Depuis le lancement tambour battant de la campagne référendaire, le 31 août, le Comité national du rassemblement pour le développement et le goubernement Amadeus Oury Bah s’activent à travers le bled pour glaner un « Oui » à la nouvelle Constitution. Leur bilan élogieux est mis à rude épreuve par les dures réalités du terrain.

Partout où ils passent, les émissaires de Mamadi Doum-bouillant, vêtus d’uniformes (t-shirts, casquettes) avec des banderoles aux slogans ronflants, à bord de teufs-teufs rutilants, appellent à tout va, à un vote massif pour la future ex-nouvelle Constitution. La campagne, c’est l’occasion pour les en-haut-des-en-haut de se rendre dans les buissons reculés. Un véritable casse-tête chinois.

Les équipes doivent affronter des routes boueuses, caillouteuses, fortement dégradées, pour aller à la rencontre d’un populo assoiffé de bonnes routes, d’eau, d’électricité… Bref, de meilleures conditions de vie. Par rapport aux routes, le goubernement semble faire face à l’effet boomerang.

En avril 2023, à l’occasion de l’inauguration du pont Paul Gaga-mais à Kagbélen, le ministre des Infrastructures et des Travaux poussifs d’alors affirmait que le goubernement allait investir au titre de l’exercice budgétaire 2023, plus de 4 000 petits milliards de francs glissants dans les travaux publics. Le Premier ministre aussi de l’époque, Nanard Goumou, ajoutait qu’en « deux ans, 2 252 kilomètres de routes ont été réalisés. » C’est leurre du bilan.

Claque en pleine figure

Malgré ces déclarations lénifiantes, les routes sont aujourd’hui quasi impraticables à l’arrière-bled, des ponts ont foutu le camp, empêchant toute circulation. Le ministre Sécréteur général de la Présidence de la République et l’ex-PM, Nanard Goumou, entre autres, en ont fait les frais.

Lors de son safari dans la région forestière, au sud du bled, pour promouvoir le « Oui » au référendrôle du 21 septembre, la délégation du gêné-râle Amara Cas-marrant s’est heurtée à une impasse, dans le village de Irié, sous-préfecture de Sérédou (Macenta). Son teuf-teuf rutilant a dû faire demi-tour, impuissant. Un pont ayant cédé sous la pression des eaux a coupé la route en deux. Amara Camara est resté pantois face à la situation.

Début dans un pickup, il a tenté de rassurer le populo. La vidéo de la scène fait le tour des réseaux sociaux: «On a voulu venir parmi vous (sic). Monsieur le Gouverneur travaille ici depuis ce matin. Les forces de défense et de sécurité sont également à vos côtés. L’administration est présente. On fera tout pour débloquer la situation. Ce n’est pas volontaire, mais on prendra des dispositions. On s’est arrêtés juste, parce qu’on ne pouvait pas passer sans vous présenter des excuses. On est venus travailler. Ici, on ne vous parlera pas de Constitution, on parlera de vos difficultés, que nous partageons. On ira dans une de vos localités, pour vous parler de la Constitution. On est venus pour vous présenter des excuses», a-t-il insisté devant la foule. Et d’ajouter: «On prendra des solutions, pour que chacun puisse aller librement dans sa maison. On va replier sur Sérédou et Macenta, pour trouver le plus grand nombre de sachets d’eau et de pains, pour ceux qui ont passé la journée ici.»

Zogo tôt ou tard

L’ex-PM, Nanard Goumou, a aussi savouré le bilan de sa goubernance, ainsi que de celui de son héritier. Engagé dans la campagne référendaire, il se fait appeler «Messager du Général Mamadi Doumbouya en Guinée forestière». L’ancien locataire du palais de la Colombe a vécu un calvaire inouï en se rendant à Zogota, un buisson de la préfecture de Nzérékoré. Parti de la sous-préfecture de Kobéla, il a dû affronter la boue et les nids d’éléphants.

Muet depuis son limogeage par Mamadi Doum-bouillant en février 2024, Nanard Goumou affiche désormais un soutien indéfectible à la future ex-nouvelle Constitution. Une fois à Zogota, il a crié victoire: «Même les routes les plus difficiles ne peuvent freiner une mission de paix et d’unité du pays. Zogota mérite d’être entendu, et en tant que messager, j’ai porté la voix du Général Mamadi Doumbouya jusqu’ici. J’ai tenu à être présent pour rappeler : voter OUI, c’est voter pour que plus jamais aucune localité ne soit oubliée.» 

Il n’en fallait pas plus pour susciter des réactions pas du tout cathos sur les réseaux sociaux. Les uns flétrissent les échecs de la transition ; les autres y voient l’opportunité d’exhiber au Prési Mamadi Doum-bouillant le défi qui l’attend.

Mariama Dalanda Bah