L’image est saisissante : sorti de l’Aéroport international de Gbessia en compagnie de ses coéquipiers du Hafia FC, Soriba Soumah dit Édenté brandit le trophée Kwame Nkrumah gagné quelques jours plutôt à Kampala. Nous sommes en décembre 1972. Notre club champion, sous la houlette de son valeureux capitaine, vient de conquérir de fort belle manière son premier titre de champion d’Afrique.

Dans son ouvrage, Sport et politique en Afrique, le Hafia football club de Guinée (2008, Harmattan Guinée),Cheick Fantamady Condé donne un aperçu de la contribution du capitaine Edenté lors de cette mémorable finale, en ces termes : « Parmi les artisans du sacre figurent bien évidemment les héros de légende, les figures historiques, ceux dont les noms sont indissociables de la victoire à savoir : le capitaine Soriba Soumah Edenté, sûr, et remarquable technicien. Il s’est affirmé dans son nouveau rôle de défenseur central après avoir joué en attaque et au milieu de terrain au début de sa carrière. A Kampala, Edenté a endigué avec aisance et une efficacité remarquable les nombreuses vagues offensives déclenchées par les Ougandais en milieu de première mi-temps, contribuant ainsi à leur saper le moral avant que le Hafia ne se réveille et prenne les choses en main ».

Le vendredi 11 juin 2004, à l’âge de 57 ans, Soriba Soumah Edenté s’en allait de sa belle mort. Footballeur du devoir, ce sociétaire du Hafia Football Club, triple champion d’Afrique et du Syli national a écrit avec sa génération les plus belles pages de notre football.

Trois jours après son décès, Abdoul Ly, ingénieur des mines en service au SNAPE (Service national d’aménagement des points d’eau), qui a longtemps côtoyé le défunt au quartier Madina, s’est laissé guider par son inspiration en rédigeant ces vers :

En ce vendredi saint du 11 juin 2004

Retentit brusquement la nouvelle

Fusillante et tant cruelle

S’abattant sur nos toitures

Comme une foudre

Affaissant sans droiture

Toutes nos poutres

Laissant en outre

Le monde sportif guinéen

Celui admiratif africain

Le peuple de Guinée tout entier

Dans une consternation.

Au-delà de l’émotion, il y a le devoir de mémoire que le pays doit à tous les compatriotes qui, leur vie durant, s’investissent pour la nation sans compter. A l’instar de bien d’autres sportifs, après avoir raccroché, Édenté vivait dans le dénuement le plus total. Une situation peu honorable pour ce qu’il fut. Laissés pour compte, bon nombre de nos anciens sportifs triment et ne survivent que grâce à des bonnes volontés.

Le ministère des Sports est interpellé, au premier chef, à trouver une solution durable à ce problème toujours d’actualité, connu des différents ministres qui se sont succédé. Au prix d’immenses sacrifices, ces sportifs qui ont défendu les couleurs nationales ont droit à une reconnaissance nationale. A ce titre, nos pouvoirs publics n’ont aucune excuse pour leur assurer les conditions d’une vie décente. A mercredi prochain !