À quelques jours du référendum prévu le 21 septembre pour l’adoption d’une nouvelle Constitution en Guinée, le Premier ministre, Amadou Oury Bah, était l’invité de l’émission ‘’Tête-à-Tête’’ de la chaîne de télé française, France 24. Il s’est exprimé sur la tenue du scrutin référendaire, la candidature éventuelle du général Mamadi Doumbouya, la mise à l’écart des opposants politiques ainsi que sur les cas des disparitions forcées, entre autres.

Plus de six millions de Guinéens sont appelés aux urnes dimanche 21 septembre, pour voter « Ou » ou « Non » à une nouvelle Constitution. Le PM Bah Oury s’est dit « très optimiste ». Confiant, il ne doute pas de l’issue du scrutin : « Ce sera un « Oui » massif, avec une participation massive. » Selon lui, le boycott ne pourra pas empêcher une forte mobilisation : « Nous cherchons une participation large, parce que c’est cela qui va conférer une légitimité certaine à la loi fondamentale et à la Constitution que la République de Guinée va se doter dans les prochains jours. »

Selon lui, le boycott prôné par plusieurs partis politiques dont l’UFDG de Cellou Dalein Diallo, le RPG-Arc-en-ciel d’Alpha Condé, l’UFR de Sidya Touré ou encore le Bloc libéral de Faya Milimono traduit une posture irresponsable. « La notion d’opposition est toute relative », a-t-il déclaré, estimant que dans le contexte actuel, « il faut que les uns et les autres acceptent de se redéfinir pour se plier au verdict des urnes ».

Le Premier ministre est allé plus loin, qualifiant d’« irresponsables » les leaders politiques appelant au boycott, même s’ils n’appellent pas à la violence : « Il y a des positions qui sont en déphasage avec la volonté majoritaire. Nous lançons le processus d’appel de la population pour une rare fois d’être en phase avec l’histoire de la République de Guinée […]. Donc à chacun son chemin, à chacun sa façon de voir les choses. » Quant aux critiques de l’opposition dénonçant une « mascarade », il répond : « Lorsqu’on dit que c’est une mascarade, cela veut dire que certains ont une idée de la Guinée d’hier, mais pas celle de la Guinée d’aujourd’hui. »

Mamadi Doumbouya candidat ?

Interrogé sur l’absence dans le texte des dispositions de la charte de transition interdisant aux membres du gouvernement transitoire de se présenter aux élections, Bah Oury a estimé que le général Mamadi Doumbouya, « comme d’autres citoyens de la République de Guinée », a le droit d’être candidat, mais que « pour le moment, cette question n’est pas à l’ordre du jour. »

À la question de savoir si la nouvelle Constitution est taillée sur mesure pour l’actuel chef de l’État, le Premier ministre a répondu qu’il fallait « donner la chance à ceux qui estiment capables d’incarner un projet de le proposer au peuple ». Et d’ajouter : « Le général Mamadi Doumbouya, au même titre que tous les autres citoyens, a le droit de proposer un projet susceptible d’accueillir une certaine adhésion. »

Quid des opposants en exil ?

Concernant les figures politiques écartées du processus électoral, comme Cellou Dalein Diallo, Sidya Touré et Alpha Condé, tous en exil, Bah Oury a rejeté l’idée d’une mise à l’écart orchestrée par la junte: « Voulez-vous qu’un ancien président restaure l’ordre ancien qui est en train de dépérir ? […] Pouvez-vous justifier le fait que des personnes qui ont maille avec la justice, qui n’ont pas été expulsées, qui, de leur propre initiative, ont accepté d’aller à l’étranger… Est-ce qu’il faudrait considérer que c’est la puissance publique qui les a mis hors de course ? C’est leur attitude, c’est leur responsabilité, c’est leur passé […] », accuse le PM.

Qui des disparitions forcées

Sur les cas de disparitions forcées notamment celles des responsables du Front national pour la défense de la Constitution, Foniké Menguè et Mamadou Billo Bah, du journaliste Habib Marouane Camara ou encore de Saadou Nimaga, ancien secrétaire général du ministère des Mines, Bah Oury a exprimé un souhait de vérité et de justice : « Au point de vue officiel, ce n’est pas de gaieté de cœur que nous avons enregistré des disparitions. Nous souhaitons et nous mettrons tout en œuvre pour que ces personnes disparues puissent être retrouvées. Je souhaite ardemment que ces personnes soient saines et sauves […]. C’est extrêmement important pour l’image de la République, pour l’image aussi de ce que nous entendons faire, parce que le projet constitutionnel indique la sacralité de la vie humaine. »

Abdoulaye Pellel Bah