Pour faire des économies, l’administration Trump envisage de suspendre des radios publiques américaines émettant à l’international. C’est le cas de la Voice of America (Voix de l’Amérique), dont les employés ont été notifiés, par email, de leur licenciement le 15 mars (weekend). Nous vous proposons le témoignage exclusif et accablant d’un des employés qui a requis l’anonymat.
« C’est exact, nous sommes en congé administratif pour l’instant. Ce qui veut dire que ce n’est pas un licenciement définitif à proprement parler. Nous allons en savoir un peu plus dans une semaine environ. Très certainement avant, car le nouveau Ministère de l’Efficacité Gouvernementale dégaine et tire plus vite que son ombre.
À savoir que ce n’est pas légal de consulter nos e-mails professionnels quand nous ne sommes pas en service. Ce qui a dû être le cas pour la majorité d’entre nous. Et pour ceux qui n’auraient pas consulté leurs emails, conformément au règlement, ils risquent de débarquer au travail lundi [17 mars], de passer la sécurité avec leur badge, et de se faire aussitôt sortir par la sécurité, voire renvoyer sur-le-champ pour avoir enfreint la règle de pénétrer dans les locaux fédéraux en étant en congé administratif. Ce n’est d’ailleurs pas la première fois que nous recevons des directives officielles de la plus haute importance, le week-end, depuis l’établissement du ministère de l’Efficacité gouvernementale (DOGE).
« C’est pire qu’une dictature »
Il semble que la légalité n’existe plus aux États-Unis en ce moment. Le département des ressources humaines applique tous les décrets présidentiels, aussi expéditifs et irréfléchis soient-ils, sans même se soucier des termes légaux des contrats concernant les employés fédéraux.
Plusieurs personnes en Afrique m’ont dit que nous vivons actuellement sous une forme de dictature aux États-Unis. Je leur ai répondu que c’est pire qu’une dictature, car c’est une grande démocratie qui viole toutes les semaines, tous les jours, pour ne pas dire toutes les heures, les fondements même de la démocratie américaine, avec toutes ses lois afférentes, son arsenal juridique incomparable, sa réglementation stricte dans le milieu fédéral, sans même être inquiété par qui que ce soit. Et le monde en est témoin.
La question des priorités gouvernementales évoquées par l’administration américaine est tout à fait légitime, mais cela ne veut pas dire que le règlement inhérent au statut de l’employé fédéral doit être bafoué, qui plus est de manière extrêmement violente et méprisante vis-à-vis du serviteur public, servant une nation entière, tout en étant conscient de sa mission.
« Le message des ressources humaines a été envoyé samedi »
Je n’ai jamais douté que ma mission était celle-ci, et pendant de nombreuses années, j’ai répondu à cette mission du mieux que j’ai pu. J’ai d’ailleurs toujours gardé à l’esprit que ma mission est dépendante de la participation du contribuable, et je l’ai personnellement évoqué et rappelé à plusieurs reprises. Je suis d’ailleurs une excellente contribuable de la société américaine, et j’étais fière de l’être. J’ai toujours été fière de pouvoir régler toutes mes factures mensuellement. Cela m’a toujours procuré un bien-être me disant que je pouvais participer au développement de mon pays.
Ce message officiel des ressources humaines a été envoyé un samedi, c’est-à-dire pendant le week-end, et il a pris effet immédiatement. Ce qui présente un problème pour les personnes qui sont en congé ou ne travaillaient pas le week-end, c’est-à-dire une majorité d’entre nous. Nous ne sommes pas censés consulter notre e-mail professionnel si nous ne sommes pas en service. Même si le monde entier est au courant, nous, nous devons nous en tenir aux seules correspondances officielles que nous recevons. C’est donc une question à poser aux juristes et légalistes. Nous avons d’ailleurs des termes à respecter pour ce que j’appelle ici un licenciement économique.
« La situation requiert l’attention des militants des droits humains »
La majorité des employés de la Voix de l’Amérique sont couverts par des syndicats. Mais les responsables de ces syndicats s’illustrent par la seule compétence suiviste de rappeler à l’employé quels sont ses droits. Ces syndicats aujourd’hui ne confrontent pas les gros bonnets de face, ils sont plutôt à même de leur cirer les souliers. On pouvait même les voir à un moment donné se faire photographier comme des copains et diffuser sur les réseaux sociaux avec les responsables fédéraux avec lesquels ils sont supposés négocier pour le bien des employés.
Je suis la première personne à considérer qu’il faut faire des économies en matière de Budget. Mais ce qui se passe actuellement aux États-Unis mérite d’être observé par les militants des droits humains. »