Lors d’une conférence de presse tenue mercredi 4 juin à la Primature, à Conakry, le Premier ministre guinéen, Amadou Oury Bah, s’est exprimé sur les enjeux économiques du pays dans un contexte marqué par une exploitation intensive des ressources minières. Il a souligné la nécessité urgente de diversifier l’économie nationale. Le chef du gouvernement a insisté sur l’importance de favoriser la transformation locale des minerais, afin de créer plus de valeur ajoutée sur le territoire guinéen, générer des emplois et renforcer la souveraineté économique du pays.
Selon le Premier ministre, l’assainissement du cadastre minier n’est pas simplement un assainissement en quantité, mais un assainissement permettant de mettre en œuvre une nouvelle stratégie du développement minier pour qu’il y ait une transformation de nos ressources sur place pour une création de valeur ajoutée beaucoup plus importante. Il estime que cela permettra de hisser le pays dans une dynamique industrielle et non dans une dynamique d’économie de rente uniquement basée sur les ressources minières de base. Même que cet aspect est de loin très important pour l’avenir de la Guinée. « L’autre aspect que j’aurai à développer avec vous, c’est surtout le contexte de ces mesures qui doivent nous permettre d’asseoir une économie diversifiée, mais également avec une gouvernance vertueuse prenant en compte l’indispensable nécessité de réformer nos rouages économiques, réformer notre manière de faire. Et c’est dans ce cadre que s’inscrivent, par exemple, les réformes et les programmes que nous sommes en train de mettre en œuvre et notre recherche du programme avec le Fonds monétaire international. Nous estimons, au niveau du gouvernement, que la culture économique n’est pas suffisamment partagée. On s’intéresse beaucoup plus à des aspects périphériques, mais les aspects essentiels que constituent les questions économiques ne font pas l’objet de partage, d’échange et de discussion ».
De la pénurie de ciment
Amadou Oury Bah admet qu’il y a pénurie de ciment en Guinée, mais il qualifie cette pénurie de momentanée et conjoncturelle. « Les besoins ont été sous-estimés. Nous avons peut-être encore un regard tourné vers le rétroviseur et non pas un regard vers l’avant. Il faut savoir que l’économie de ce pays est en train de se transformer en profondeur. Près de 7% de taux de croissance pour 2024. Deux chiffres pour l’année prochaine. Si cette année, nous n’atteignons pas les deux chiffres, [nous devons l’atteindre] en 2026. Un niveau d’inflation avec le rabaissement, c’est-à-dire en prenant en compte, disons, les indicateurs et les statistiques sur l’ensemble du territoire de 3%. Cela veut dire que nous avons un taux d’endettement relativement modéré en nous comparant aux autres pays, économiquement comparables et aux pays limitrophes. Ce sont des atouts majeurs. Il faut que les gens se rendent compte que nous sommes dans une phase d’accélération du développement économique de la Guinée avec des nouveaux besoins qu’il faudra satisfaire. D’où la nécessité pour des industriels déjà installés d’investir pour développer de nouvelles capacités de production. Et s’ils n’y parviennent pas, il va de soi que d’autres unités industrielles dans le même secteur, vont émerger. Donc, nous sommes dans cette situation qui est une vision positive du processus de changement qui est en train de s’inscrire dans la durée ».
Manque de liquidité à la Banque centrale
Amadou Oury Bah pense que le manque de liquidité à la Banque centrale est un phénomène qu’il faut ausculter avec rigueur et sérieux. « Nous sommes dans une phase de basculement. Nous sommes dans un pays qui, il y a quelques mois, le taux de croissance économique était, en moyenne, si tout se passait bien, aux alentours de 4%, 3%. Malgré une conjoncture particulièrement difficile en début d’année 2024, la Guinée est sortie avec un taux de croissance qui est avoisiné de 7%, ce qui est extrêmement exceptionnel. Donc, il y a des chantiers d’envergure dans le pays qui nécessitent, à ce niveau-là, des ajustements à tous les niveaux. Dans ce contexte, une monnaie fiduciaire très importante pourrait ne pas satisfaire les besoins de cette économie. » D’où la nécessité, selon le PM, de faire en sorte de satisfaire en termes de moyens de paiement et des usagers comme par le passé, de réfléchir et de changer de méthode et de changer aussi de stratégie en la matière. « Je dois vous avouer qu’on va se retrouver avec des acteurs du monde économique qui travaillent sur cette matière, c’est-à-dire la monnaie, pour approfondir nos réflexions et envisager, dans les prochains jours, des pistes permettant de résorber cette crise de liquidité qui affecte tout le monde ».
Ibn Adama