La dette africaine est au centre des préoccupations des dirigeants du continent. En mai dernier, l’Union Africaine a organisé à Lomé, sa première conférence sur la dette publique.

Au cours de cette conférence tenue dans la capitale togolaise, on a appris que plus de 20 pays africains sont en situation de surendettement.

Selon Clever Gatete, Secrétaire Exécutif de la Commission économique des Nations Unies pour l’Afrique (CEA), le stock de la dette extérieure du continent s’est établi autour de 1 860 milliards de dollars en 2024, contre 1 000 milliards moins de dix ans auparavant.

Cette explosion phénoménale de la dette fait peser un risque de plus en plus grand de défaut de paiement pour plusieurs pays du continent englués dans la spirale de l’endettement.

Les principaux créanciers publics des pays africains sont entre autres la Banque mondiale, le Fonds monétaire international (FMI), la Banque africaine de développement (BAD), la Chine etc.

En dehors de ces créanciers publics, le marché international constitue le second pourvoyeur de fonds pour les pays africains. Ces derniers s’endettent énormément auprès d’une catégorie d’acteurs composés d’investisseurs privés.

Un continent qui ploie sous le poids de la dette

Entre 2015 et 2024, le continent africain a vu passer le ratio dette/PIB (Produit Intérieur Brut) de 44,4 % en 2015, à 66,7 % en moyenne.

Selon les données du FMI (octobre 2025), cette montée des ratios dette/PIB est dominée par le Soudan (272 %), suivi du Sénégal (128 %), de la Zambie (115 %), et du Cap-Vert (111 %).

Après cette catégorie de pays, s’ensuit un groupe de pays dont la dette se situerait entre 63 % et 97 % du PIB.

Des experts élèvent la voix

Récemment, un groupe de 25 experts indépendants parmi lesquels Kevin Urama, économiste en chef du groupe de la Bad, a produit un rapport sur la dette. Réunis par la présidence sud-africaine dans le cadre du G-20, ce groupe présidé par l’ancien ministre sud-africain des Finances, Trevor Manuel, a appelé à un  »allègement coordonné de la dette et à une hausse des investissements pour le développement de l’Afrique ».

 »Ce que vit l’Afrique n’est pas seulement une crise de la dette ; c’est une crise du développement », a déclaré Clever Gatete, car dans plusieurs pays africains, les budgets alloués à la santé, à l’éducation et aux infrastructures sont compromis par l’énorme service de la dette.

Voic le Top 10 des pays africains les plus endettés d’Afrique. Ce classement est établi uniquement à partir du ratio dette/PIB.

1- Soudan

Le Soudan, en guerre civile depuis plusieurs années, connaît de graves troubles économiques et financiers. Le pays connaît une situation de surendettement, avec une dette publique atteignant 253 % du PIB en 2023 selon les données du FMI. La dette est majoritairement externe, et en particulier détenue par des partenaires bilatéraux, notamment les pays du Golfe et des membres du Club de Paris.

2- Sénégal

Le cas du Sénégal est désormais connu. Selon un rapport de la banque britannique Barclays, le Sénégal a un stock global de dette de quelque 23 500 milliards de F cfa, soit environ 47,2 milliards de dollars. Cette immense dette représente 119 % du PIB du pays, faisant du Sénégal le deuxième pays le plus endetté du continent africain.

À noter que ce chiffre ne concerne que la dette de l’Etat central. La dette consolidée avec celle des structures publiques représente au total 132 % du PIB.

3- Zambie

La dette publique de cet Etat d’Afrique australe est estimée à 21,4 milliards de dollars en fin 2024, selon le Fonds monétaire international. Le rapport du FMI publié en août dernier se veut toutefois positif. La dette publique devrait s’établir à 91,1 % du PIB d’ici fin 2025, contre 114  % du PIB en 2024.

4- Cap-Vert

Situées dans l’Océan Atlantique aux larges du Sénégal, le Cap Vert, pays membre de la CEDEAO (Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest) est également un pays très endetté en Afrique. Bien que sa dette publique soit dans une tendance baissière passant de 127,5 % du PIB en 2022, à 114,0 % en 2023, elle reste cependant en dessus du seuil de 100 % du PIB, s’établissant à 109,4 % du PIB en 2024 selon les données de la BI 5- République du Congo

Bien que la dette de la République du Congo est en baisse, passant d’un ratio dette/PIB de 103,6 % en 2020, à 93,6 % en 2024, mais son niveau actuel reste encore une préoccupation pour ce pays pétrolier d’Afrique centrale.

Selon le FMI, la part intérieure de la dette a augmenté, accentuant les pressions sur le refinancement et les liquidités. Le service de la dette sur le marché régional a absorbé environ la moitié des recettes budgétaires à la fin de 2024.

6- Mozambique

Le Mozambique figure parmi les pays le plus endettés du continent. En fin 2024, la dette du Mozambique était estimée à 16,238 milliards de dollars.

En mars 2025, le gouvernement mozambicain a annoncé qu’il était incapable de faire face à ses obligations financières. Les dettes publiques ont atteint des niveaux alarmants, dépassant 100 % du PIB, selon les estimations du Fonds monétaire international (FMI).

7- Egypte

La dette publique totale égyptienne représentait environ 83 % du PIB en 2024 selon les données de la Banque centrale égyptienne. Rien que sur le premier semestre de l’exercice 2024/2025, le service de la dette a coûté à l’État 21,3 milliards de dollars, exerçant une forte pression sur les réserves de change avait noté en octobre 2025, le FMI.

8- Malawi

Avec un ratio dette/PIB de 88 %, le Malawi figure à la 8e place des pays les plus endettés du continent selon les données du FMI. Situé en Afrique australe, le pays qui a une superficie de 118.480 Km2 a une population de 22.729.000 d’habitants. En 2024, la dette du Malawi était estimée à environ 10,3 milliards de dollars.

9- Maurice

Maurice a enregistré une dette publique de 88 % du PIB en 2024 selon le FMI. Même si elle n’a pas atteint son niveau record historique de 91,90 % du PIB en 2020, cette dette quand même élevée pour un des pays d’Afrique les mieux classés en matière d’indice de développement humain et de revenu par habitant.

10- Guinée Bissau

Empêtré à nouveau dans une crise politique à la suite d’un coup d’Etat qui a interrompu le processus électoral, la Guinée-Bissau est dans une situation de surendettement, selon l’analyse de viabilité de la dette établie par le FMI en novembre 2024.

L’encours de la dette publique est estimé à 82,3 % du PIB en 2024. La dette intérieure représente à elle-seule 55,5 % de la dette totale (contre 44,5 % pour la dette extérieure) en 2023.

Les principaux créanciers du pays pour la dette extérieure sont la Banque mondiale (30,2 %) et la BOAD (Banque ouest africaine de développement) (28, 6 %).

Abdou Aziz Diédhiou, BBC News Afrique