La nouvelle est déjà connue de la plupart des Ouagalais : par un arrêté en date du 26 février 2021, le maire de la capitale du Burkina, Armand Pierre Béouindé, a interdit l’occupation à caractère social et culturel des voies publiques relevant de sa zone de compétence. Si cette décision fait le bonheur de certains usagers, d’autres par contre estiment qu’elle fera long feu car elle ne résistera pas sur le terrain et qu’elle risque de créer plus de problèmes qu’elle n’en résout. C’est le constat que nous avons fait auprès de quelques citadins dans la matinée du samedi 27 février 2021.

Dans un premier temps, nous avons pensé que les Ouagalais sont unanimes sur la décision du maire de Ouaga d’interdire l’occupation des voies publiques pour des événements à caractère social (baptêmes, mariages, etc.). En effet, les premières personnes avec qui nous avons échangé ne trouvent rien à redire. C’est le cas de cette commerçante que nous avons accostée alors qu’elle essayait de convaincre une cliente d’acheter du poisson frais. Pour cette marchande du nom de Fatimata Kaboré, l’arrêté prise par les autorités communales ne vise rien d’autre que le bien-être des usagers des voies publiques. « Pour des occasions comme les mariages, les baptêmes et autres, les intéressés doivent se contenter de leur cour, surtout que les invités n’arrivent pas tous au même moment. Le fait d’occuper une partie de la route peut causer des accidents et donc entraîner d’autres problèmes », a-t-elle déclaré, estimant qu’il faut souvent penser aux autres. Autrement dit, pour elle, « la liberté des uns s’arrête là où commence celle des autres ».

Cet avis est aussi partagé par Marcel Kafando. Nous l’avons rencontré dans les environs du grand marché de Ouagadougou où il fait habituellement ses affaires. A l’en croire, ce n’est jamais aisé de tomber sur des situations de ce genre, surtout quand la voie en question est très étroite. C’est difficile, selon lui, de se faufiler pour passer, surtout en véhicule. Il faut se résoudre donc à faire demi-tour. C’est alors que commence un autre marathon, celui de pouvoir retourner pour prendre un autre chemin. « Parfois, on ne sait plus où donner de la tête. Pour moi, le seul événement qui mérite de barrer la voie, c’est le décès. En dehors de cela, je pense qu’on peut trouver une autre solution », a-t-il soutenu avant que son voisin ne se mette à le contredire vivement.

Pour Salif Silga, l’occupation de la voie publique peut occasionner des accidents Refusant catégoriquement de se présenter à notre micro, ce jeune homme a cependant affirmé, l’air convaincu, que la décision du bourgmestre fera long feu. Il n’est d’ailleurs pas le seul à penser ainsi. Pour Abdou Karim Sawadogo, il est préférable d’autoriser et de règlementer plutôt que d’interdire. « Nous sommes en Afrique et les événements sociaux ne manquent pas. Si j’ai un mariage ou un baptême chez moi par exemple, je ne peux pas dire aux uns et aux autres de venir au compte-gouttes », a-t-il argumenté. Il estime néanmoins que si la municipalité a pris une telle décision, c’est qu’elle est certainement partie d’un constat de dérives. « Je n’ai pas lu en détail les raisons qui ont prévalu à l’adoption de cet arrêté mais je me dis qu’il y a de bonnes raisons à cela », a ajouté notre interlocuteur qui reste tout de même réservé quant à la pertinence du décret.

Pour sa part, Augustin Traoré, conseiller en assurance, trouve que les premiers responsables de la commune devraient mettre l’accent sur la sensibilisation et la communication, deux conditions sine-qua-non qui vont permettre aux populations de comprendre les raisons qui ont prévalu à cette décision qu’il qualifie par ailleurs de brusque. « Je trouve ça violent », a-t-il déclaré avant de chercher à faire des concessions. En effet, notre interlocuteur est d’avis que la plupart des Burkinabè ne respectent pas les normes édictées : « Pour des circonstances pareilles, il faut avoir l’autorisation expresse des autorités compétentes qui vont avoir un œil sur ce qui se passe à la manifestation en y déployant des agents surtout que nous vivons dans l’insécurité depuis quelques années ». A Cona-cris, on casse d’abord, on explique après. C’est plus simple, non ?

Zalissa Soré