Le déguerpissement des occupants des emprises des routes se poursuit à Conakry. Le 1er mars, les bulldozers se sont occupés de Hafia 2, commune de Dixinn. Ils ont démoli tout sur leur passage, y compris des maisons qui s’y dressaient avec aplomb. Les propriétaires accusent un voisin, avec qui ils ont un contentieux, d’avoir tout manigancé avec les agents de l’urbanisme pour casser leurs maisons.
Saliou Sow, explique : «Il y a de cela 7 ans, il y a eu un bras de fer entre mon voisin Issa Barry, commerçant et nous. Il nous a dit de lui dégager un espace pour une route pour lui permettre de rentrer avec sa voiture jusque chez lui. On lui a répondu qu’on ne peut pas le faire, parce qu’on n’a pas d’espace vide pour cela. On lui a dit de voir avec celui qui lui a vendu le terrain. C’est ainsi que M. Issa est allé chez le chef du quartier pour lui expliquer la situation. Comme ce dernier ne pouvait pas l’aider, il s’est rendu à la commune, à l’habitat et jusqu’à la justice. Mais, on lui a fait comprendre qu’il n’a pas raison. Qu’il n’y a vraiment pas une possibilité d’avoir une route à ce niveau. C’est de cette période de déguerpissement qu’il a profité pour corrompre les agents en vue de démolir chez nous.
Dans la journée du lundi 1er mars, les agents sont venus mettre des croix à l’aide du charbon et ont commencé à s’attaquer aux maisons et à leurs contenus sans nous prévenir. C’est ici que je suis né. C’est ici que j’ai grandi. Aujourd’hui, j’ai plus de 40 ans. Mais il n’y a rien qui prouve qu’il y a une route par là. Il est en train de foncer sur nous juste parce qu’il est plus riche».
Hawa Sow, une autre victime, raconte son calvaire lorsque les machines sont arrivées: « J’étais couchée hier aux environs de 14 heures, ma fille est venue me dire que les agents sont en train de casser chez nos voisins. Peu de temps après, ils sont venus chez moi pour casser ma boulangerie. J’ai demandé d’arrêter mais en vain. C’est quand j’ai sorti une somme de 2 500 000 GNF pour leur donner que leur chef a dit d’arrêter. Avant de partir, ils ont dit qu’ils allaient revenir aujourd’hui (NDLR mardi 2 mars) à partir de 12 heures pour déguerpir le reste. Il est 13 heures, on ne les voit pas encore. J’habite ces locaux depuis le temps de feu président Sékou Touré, mais on n’avait jamais parlé de route par là. Je vous fais comprendre que nous sommes juste victimes du mauvais voisinage. Ce matin, je me suis rendu au ministère de la Ville et de l’Aménagement du Territoire avec mes documents pour leur expliquer la situation. Ils m’ont dit de revenir qu’ils vont envoyer une délégation pour faire le constat, mais on ne les voit pas jusqu’à présent. Je suis une veuve avec beaucoup d’enfants, notre seul espoir est placé dans cette boulangerie. C’est pourquoi, je leur ai donné l’argent et je leur ai demandé pardon de ne pas la casser. Sinon on risque de se retrouver dans la rue pour mendier ».
Alseny Sow, électricien, ajoute : « C’était aux environs de 14 heures dans la journée d’hier lundi 1er mars que les agents du ministère de la Ville et de l’aménagement du Territoire ont commencé à cocher nos bâtiments avant de les démolir. Nous avons sorti nos documents pour leur montrer que rien n’indique l’existence d’une route par-là, mais ils ont décidé de faire ce qu’ils veulent. Certainement, c’est notre voisin El Hadj Issa Barry, qui est derrière cette action. C’est lui qui est allé négocier pour qu’ils viennent démolir chez nous. Il y a longtemps qu’il il voulait une route. Quand ils ont commencé le déguerpissement, ils n’ont pas voulu s’arrêter. Ils ne pouvaient pas continuer tout droit parce qu’il y a une mosquée qu’ils ne veulent pas toucher. C’est ainsi qu’ils ont contourné pour venir casser chez moi ».
Pour le commerçant Issa Barry, ce sont des accusations sans fondement : «Je ne comprends pas l’accusation de mes voisins. C’est ma fille qui m’a appelé pour m’informer que des agents ont coché chez nous. J’ai appelé un maçon pour lui dire d’aller casser la partie concernée pour le déguerpissement. Peu de temps après qu’il ait fini, ma fille m’a rappelé pour m’informer que les bulldozers sont venus pour démolir chez nous. Je leur ai dit de faire sortir nos biens. Le soir, ma femme m’a appelé pour me dire de ne pas rentrer à la maison. Les voisins disent que c’est moi qui suis parti négocier pour casser chez eux. Ils détiennent des bâtons et des coupe-coupes, et comptent me tuer s’ils me voient. C’est ainsi que j’ai appelé le commissariat de Police de Bellevue, pour les informer de la situation. Le colonel m’a dit qu’ils vont sécuriser chez moi jusqu’au lendemain matin.
Il y a un problème non réglé entre mes voisins et moi. Ce n’est pas la première fois que la famille Sow nous menace. Je leur avais demandé de me libérer la route pour venir chez moi. Ils sont allés se plaindre à la commune on en a parlé, mais il n’y a pas eu de suite. Nous vivons avec un doyen dans le quartier, il se nomme Samba Waré, aussi des démarcheurs. Tous avaient signalé la construction anarchique de la famille Sow. Ils devaient donc me céder le passage. Comme ils ne l’ont pas fait, je leur ai dit que c’est leur problème. Même la justice leur a dit de s’exécuter, ils n’ont pas accepté. Ils sont allés négocier pour se maintenir. Ils m’accusent d’être derrière cette action, mais si c’était le cas je n’allais pas casser chez moi ».
Baïlo Diallo