Le Prési du CNT a officiellement remis le 26 juin, le projet de nouvelle constitution au Prési de la transition. En attendant sa publication, nous avons essayé d’en savoir sur son contenu.
« Excellence Monsieur le Président, ce que nous vous remettons aujourd’hui est bien plus qu’un document juridique. C’est une promesse », a clamé Dansa Courroux-mât dans son laïus de circonstance. Tout de blanc vêtu, tout comme l’hôte Mamadi Doum-bouillant, ainsi que nombre d’invités de marque (déposée) dont les CNTêtards ; les religieux ; présidents d’institutions républicaines ; membres du goubernement ou diplomates qui ont pris d’assaut le Palais Mohammed V, siège de la Présidence.
« La République de Guinée se dote d’un projet de Constitution à la hauteur de ses ambitions, fidèle à son identité, et résolument tourné vers l’avenir », a poursuivi le Prési du CNT, lequel voit en la rédaction du doc « une mission à la fois redoutable par sa complexité et exaltante par son importance ». « Car il faut le reconnaître, renchérit-il, toute œuvre constitutionnelle est un pari sur le futur. Et, selon la belle pensée de Jean-Jacques Rousseau, je cite : « l’homme est libre, mais partout il est enchaîné ». C’est à la Loi fondamentale qu’il revient d’organiser cette liberté, de l’enraciner dans l’ordre, de la protéger contre l’arbitraire, et de la projeter vers le bien commun. »
De quinquennat à septennat
« La durée du mandat du Président de la République est de cinq (5) ans, renouvelable une seule fois », disposait l’alinéa 2 de l’article 44 de l’avant-projet de constitution. Selon des sources concordantes, le mandat présidentiel est passé à sept ans après un amendement de la Présidence de la République. L’Exécutif avait par ailleurs fait sauter le verrou de la limitation du nombre de mandat, ouvrant ainsi la voie à une présidence à vie. Et dire que le CNRD a renversé Alpha Grimpeur, en réaction au 3e mandat arraché au forceps par l’ancien locataire de Sékhoutouréya ! Ou que la constitution de 2020 dissoute fixait à 6 ans la durée du mandat présidentielle !

Lors de la plénière à huis clos du CNT tenue la veille de la remise du projet au Prési de la transition, le verrou de la limitation du mandat présidentiel à deux a finalement été rétabli, confie une source proche du Parlement de transition. Après quelques tractations, « un consensus a été trouvé », précise-t-elle.
L’article 45 de l’avant-projet de constitution a aussi connu une modification au sortir du Palais Mohammed V. Le candidat à la Présidence devait obligatoire être Guinéen, né « de parents dont un au moins est Guinéen d’origine. » Désormais, la nationalité des parents ne serait plus exigée.
Tout comme la durée de résidence d’au moins deux ans en Guinée du prétendant aux plus hautes fonctions du pays.
Autre disposition retoquée, selon nos sources, la période de sureté (intangibilité) de 30 ans qu’il fallait observer avant d’envisager toute révision de la constitution (article 198 de l’avant-projet). Désormais, le texte peut être amendé à tout moment, mais pas être changé. Quelle que soient les circonstances.
Malgré ces tractations, Dansa Courroux-mât trouve qu’il n’y a pas eu d’ingérence de l’Exécutif : « Nous savons, Monsieur le Président, combien il pourrait être tentant pour un Chef d’État de s’ingérer dans l’élaboration d’une Constitution. Mais vous, vous avez préféré la voie de l’exemplarité. Vos plus proches collaborateurs ont agi dans la même philosophie : celle du respect des institutions, de l’écoute vigilante, du conseil avisé. »
Étapes d’élaboration du projet de constitution
Le Prési du Conseil national de transition a saisi l’occasion pour rappeler le cheminement suivi pour élaborer le texte constitutionnel : Consultation populaire à travers le pays entre février et mars 2022 ; Forum interreligieux organisé en juillet 2022 ; Assises nationales, Cadre du dialogue inclusif ; Symposium sur le constitutionnalisme ; Débat d’orientation constitutionnelle.
« À l’issue de ces étapes, une commission ad hoc a été constituée pour donner forme, par le droit, à cette matière vivante. Son travail, conduit avec méthode, rigueur et humilité, a permis la rédaction d’un avant-projet original, enraciné dans notre réalité, dégagé des oripeaux de l’imitation mécanique, libéré des schémas stéréotypés », s’enorgueillit Dansa Courroux-mât.
L’avant-projet de constitution fut adopté en plénière le 25 juillet 2024, puis vulgarisé durant trois semaines à travers le bled.
« Après cette opération et sur votre recommandation, un Comité d’experts a été mis en place pour la relecture du texte. Ce comité a élaboré un rapport qui a été officiellement remis au Conseil national de la transition. L’examen et la validation des amendements apportés à l’Avant-projet de nouvelle Constitution ont eu lieu au cours d’une plénière extraordinaire à huis clos, tenue le mercredi 9 avril 2025, à l’issue de laquelle les conseillers nationaux ont adopté, à l’unanimité, le Projet de nouvelle Constitution », a-t-il ajouté.
Après sa remise officielle, le texte fera l’objet d’une campagne de vulgarisation et sera soumis au Référendum le 21 septembre prochain. « S’ensuivra l’élaboration de lois organiques qui viendra boucler le bloc de constitutionnalité. Plus loin, l’on veillera à l’éducation et à l’enseignement de la constitution pour son appropriation », annonce le Prési du CNT.
Avant de terminer son laïus, ce dernier a mis en exergue les « innovations majeures » du projet de constitution : obligation de couverture santé universelle ; scolarité obligatoire jusqu’à 17 ans ; création d’un Sénat ; introduction de la candidature indépendante à la présidentielle ; audition obligatoire des cadres avant leur nomination ; instauration du service civique obligatoire pour tous les jeunes…
Diawo Labboyah