Aminata Conté, bébé de 6 mois, est morte carbonisée dans l’incendie d’un abri à Younoussayah, dans la préfecture de Boffa le 24 mai dernier. Suspecté d’être l’auteur de ce crime crapuleux, Macky Condé croupit en prison à la Maison centrale de Boffa. Mais la famille de la victime s’impatiente et soupçonne les autorités à tous les niveaux de mettre le pied sur l’affaire.
Le drame ne découle nullement d’un conflit entre éleveurs et agriculteurs dans la sous-préfecture de Lisso à Boffa. Fatoumata Kaba, mère de la défunte et Macky Condé, suspect n°1 dans l’affaire, ont leurs champs qui se jouxtent. Le second, instituteur communautaire, accuse, depuis l’année dernière, la première de laisser son troupeau ravager son champ. Cette année, il l’aurait mis en garde avant d’entamer ses travaux. Mais son champ aurait une nouvelle fois été détruit. Sous l’effet de la colère, il aurait menacé Fatoumata Kaba le jour du drame: « Il a dit à Mme Kaba : Vous refusez d’éloigner vos bœufs, cette fois-ci, je suis prêt même à poser des actes qui me conduiront peut-être en prison », explique Younoussa Conté, oncle de la victime. Après la discussion, alors que la mère avait laissé ses deux enfants sous un abri en paille pour se rendre au marigot, le feu se serait déclenché: « La première fille, 7 ans, a fui. Le bébé y a perdu la vie, complètement carbonisé », ajoute-t-il. Macky Condé, présent pendant l’incendie, aurait non seulement refusé de porter secours à l’enfant, mais il aurait par la suite pris la poudre d’escampette, pour se réfugier dans un village voisin.
Considéré comme le premier suspect, Macky Condé a été arrêté quelques jours plus tard. Il est sous mandat de dépôt à la prison civile de Boffa depuis le 16 juin dernier. Mais la famille victime estime que les choses ne se déroulent pas comme cela se doit. Younoussa Conté accuse les autorités, le président de la délégation spéciale notamment, de chercher à étouffer l’affaire: «Nous nous sommes plaints à la justice, mais les autorités, politiques et administratives, ne fournissent aucun effort pour que l’affaire se décante. Et cela fait deux mois que ni le préfet ni le maire ne sont venus nous consoler. Nous nous interrogeons sur certains faits.»
Soupçonné de pousser pour un règlement à l’amiable, de privilégier la cohabitation et la cohésion sociale à la justice, le président de la délégation spéciale de Lisso, dément. Ibrahima Sory Conté dit plutôt avoir laissé l’affaire à la justice: «Je ne peux pas bloquer une affaire qui concerne directement ma famille. Celui qui a perdu sa fille est mon grand-frère direct, quel intérêt aurais-je à interférer dans une affaire judiciaire ? Nous avons fait notre travail, le suspect est arrêté, le reste appartient à la justice.»
Le procureur de la République près le tribunal de première instance de Boffa confirme l’arrestation de Macky Condé. Aboubacar Kourouma justifie la lenteur de la procédure par les besoins d’enquête: «Si quelqu’un l’avait vu brûler le hangar, cela aurait été plus facile. Mais là, il nie tout, c’est sa parole contre celle des accusateurs. Il faut donc des enquêtes, le dossier est sur la table du juge d’instruction et le suspect est en prison», s’est-il confié à notre rédaction. Il promet un procès dès que possible.
Yacine Diallo