Des bouchons terribles ont étranglé la capitale, notamment la commune de Ratoma, mercredi 24 février. Raison : la circulation a été coupée pour permettre à Alpha Condé de se rendre à l’hôtel Sheraton, dans le quartier de Kipé (banlieue nord-est). Si ce n’est pas nouveau que les sorties présidentielles paralysent Conakry, le paradoxe est que l’objet de cette dernière s’inscrivait dans le cadre de l’ouverture du Guinea Investment Forum. Un rendez-vous de quarante-huit heures censé aider à faire tourner l’économie guinéenne. Non la ralentir.
Organisé par l’Agence pour la promotion des investissements privés (APIP-Guinée) et ses partenaires, la Banque africaine de développement (BAD) et la Banque mondiale via sa filiale Société financière internationale (SFI), le Guinea investment forum (Guif) vise à vendre la destination Guinée aux investisseurs étrangers. Une tâche rendue plus ardue par la pandémie de Covid-19 et la résurgence de l’épidémie Ebola, qui tuent autant les personnes que l’économie.
Si on y ajoute la fermeture unilatérale des frontières nationales avec certains voisins de la Guinée, on pourrait dire qu’Alpha Condé est lui-même un facteur de blocage au progrès socioéconomique du pays. Au lieu qu’il s’échine à convaincre les étrangers à investir en Guinée, il aurait mieux fait de créer un environnement favorable aux investissements, tant pour les Guinéens que pour les expatriés.
Mais pour lui, la faute c’est l’autre, la SFI, pour la circonstance. « Mes chers amis de la SFI, il faut qu’on se dise certaines vérités. Vous avez annoncé des investissements importants en Guinée mais qui n’ont pas bénéficié aux hommes d’affaires guinéens », a remarqué d’entrée Alpha Condé, à l’entame de la cérémonie.
« Ces investissements ont servi aux monopoles : à Alcoa qui est une société américaine, à Sheraton… Nous souhaitons désormais qu’effectivement la SFI finance les investisseurs, les hommes d’affaires guinéens. Et je suis sûr que la nouvelle direction de la SFI nous accompagnera. Aligner des chiffres énormes pour Alcoa et Sheraton donne l’impression que la Guinée est accompagnée. Or, ce sont les monopoles étrangers qui sont accompagnés ». Qui indexe le boom hôtelier privé (pour ne pas dire étranger) de la dernière décennie comme baromètre de prospérité pour les Guinéens ?
Le chef de l’Etat en a profité aussi pour flétrir certaines tares de l’administration guinéenne. « Il y a des fonctionnaires en fonction depuis 50 ans ! Or, l’âge de la retraite, c’est 65 ans. Ce qui voudrait dire qu’ils sont entrés en fonction à neuf ans ! Tout ça va être balayé, sans état d’âme. Mon ami, mon parent, c’est la Guinée. Alors faites confiance en la nouvelle Guinée. Tous les Guinéens doivent faire leur révolution culturelle ». Pour les investisseurs, il n’y a rien de plus convaincant !
DL