole une règle universelle du droit », a affirmé Me Sampil.
D’autre part, Me Dinah Sampil conteste l’argument de la non-comparution du prévenu à la barre, que le tribunal a considéré comme une preuve de culpabilité. « Huit rapports médicaux ont été produits pour attester que Kassory est malade, au point qu’il ne peut ni s’asseoir ni se tenir debout. Comment peut-on alors dire qu’il a refusé de comparaître ? Il aurait été mieux qu’il affirme que Kassory était dans l’incapacité de se déplacer, ce qui a fait qu’il n’a pas pu comparaître, on l’aurait mieux compris ».
L’avocat a interpellé les autorités sur l’état de santé « alarmant » de son client, rappelant que la décision judiciaire du 13 décembre 2024, ordonnant le transfert de Kassory Fofana dans un centre spécialisé n’a toujours pas été exécutée. «Il est plus qu’urgent d’appliquer cette décision, faute de centre médical adapté en Guinée », a plaidé Me Sampil.
En attendant l’ouverture du procès en appel, dont la date n’a pas encore été fixée, les avocats d’Ibrahima Kassory Fofana espèrent obtenir une révision du jugement qu’ils trouvent « truffé d’amalgames ». Ils réitèrent leur demande pour que justice soit rendue de manière « impartiale et équitable ».
Abdoulaye Pellel Bah