Les super flics Aboubacar Fabou Cas-marrant, directeur central de la police judiciaire et Mohamed Lamine Simakan, commandant de la Brigade de répression et d’intervention, BRI, sont assignés en justice par Ibrahima Diallo et Sékou Koundouno, membres de la coordination du Front national pour la défense de la Constitution.
Interrompu par la pandémie du Covid-19, le procès de ces deux gros bras de l’Alphagouvernance a repris ce jeudi, 24 septembre, au tribunal de première instance de Dixinn. Ils sont accusés de violences volontaires, d’atteinte à la vie privée, de violation de domicile et de destruction de biens. La consignation avait déjà été fixée à une misère de 500 000 francs glissants. L’audience s’est ouverte en l’absence des deux prévenus. Les plaignants, eux, étaient représentés par leurs avocats (sans vinaigrette).
Quand le juge a demandé au pro-crieur le motif de l’absence de Fabou et de Simankan, Sidy Souleymane N’Diaye a soulevé une exception d’incompétence du TPI de Dixinn : « Fabou Camara et Lamine Simankan sont, au titre du Code de procédure pénale, officiers de police judiciaire. Les articles 752 et 754 renvoient cette affaire à la Cour d’appel. Nous vous demandons de déclarer incompétent le TPI de Dixinn ».
Un argument balayé d’un revers de main par Me Pépé Antoine Lamah : « Nous sommes devant un tribunal correctionnel. C’est trop facile de dire que quelqu’un est officier de police judiciaire. Mais est-ce qu’ils avaient une habilitation du procureur général ? Où est cette habilitation ? Nous savons que c’est pour des besoins de preuves qu’on va fabriquer une habilitation. Mais elle ne nous est pas opposable parce qu’au moment des faits, elle n’existait pas. Rejetez catégoriquement cette réquisition du procureur ».
Me Salifou Béavogui, lui, estime que le parquet de Dixinn cherche tout simplement à se protéger et à protéger les mis en cause : « Le ministère s’évertue d’abord à démontrer que cette procédure n’est pas à son initiative, elle l’est très bien. Les prévenus ne sont pas là, le procureur cherche à se sécuriser et à sécuriser Fabou. Rejetez sa requête et décernez un mandat d’arrêt contre les prévenus ». Ces propos ont fait sortir le pro-crieur de ses gongs : « Le ministère public n’est pas du tout initiateur de cette procédure, contrairement à ce que les gens mal intentionnés racontent. La procédure a été initiée par les victimes. Si le ministère public initie une procédure, il n’y a pas de consignation, or là, c’est le contraire. Me Béa n’arrête pas de dire que nous défendons une personne ou nous protégeons un privilège, ce n’est pas le cas. Il y a un public qui nous écoute, qui veut comprendre. La presse est présente, qu’il arrête parce que ça fait mal ». Charles Wright a mis fin à l’empoignade, en suspendant l’audience pour délibérer sur l’exception soulevée par le mystère public.
A la reprise, il désavoue une nouvelle fois le tout puissant pro-crieur de Dixinn : « Attendu que le mystère public n’a apporté aucune preuve pour étayer son exception, attendu que les prévenus n’ont pas daigné se présenter, le tribunal de première instance de Dixinn rejette l’exception soulevée par le ministère public, décerne un mandat d’arrêt contre les deux prévenus ».
La décision n’a pas plu à Sidy Souleymane N’Diaye. Il s’est empoigné avec Alphonse Charles Wright : « Vous ne pouvez pas m’empêcher de relever appel. Je le dis, je relève appel. Tout cela sera formalisé ici-même et déposé à la Cour d’appel dans les heures qui suivent ».
« Vous êtes dans vos droits » rétorque le juge. L’affaire est renvoyée au 1er octobre prochain. Mais Me Pépé Antoine Lamah déclare que l’appel interjeté par le parquet n’empêche pas la poursuite du procès : « Ils ont été cités deux fois à comparaître par devant le tribunal, ils ont brillé par leur absence. Il est admis qu’en pareil circonstance, le tribunal peut décerner un mandat d’arrêt contre le prévenu qui a refusé de comparaître. C’est le droit le plus absolu du procureur de relever appel, mais je souligne simplement que l’appel contre ce jugement ne fait pas obstacle à l’exécution de ce mandat. Le procureur en tant qu’autorité chargée d’appliquer les décisions de justice a l’obligation d’exécuter ce mandat. Ce qui veut dire qu’avant l’audience du 1er octobre, les prévenus doivent être arrêtés et conduits à la Maison centrale de Conakry ».On croit rêver.
Yacine Diallo