Pour être densément peuplé, le landerneau politique guinéen l’était. La population des formations politiques s’y était accrue de façon exponentielle au point qu’on y recensait plus de 200 partis. Ah, si le ridicule tuait ! Mais, la Guinée n’est pas seule. L’Afrique est coutumière du fait. Sous les tropiques, on a emprunté à l’Europe son mode d’alternance politique tout en refusant de se soumettre aux contraintes requises par son fonctionnement efficace. On ne regarde donc pas ce qui se passe au-delà des mers pour s’en inspirer. Sinon, on  s’apercevrait d’une constance : l’existence de deux ou trois grands courants idéologiques. C’est le cas des Etats-Unis d’Amérique (Parti Républicain et Parti Démocrate), du Royaume-Uni (Parti conservateur et Parti travailliste), de la France (Droite et Gauche), etc. Or dans les Etats africains dont certains n’atteignent même pas dix millions d’habitants, on trouve partout une ribambelle de formations politiques.

Mettre un peu d’ordre dans ce monde d’entourloupe pour clarifier le débat politique, raffermir la démocratie et rendre plus efficace le jeu démocratique, est une nécessité. Tout le problème, ce sont l’intention et la bonne foi qui sous-tendent la démarche et qui sont reflétées par la nature des outils d’investigation et d’appréciation utilisés. Certains s’y sont déjà essayés avec plus ou moins de bonheur. Le Président Léopold Sédar Senghor avait plafonné à trois le nombre de partis dans son pays, le Sénégal. Quant à la Présidente Ellen Johnson Sirleaf elle avait insisté, entre autres mesures, sur la capacité financière des partis politiques et donc l’existence de comptes bancaires.

En Guinée, une charte des partis politiques avait été élaborée pour cadrer, autant que faire se peut, la création et la gestion des partis politiques. Cette espèce de code d’éthique qui énumérait les conditions sine qua non d’existence de tout parti mourut sous le boisseau. Hélas ! Moult formations politiques n’ont jamais possédé de compte bancaire ni disposé de bureau ni réuni de congrès constitutif ou ordinaire. Pire, elles n’ont jamais participé à aucune élection à l’échelle locale ou nationale. EIles obstruent inutilement l’espace politique. Leur existence nuit plus au jeu démocratique qu’elle ne le renforce et le consolide. En Guinée, qui ne se souvient des interminables discussions oiseuses sur la répartition de la subvention de l’Etat aux partis ? Qui ne se souvient pas de l’incapacité des partis politiques de désigner leurs représentants dans les institutions telles que la CENI, le CNT actuel ?

Dans les deux cas de figure, le refus absurde d’admettre qu’il existe bel et bien une hiérarchie entre les partis et qui octroie à certains des privilèges légitimes est à la base des désordres. Voilà pourquoi, il convenait d’aérer dans l’équité, la transparence et la justice (boussole de nos actes), le landerneau. L’évaluation organisée à cet effet fait l’objet de controverses. Certains grands partis retoqués poussent des cris d’orfraies. Ce qui ne surprend guère. Tout le monde abhorre la stigmatisation. En tout état de cause, il était tant de nettoyer les écuries d’Augias.

Abraham Kayoko Doré