Le 30 avril, à son siège de Taouyah, la Cité des sciences et de l’innovation de Guinée (CSIG), en collaboration avec l’Académie des sciences de Guinée (ASG), a organisé la première conférence sur les Données numériques et l’Intelligence artificielle (DounIA). Les organisateurs veulent faire de la rencontre un début pour le développement de l’IA en Guinée.
L’Intelligence artificielle prend peu-à-peu ses marques sur le continent africain. La Guinée ne compte pas rester en marge. Dans ce cadre, les responsables de la Cité des sciences et de l’innovation de Guinée, sous l’égide du ministère de l’Enseignement supérieur, de la recherche scientifique et de l’innovation, ont réuni à Conakry, les acteurs du secteur pour débattre des enjeux sur l’IA. Les organisateurs visent une réflexion collective, pour l’élaboration d’un « document de recommandations préliminaires et jeter les bases d’une stratégie nationale des données numériques et de l’Intelligence artificielle en Guinée. » Le thème de la conférence : Co-construire une stratégie nationale en données numériques et en intelligence artificielle (IA) ancrée dans nos réalités et nos priorités. »
La rencontre a mobilisé chercheurs dans le domaine de l’IA, venus de plusieurs pays africains, responsables d’entreprises technologiques, innovateurs, étudiants… Les membres du gouvernement, Alpha Bacar Barry de l’Enseignement supérieur, Rose Pola Pricemou des Postes et Télécoms, Benoît Kamano du Secrétariat général du gouvernement ou encore le Premier ministre, Amadou Oury Bah, qui a participé à la clôture, ne se sont également pas fait conter l’évènement. Pendant toute la journée, se sont succédé, mini-talk inspirants, panels multi-acteurs, démonstrations technologiques ou encore tables-rondes stratégiques. Les débats ont tourné autour de plusieurs thématiques : santé, justice, inclusion sociale, sécurité, défense, éducation, environnement, agriculture, secteur informel, recherche et innovation.

Un tournant
Le professeur Abdoulaye Baniré Diallo, coordinateur de la Cité des sciences et de l’innovation de Guinée, s’est félicité de l’effectivité de cette rencontre : « Dounia, dont le nom évoque la vie dans l’une de nos précieuses langues guinéennes, prend aujourd’hui une dimension nouvelle dans cette conférence. Dounia pour les données numériques et l’Intelligence artificielle, car les données et l’IA sont devenues des enjeux majeurs de notre monde moderne et représentent le chemin vers notre souveraineté technologique. » Il rappelle la place de sa structure dans les événements comme cette conférence autour des données numériques et de l’intelligence artificielle. Abdoulaye Baniré Diallo se dit convaincu la conférence cadre avec le projet Simandou 2040, notamment pour ce qui est du composant Simandou Academy, une plateforme de formation de l’élite guinéenne et africaine : « La Cité des sciences y joue un rôle central. Elle constitue l’une des armes stratégiques du Simandou Academy. Elle formera les talents de demain dans des domaines clés comme l’Intelligence artificielle, la cybersécurité, les sciences des données et les sciences environnementales, au service des besoins de l’industrie minière, agricole et économique guinéenne. »
Professeur Mamadou Aliou Baldé, président de l’Académie des sciences de Guinée, de renchérir sur l’utilité d’un tel événement en Guinée : « Cette conférence ambitionne de faire de la Guinée un laboratoire d’innovation où les technologies de pointe dialoguent avec les savoirs ancestraux, pour construire une société de savoirs authentiques. » Il met cependant en garde contre toute idée de délaisser le savoir traditionnel au profit de l’IA : « L’essor de l’Intelligence artificielle ouvre des perspectives nouvelles, mais son utilisation doit s’appuyer sur une éthique rigoureuse, pour éviter la décontextualisation des savoirs, les biais algorithmiques et préserver la transmission humaine… Nous sommes convaincus qu’en combinant technologie et sagesse ancestrale, nous pouvons bâtir une mémoire culturelle durable, sans trahir l’âme de nos civilisations. »
Souveraineté numérique
Pour la ministre des Postes, des télécommunications et de l’économie numérique, l’Afrique doit, dès à présent, prendre son destin en main. Rose Pola Pricemou estime que le continent est à un tournant à ne point rater : « Si l’Afrique ne définit pas aujourd’hui ses propres règles de l’Intelligence artificielle, demain, nos enfants n’auront d’autre choix que de suivre celles des autres. Cette vérité est au cœur même de notre engagement et justifie notre présence ici : écrire ensemble une nouvelle page de notre histoire, celle de notre souveraineté numérique. La Guinée refuse d’être en marge. Elle veut compter, innover, et surtout rayonner… Notre politique scientifique et d’innovation prévoit, à travers la Cité des sciences et de l’innovation, la mise en place de laboratoires spécialisés dans le numérique et dans l’IA, un centre de données souverain, ainsi que plusieurs centres de recherche. Ces structures porteront des projets innovants, générant des données de qualité qui pourront être traitées grâce au projet de supercalculateur. »

Alpha Bacar Barry, ministre de l’Enseignement supérieur, lui, insiste sur l’importance de l’IA dans la « construction des compétences pour que l’on puisse nous approprier cette technologie et avoir une certaine souveraineté numérique autour. Il y a aussi la traduction de l’usage de cette technologie en activité génératrice de revenus, qui capte de la valeur, crée de l’emploi et met notre pays dans un processus de croissance économique autour des technologies. »

Amadou Oury Bah, Premier ministre, a participé aux derniers échanges de la rencontre. Il souligne le rôle crucial de l’Intelligence artificielle et son importance, pour les décideurs politiques : « L’IA constitue une opportunité majeure pour accélérer la modernisation de nos administrations, améliorer l’accès aux services de base et libérer le potentiel de la jeunesse guinéenne… Le rôle du dirigeant d’aujourd’hui devient de plus en plus complexe. Il faut être au diapason des connaissances les plus pointues, parce qu’une erreur d’appréciation peut freiner l’évolution de toute une société, de tout un pays. C’est avec plaisir, en tant que Premier ministre, chef du gouvernement, d’écouter des experts qui en savent suffisamment sur l’Intelligence artificielle, pour me permettre de modeler mon niveau de connaissance de ce sujet, afin de prendre les bonnes décisions dans l’intérêt du pays, pour son progrès et pour le développement des sciences. »
Yacine Diallo