Le 10 février, les avocats des opposants au 3e mandat du Président Alpha Condé, incarcérés à la Maison centrale de Conakry, annonçaient la suspension de leur participation. Histoire de protester contre ce qu’ils appellent ‘’la violation répétée des droits de la défense’’ notamment par le tribunal pour enfant et la ‘’parodie de justice’’ que la justice guinéenne serait en train de préparer. Mais cette décision, prise de commun accord avec leurs clients, ne semble pas ébranler outre mesure le pool de juges d’instruction commis à la tâche.  Ils continuent d’extraire à chaque fois Oumane Gaoual Diallo, Chérif Bah, Abdoulaye Bah, Etienne Soropogui, Cellou Baldé et autres de la prison, pour tenter de les auditionner. Ces détenus ont, pour le moment opté pour le silence. Ce 24 février, leurs avocats sont, une nouvelle fois, montés au créneau pour dénoncer cet état de fait. Me Salifou Béavogui assure qu’on va tout droit vers la condamnation sans procès juste de leurs clients : « Si nous ne prenons pas garde, des peines pourraient être distribuées selon les têtes des clients…Le collectif avait déjà dénoncé ces arrestations arbitraires, relevé le caractère fallacieux des chefs d’inculpation. Il ne fait l’ombre d’aucun doute que notre justice, plus soucieuse de satisfaire les réquisitions du ministère public que la manifestation de la vérité, entraine l’opinion vers une parodie de justice que nous ne saurons cautionner. En réalité, c’est une procédure biaisée qui aboutira à un procès inéquitable dans lequel le collectif estime que les peines à distribuer sont déjà programmées ».

Il en a pour preuves la manière dont le pool des juges d’instruction gèrerait cette affaire : « Ils extraient nos clients pour les soumettre à l’interrogatoire au fond sans avocats, même commis d’office, alors que les faits  pour lesquelles ils sont poursuivis sont de nature criminelle. L’instruction préparatoire, au lieu d’être menée à charge et à décharge, est conduite à charge. Nos clients n’ont plus aucune possibilité de démontrer leur innocence ».

Me Béa s’en prend également au tribunal pour enfants. Il indique que cette juridiction a profité de la suspension de leurs activités pour organiser un procès express d’une vingtaine de mineurs juste pour renvoyer certains en prison : « Il a distribué des peines et des libérations à sa guise ».

L’avocat peste contre les conditions de détention de leurs clients et les maladies que ces derniers auraient attrapées en prison : « Des fois, Ousmane Gaoual a l’impression que son côté gauche ne fonctionne pas. Il a été évacué deux ou trois fois à l’hôpital à ses frais, une fois, il a payé 7 millions à la Caisse nationale de sécurité sociale. Ibrahima Chérif Bah est malade, Etienne Soropogui a été hospitalisé, Madic 100frontières traine une opération, Ismaël et Souleymane Condé, Cellou Baldé, ils ont beaucoup résisté, mais ils sont malades. Les conditions de détention ne sont pas bonnes ».

Mais à écouter le Président Alpha Condé, on est tenté de dire que ces prisonniers ne sont pas encore au bout de leurs peines. Le locataire de Sékhoutouréya ne s’est pas empêché d’affirmer qu’ils n’y a pas de prisonniers politiques en Guinée.

Yacine Diallo