Un ancien ministre sénégalais des Affaires, Étrangères, sans doute l’un des plus brillants de ces dernières années dans son pays, exprime expressément son incompréhension et sa désapprobation face à la décision de la CEDEAO d’asphyxier le Mali sur le plan économique et financier, en raison de la prise du pouvoir par l’armée. Il salue la position du Président du Sénégal qui, à la différence de certains de ses pairs, a préconisé des mesures plus souples basées sur la situation particulière de ce pays. Il a invité tous les pays de la Communauté ou plus exactement les Chefs d’État- puisque la CEDEAO est devenue leur chose- à comprendre que » lorsqu’il s’agit du Mali, il y a et il y aura toujours une exception sénégalaise » et « que le Sénégal a toujours eu une tendresse particulière » pour le Mali (ancien Soudan français) avec lequel il avait formé entre 1959 et 1960 la Fédération du Mali. Il ajoute que les Sénégalais ont été d’abord des Maliens. Cheikh Tidiane Gadjo, puisque c’est de lui qu’il s’agit, parle de mesures insensées.
Ce discours, très touchant que certains pourraient qualifier de sentimental, aurait dû venir de la Guinée qui, dit-on, forme avec le Mali « les deux poumons d’un même corps ». Mais hélas, l’agenda politique amène nos dirigeants à ranger aux oubliettes la proximité historique et sociologique qui existe entre les deux pays. Pouvait-on imaginer qu’un pays comme la Guinée puisse contribuer à sanctionner le peuple malien parce que des militaires y ont pris le pouvoir ? Au fond, ce n’est même pas cette raison qui justifie la position extrême de la Guinée et de la Côte d’Ivoire dans la gestion de cette crise au sein de la CEDEAO, mais plutôt la crainte de voir le même scénario se produire dans ces pays où des projets de troisième mandat sont en cours. De nombreux Guinéens étaient remontés contre le Sénégal lorsque ce pays avait fermé sa frontière guinéenne suite à la crise d’Ebola. Or, il s’agissait d’une question santé publique. Quelle peut-être la réaction ou tout au moins la perception des Maliens quand c’est la Guinée qui a l’une des positions les plus maximalistes dans cette situation ?
Me Traoré