Le 10 novembre, à la publication de la liste des candidats à la présidentielle du 28 décembre, un nom aura marqué les Guinéens: celui de Mohamed Shérif Tounkara, qui a réussi à passer le filtre de la Cour suprême, alors que bien des candidats, notamment des leaders politiques, sont recalés. Mais la surprise est d’autant plus grande que MST, comme Mamadi Doumbouya, se présente en tant qu’indépendant. Portrait d’un candidat pas comme les autres.
Jusqu’à un passé récent, Mohamed Shérif Tounkara, MST, comme l’appellent affectueusement les siens, était loin du terrain politique. Cet opérateur économique sexagénaire, né en Sierra-Leone et qui y a fait une partie de sa vie, se consacrait, depuis quatre décennies, au négoce. Il a fait du commerce son cheval de bataille, notamment des pierres précieuses. MST, peu connu des Guinéens, aurait des investissements en Guinée et dans les quatre coins du monde. Quand la présidentielle s’est profilée à l’horizon, l’homme d’affaires a décidé d’ajouter une autre corde à son arc, en se jetant dans l’arène politique. Il caresse désormais le rêve de diriger la Guinée, à l’issue de la présidentielle du 28 décembre. Novice en politique, Mohamed Shérif Tounkara justifie par sa volonté de voir une Guinée transformée: «J’ai vécu pendant longtemps à l’extérieur. J’ai mûri. J’ai jugé nécessaire de participer à cette élection, en tant que candidat indépendant, pour voir si je peux gagner et changer la donne en Guinée.»
« Il faut tout changer…»
Sur une cinquantaine de dossiers parvenus à la Cour suprême, figuraient de nombreux candidats souhaitant participer sous une bannière neutre. Ils ont vite été refroidis par la plus haute juridiction du bled, faute du pourcentage requis pour les parrainages notamment. Mohamed Shérif Tounkara, lui, n’en a pas souffert. Il est d’ailleurs le seul, outre le Président de la transition, Mamadi Doumbouya, à avoir réussi à décrocher les signatures des présidents des délégations spéciales. Et comment: «J’ai eu les arguments nécessaires pour les convaincre, ils ont adhéré. J’ai réussi à les motiver, à signer le document». Par quel moyen ? Mystère. Bien des personnes voient derrière cette prouesse la main du CNRD, pour assurer ses arrières au cas où la classe politique boycottait le scrutin. Mohamed Shérif Tounkara est sans équivoque : «C’est leur affaire. Moi, j’ai eu tous mes parrainages, le reste n’a pas d’importance.»

MST sillonne, depuis le début de la campagne le 28 novembre, pour vendre son projet de société aux populations. Ce projet de société est axé, selon lui, sur les préoccupations de la couche féminine, de la jeunesse. Il compte parmi ses priorités, la santé et l’éducation: «Le changement est nécessaire sur toute la ligne. Il faut tout changer ou améliorer», argue-t-il.
Mohamed Shérif Tounkara sait qu’il est presqu’impossible de déboulonner Mamadi Doumbouya. Mais il veut croire en sa chance : «Si je ne croyais pas en ma chance, je n’allais pas m’engager.» Battre le Président de la transition ? «Non, je ne peux pas le dire, mais je vais essayer. Je suis en train d’essayer…Je demande aux Guinéens de faire confiance en moi et en ce que je leur dis, j’ai les mains propres.»

Mohamed Shérif Tounkara n’écarte pas la possibilité de collaborer avec le vainqueur de la présidentielle. À condition qu’ils aient les mêmes visions politiques: «Cela dépendra de la personne. Si je suis dans la même ligne politique que lui, je verrais. Dans le cas contraire, je ne me mélangerais pas avec n’importe qui…Entrer dans un gouvernement juste pour entrer, c’est non. Il faut que nous ayons la même ligne politique, la même pensée.» Le lendemain du 28 décembre édifiera.
Yacine Diallo


